Honneur au TCHAD d’ouvrir les Journées Cinématographiques de Carthage à TUNIS

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L’héroïne du film tchadien à l’ouverture des JCC Tunisie 2021

Anouar CHENNOUFI

Africa-Press – Tchad. L’héroïne du film tchadien à l’ouverture des JCC Tunisie 2021
La 32e édition du Festival du film de Carthage s’est ouverte dans la Capitale tunisienne, Tunis, du 30 octobre au 6 novembre 2021, avec la participation de 54 films aux compétitions officielles du festival, dont 18 longs métrages et documentaires et 36 courts métrages de fiction et documentaires.

A noter que les « Journées cinématographiques de Carthage » ou « JCC », sont un prestigieux festival de cinéma qui se tient tous les deux ans à Tunis, en alternance avec les « Journées Théâtrales de Carthage » ou « JTC ».

Les JCC sont devenues quant à elles un festival annuel en 2015, et il demeure à ce jour la plus ancienne manifestation de ce genre, encore active sur le Continent africain.

Lors de cette édition, l’honneur était revenu à un film tchadien réalisé par Mahamat-Saleh Haroun et intitulé « Les Liens sacrés » (روابط مقدسة), déjà présenté au dernier Festival de Cannes en France.

En effet, le célèbre réalisateur tchadien Mahamat-Saleh Haroun, qui a présenté son nouveau film, dans le cadre des projections de la compétition des JCC 2021 à Tunis, semblait porter sur la cause des femmes dans les pays en développement, dans l’objectif d’atteindre l’égalité des genres au niveau du public et dans la mesure où l’on peut dire qu’il a fait un film « féministe » dans tous ses détails.
Son film aux JCC est un film qui a dévoilé la souffrance et le combat d’une mère célibataire dans une société traditionnelle.

Haroun, vient en fait d’un pays où tous les cinémas et infrastructures ont été détruits. Son fervent souhait a toujours été de réaliser des films « mobiles » qui peuvent voyager facilement et qui soient projetés dans les pays où il est invité. Dans un pays qui a connu une guerre civile et qui a manqué de salles pendant de nombreuses années, Mahamat-Saleh Haroun a pu en devenir le premier réalisateur, puisqu’il a remporté le Prix du Jury au Festival de Cannes 2021, pour « Un homme qui crie » (2010), contribuant à changer les vue sur cet art.

Le réalisateur tchadien Mahamat-Saleh Haroun

Ce n’était pas la première participation du réalisateur tchadien à la compétition cannoise. Il y montra la plupart de ses films, au point de devenir le « porte-parole officiel » du Tchad, ce pays africain imprégné de traditions dépassées dont on parle rarement dans les médias. Le Tchad, qu’Haroun porte dans son cœur et dans sa conscience, a toujours été la préoccupation de ce réalisateur sexagénaire qui aborde les problématiques de son cinéma, avec calme. Il est nommé ministre de la Culture et du Tourisme de 2017 à 2018. Il occupe ce poste pendant un an avant de démissionner après s’être rendu compte qu’il préférait l’art à la politique, « qui est un jeu de pouvoir », selon lui, sans toutefois révéler plus de détails sur cette expérience.

Pour revenir à son film « Les liens secrets » qui a été projeté durant la cérémonie d’ouverture officielle à Tunis, il nous a semblé que Haroun s’est aventuré à « pénétrer » dans l’intimité d’une petite famille mère-fille. La mère est vue dans son entourage comme une femme inapte, parce qu’elle est une mère célibataire. Les gens autour d’elle ignorent le fait que son amant l’a abandonnée pour élever seule sa fille. Nous la voyons extraire le fer des roues, puis en fabriquer des objets pour les vendre dans la rue. Bref, elle et sa fille vivent dans des conditions primitives. C’est ainsi qu’elle subvient à ses besoins et à celui de sa fille après que tout le monde, même sa propre famille, l’ait abandonnée.

L’histoire d’une mère célibataire vivant en état de siège social dans un pays gouverné par de vieilles mentalités ?

Scène du film « Les liens sacrés »

Le spectateur pourrait bien se demander « Qu’est-ce qu’il y a de nouveau à ce sujet » ? Evidemment rien de nouveau si ce n’est que l’histoire ne se limite pas à la mère, mais c’est aussi l’histoire de la fille qui se retrouve enceinte à l’âge de quinze ans, après avoir été violée par un homme âgé. Cette grossesse va changer la vie de la mère et de sa fille à 180 degrés, mais cette fois, il n’y a pas de silence sur l’injustice, car la mère décide de prendre elle-même le droit de sa fille, peut-être pour que l’injustice et l’exclusion qu’elle a vécues dans sa vie ne se reproduiront plus jamais.

Il y a plusieurs thèmes que le film aborde sans vraiment engager une discussion à leur sujet, ce qui le rend un peu superficiel : l’avortement, la circoncision et l’assujettissement absolu des femmes dans une société patriarcale. L’avortement dans le cas d’une fille qui a été violée est un crime, cinq ans de prison et une interdiction religieuse.

Néanmoins, il importe d’avouer que la rhétorique du film est sans équivoque : un triomphe pour l’égalité et le droit des femmes à contrôler leur propre corps.

Haroun est décisif en la matière et extrémiste dans sa démarche. Il n’y a pas de développement social sans détruire les traditions, les coutumes et les valeurs qui sont considérées comme bien établies, et il n’est plus possible de coexister avec elles et de leur permettre de gâcher la vie de prés de la moitié de la société.

La voie du changement peut être longue et périlleuse, mais Mahamat-Saleh Haroun est un idéaliste qui croit au premier pas dans la direction du changement et fait ce que sa conscience lui dicte. En ce sens, « Les Liens Sacrés » est un film politique, sachant que le réalisateur dit que tout est politique !

Le film condamne clairement l’hypocrisie sociale au Tchad, car les croyants prétendent que tous sont frères, alors que leurs actions suggèrent le contraire. Tout dans cet endroit géographique essaie de garder les femmes captives de l’ignorance et du retard.

Haroun, qui est un francophone résidant à Paris depuis des années, est l’un de ceux qui croient que raconter n’importe quelle histoire à travers des images est plus important que de la raconter à travers le dialogue.

Logo officiel des JCC

Liste des prix distribués lors de la cérémonie de clôture des JCC :
https://www.jcctunisie.org/jccPrix.php

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