Obésité: Découverte ÉClaircit un MystèRe Vieux

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Obésité: Découverte ÉClaircit un MystèRe Vieux
Obésité: Découverte ÉClaircit un MystèRe Vieux

Africa-Press – Senegal. L’obésité ne manque pas de paradoxes. Associée à une diminution du plaisir apporté par la nourriture calorique et même jusqu’à récemment (à tort) à une meilleure santé cardiovasculaire, elle ne serait peut-être pas le contraire biologique de la lipodystrophie (manque pathologique de stockage des graisses). Trop peu ou trop de graisses, entre les deux extrémités du spectre se cachent des processus probablement plus similaires qu’on ne le pense, suggère une nouvelle étude française publiée dans la revue Cell Metabolism. Contre-intuitifs, ces nouveaux résultats révèlent les effets apparemment antagonistes de la protéine HSL, initialement connue pour son rôle de « mangeuse de graisses ».

La HSL, protéine « Pac-Man » mangeuse de graisses

« En 1964 a été découverte la protéine HSL, qu’on pourrait imaginer comme un ‘Pac-Man’ qui grignote les lipides et libère les acides gras de la gouttelette lipidique », qui sont de petites gouttes de graisses contenues dans les adipocytes, les cellules des tissus gras, explique à Sciences et Avenir Dominique Langin, professeur à l’Université et au CHU de Toulouse, spécialiste du métabolisme dans le diabète et l’obésité officiant à l’Inserm. « On pouvait donc imaginer que supprimer la HSL reviendrait à fermer le robinet d’évacuation des graisses et donc à une augmentation du stockage de la masse grasse. »

Mais en 2000, des chercheurs japonais découvrent tout l’inverse: sans HSL, les souris ne sont pas obèses comme on s’y attendrait, mais au contraire lipodystrophiques. Rare, la lipodystrophie entraîne notamment une perte de masse graisseuse dans le corps et s’accompagne souvent d’un diabète. C’est en 2014 que quelques personnes Amish déficientes en HSL sont diagnostiquées lipodystrophiques. « C’est là que nous avons commencé à nous dire que la HSL a d’autres fonctions que celle de mobiliser les graisses », relate Dominique Langin.

La présence et les effets inattendus de la protéine HSL dans le noyau

Avec son équipe, ils suivent la piste de la protéine HSL depuis plusieurs années déjà, lorsqu’ils font une découverte surprenante. « Nous savions que les HSL étaient très abondantes à proximité des gouttelettes lipidiques, mais cette fois on les a également vues dans les noyaux des adipocytes », rapporte Dominique Langin. Pour comprendre cette découverte, il faut savoir que comme toutes nos cellules, les adipocytes possèdent un noyau – contenant notamment son ADN, formant un compartiment séparé du reste de l’intérieur de la cellule, où se trouvent de multiples gouttelettes lipidiques (de petites vésicules graisseuses). Sous l’effet notamment du stress, l’organisme se prépare à la fuite ou l’affrontement en libérant certaines hormones comme l’adrénaline et la noradrénaline. Ces dernières activent indirectement les protéines HSL, qui en transforment les triglycérides (lipides) en acides gras libres utilisables pour fournir de l’énergie à l’organisme.

Un rhéostat de la santé de l’adipocyte

La présence d’HSL dans le noyau, qui ne contient pas de gouttelette lipidique, semble donc inutile. Et pourtant ! Chez les souris modifiées génétiquement pour n’avoir des HSL que dans le noyau, la masse grasse était retournée à la normale par rapport aux souris qui n’en avaient pas du tout. « C’était notre résultat le plus spectaculaire: la présence de 10% des HSL dans le noyau était suffisante pour rétablir un développement apparemment normal de la masse grasse », souligne Dominique Langin.

Cette compensation de la lipodystrophie par la simple présence d’une quantité précise d’HSL dans le noyau, où on ne pensait même pas qu’elle était supposée se trouver, montre qu’elle est bien plus qu’une mobilisatrice de graisses. « Nous avons vu qu’elle interagit avec plusieurs protéines dans le noyau et agit ainsi à la fois sur la production d’énergie par les mitochondries (de petites usines de production d’énergie présentes dans toutes les cellules du corps, ndlr) et sur la sécrétion de protéines par la cellule vers la matrice extracellulaire », explique Dominique Langin. « Il reste beaucoup de choses à éclaircir, mais cette quantité de 10% de HSL dans le noyau semble constituer une sorte de rhéostat de la santé de l’adipocyte », interprète le chercheur. Un cycle très finement régulé permet ainsi aux HSL de sortir du noyau ou y rentrer pour y maintenir cette quantité constante.

Obésité et lipodystrophie, des pathologies plus similaires qu’on ne le pense

Il se pourrait que ces dysfonctions de la HSL soient également impliquées dans l’obésité. « De plus en plus on s’aperçoit que lipodystrophie et obésité partagent les mêmes dysfonctions dans l’adipocyte et ont les mêmes conséquences sur l’organisme », avance Dominique Langin. Les deux maladies ont par exemple des complications cardiovasculaires et métaboliques (comme le diabète) similaires. « Ces pathologies ne sont peut-être pas si différentes et résulteraient d’une limite dans la capacité à accumuler les graisses. » Car contrairement à ce que l’on pourrait croire, les adipocytes des souris lipodystrophiques par déficience en HSL ne sont pas tous petits mais de taille très variable, voire énormes, comme dans l’obésité. « Ces adipocytes hypertrophiés ne sont pas en bonne santé et n’assurent pas correctement leur fonction. Le stockage et la mobilisation des graisses se font de moins en moins bien, ce que sécrètent les adipocytes est perturbé, et le tissu adipeux envoie des signaux négatifs à l’organisme qui peuvent causer des maladies cardiovasculaires ou du diabète », résume Dominique Langin.

Les chercheurs prévoient d’ores et déjà de vérifier ce parallèle entre le manque et le trop-plein de masse grasse. « Sur l’obésité qui concerne beaucoup plus de monde, nous aimerions étudier la modulation de la HSL nucléaire pour regarder les conséquences sur le développement des adipocytes et des complications », anticipe le chercheur. « Il est important de comprendre l’origine de la maladie pour espérer un jour adapter le traitement », explique Dominique Langin. « Mais nous sommes encore loin de la stratégie thérapeutique. »

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