Pivot Stratégique pour Transformer L’Intérêt Partenaire

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Pivot Stratégique pour Transformer L'Intérêt Partenaire
Pivot Stratégique pour Transformer L'Intérêt Partenaire

Anwar El Mourjani

Africa-Press – Senegal. Le Sénégal est entré dans une phase de diplomatie économique assumée, où Dakar négocie simultanément avec l’Europe, la Chine, la Turquie et les pays du Golfe tout en cherchant à préserver ses propres priorités industrielles. Dans les ministères, la logique est claire: faire de la concurrence entre partenaires un levier plutôt qu’un risque. Infrastructures, énergie, pêche, services numériques et pharmacie sont devenus des terrains de jeu croisés pour bailleurs, entreprises publiques et groupes privés étrangers. Les institutions européennes demeurent centrales pour le financement de grands travaux, tandis que des entreprises chinoises dominent encore une grande partie de l’exécution. En parallèle, les capitaux du Golfe ciblent l’agro-industrie, la logistique et l’immobilier. La vraie question pour l’État est de savoir jusqu’où il peut orienter ces intérêts convergents vers des objectifs nationaux concrets: montée en gamme industrielle, renforcement des capacités productives et émergence d’acteurs sénégalais capables de tenir dans la durée.

Cette stratégie se lit particulièrement bien dans les corridors industriels de Diamniadio et autour du port de Bargny. Les banques de développement européennes veulent y ancrer de nouvelles zones manufacturières tournées vers l’export, avec en toile de fond gouvernance renforcée et normes environnementales. Des groupes chinois proposent, eux, des plateformes industrielles livrées clés en main, adossées à des financements concessionnels et à des délais d’exécution réduits. Les investisseurs du Golfe discutent de concessions de long terme dans la logistique, les zones économiques spéciales et la transformation agroalimentaire, avec l’idée de faire du Sénégal une base d’exportation vers l’Afrique de l’Ouest. Dakar essaie de tirer parti de cette compétition en posant des conditions plus strictes: embauches locales, clauses de transfert de compétences, intégration de fournisseurs sénégalais dans les chaînes de valeur et engagements clairs sur la durée des concessions.

Cette diplomatie économique illustre un changement de posture. Le Sénégal cherche à ne plus être un simple réceptacle des cycles d’investissement venus de l’extérieur. La perspective de recettes tirées des hydrocarbures, la position stratégique dans les corridors de transport régionaux et la croissance du secteur des services offrent à Dakar un capital politique et économique qu’elle tente de monnayer plus fermement. Chaque accord reste pourtant un compromis entre vitesse d’exécution et exigence de gouvernance, entre afflux de capitaux et maîtrise des actifs stratégiques. La capacité du pays à défendre son autonomie industrielle dépendra de la cohérence de ses politiques publiques: application rigoureuse des règles de passation des marchés, suivi réel des concessions, articulation systématique des projets étrangers avec les plans nationaux. Le test est simple: savoir si la compétition entre grandes puissances sur le sol sénégalais produit un appareil productif plus robuste ou si elle reconduit, sous des formes renouvelées, un modèle d’extraction sans profondeur industrielle.

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