Africa-Press – Senegal. Le virus Ebola est un expert du camouflage. Comme le coronavirus responsable du Covid-19, le virus Ebola peut lui aussi entrainer la fabrication de tunnels entre les cellules, pour s’y cacher et passer d’une cellule à l’autre sans être détecté. Une stratégie qui explique en partie comment ce virus parvient à rester dans l’ombre pendant des années chez un survivant avant de resurgir soudainement et déclencher une nouvelle flambée épidémique (comme cela a été le cas en Guinée en 2021).
Cette découverte, publiée le 15 novembre 2023 dans le Journal of Infectious Diseases par des chercheurs de l’Institut de recherche biomédicale du Texas à San Antonio (États-Unis), montre que ce virus pourrait échapper aux traitements actuels et souligne l’urgence de chercher de nouvelles armes pour le débusquer et l’empêcher de se cacher.
Le virus se terre avant de refaire surface
Le virus Ebola est l’une des plus grandes menaces de santé publique actuelles, notamment à cause de son taux de mortalité extrêmement élevé (entre 40 % et 70 % pour les épidémies les plus récentes en République démocratique du Congo, selon l’Organisation mondiale de la santé). Mais à cette très haute létalité s’ajoute sa capacité à survivre dans le corps des survivants. Ainsi, sa menace est toujours présente, car il peut se réveiller à n’importe quel moment et démarrer une nouvelle vague épidémique, des années après la fin supposée de l’épidémie, entrainant des épidémies à répétition.
Des études précédentes avaient mis en évidence certaines des cachettes du virus, telles que le cerveau, le sperme ou les globes oculaires, des endroits où il est à l’abri du système immunitaire. Mais cette nouvelle recherche montre qu’il pourrait se cacher presque n’importe où, en restant toujours à l’intérieur des cellules pour ainsi éviter l’espace extracellulaire où il serait facilement détecté.
Des détours pour passer d’une cellule à une autre sans être détecté…
Lors d’une infection, le virus Ebola se propage dans l’organisme comme n’importe quel autre virus: il infecte une cellule, s’y multiplie en formant de nouveaux virions qui en suite sortent de la cellule infectée et vont chercher de nouvelles proies. Mais, comme le montre cette étude faite sur des cellules humaines, il peut aussi passer d’une cellule à une autre sans jamais vraiment sortir de la cellule.
La cellule infectée se met à produire une grande quantité de microtubules vers l’extérieur, des structures normalement utilisées pour échanger des composants cellulaires. Un processus qui est exacerbé par l’inflammation, comme celle causée par le virus Ebola. Ces microtubules vont en suite accrocher d’autres cellules, les connectant avec la cellule infectée.
Puis, le matériel du virus (ses gènes et les protéines qui forment son corps) peut passer par ces tunnels et ainsi infecter ces autres cellules sans jamais quitter la première cellule infectée. Ces microtunnels pouvaient être longs de plus de 200 micromètres, que le matériel du virus pouvait traverser à une vitesse de 27 nanomètres par seconde. Pas vraiment un raccourci (il peut passer d’une cellule à une autre en environ deux heures) mais un détour qui lui permet de rester discret.
Donc même si un survivant ne présente plus du tout de particules virales dans le sang, il peut en avoir de cachées dans ces cellules. “Nos résultats suggèrent que le virus peut créer des cachettes, s’y cacher et après aller dans de nouvelles cellules pour s’y répliquer”, résume dans un communiqué la virologue Olena Shtanko, autrice de l’étude.
et qui les protègent des traitements antiviraux…
“Plus important encore, nous avons observé que l’infection par le virus Ebola pouvait se propager dans des cultures traitées avec des inhibiteurs d’entrée du virus ou des traitements thérapeutiques qui empêchent les virus de pénétrer dans une cellule”, alerte la chercheuse. En effet, son équipe a testé l’efficacité de certains de traitements connus contre le virus.
Pour remarquer que grâce à ces tunnels, le virus Ebola peut résister aux traitements qui normalement l’empêchent d’entrer dans les cellules, comme par exemple des anticorps monoclonaux qui détectent et bloquent la protéine que le virus utilise pour s’accrocher aux cellules. C’est-à-dire qu’une fois que le virus a infecté sa première cellule, il est peut-être déjà trop tard pour le stopper, tant qu’on ne s’attaque à ces tunnels. Soulignant l’urgence de trouver de nouvelles armes pour chasser le virus de ses cachettes et l’éliminer une bonne fois pour toutes.
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