Les autorités tchadiennes sont-elles impliquées dans la disparition de l’opposant Tom Erdimi ?

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Le dissident tchadien Tom Erdimi
Le dissident tchadien Tom Erdimi

Rapporté par
Anouar Chennoufi

Africa-PressTchad. La disparition en Egypte depuis fin 2020 de l’opposant tchadien Tom Erdimi, continue à amplifier la polémique et à susciter de multiples interrogations notamment au sein de sa famille.

Avant de passer dans l’opposition armée, Erdimi fût le premier directeur de cabinet d’Idriss Déby et l’ancien coordinateur du projet pétrole au Tchad.

Recours  à l’ONU

Assemblée générale des Nations Unies
Assemblée générale des Nations Unies

Les avocats de la famille de l’opposant tchadien, Tom Erdimi, ont annoncé, le mardi 12 Octobre 2021, lors d’un point de presse, avoir saisi le Comité des droits de l’homme de l’ONU, suite à sa disparition depuis 2020.

Lors du point de presse tenu à N’Djamena, les avocats de la famille ont dénoncé sa disparition forcée et ont affirmé avoir saisi le Comité des droits de l’homme des Nations unies pour mettre la pression en même temps sur le Tchad et l’Egypte.

« C’est l’occasion pour les deux gouvernements, tchadien et égyptien, de pouvoir clarifier la situation du docteur Tom Erdimi et également de clarifier et de sécuriser tous les citoyens dans leurs droits fondamentaux », a relevé Maître Frédéric Dainonet.

Les membres du comité de défense mandaté par la famille ont, également, souligné que c’est « le dernier appel » qu’ils lancent « à ces deux gouvernements pour pouvoir soulager sa famille qui aujourd’hui est inquiète tout comme les familles de nombreux Tchadiens qui ont également subi le même sort ».

Maître Dainonet a ajouté : « Malgré la saisine du Comité des droits de l’homme des Nations unies (…) il n’est jamais trop tard pour rassurer la famille que le docteur Erdimi est en vie et dire également pourquoi il a disparu depuis plusieurs mois ».

Pour sa part, Tia Tom, l’une des filles de Tom Erdimi qui a pris part à ce point de presse, avait, en début du mois courant, exprimé une fois de plus son inquiétude par rapport à la situation de son père.

D’après elle, « depuis l’annonce de l’arrestation de Dr Tom Erdimi et jusqu’à la date d’aujourd’hui, peu d’efforts ont été fournis (…) aucune décision ferme n’a été prise ».

Qui est en fait Tom  Erdimi ?

Tom Erdimi – frère jumeau de l’autre opposant Timan Erdimi
Tom Erdimi – frère jumeau de l’autre opposant Timan Erdimi

Pour rappel, Tom Erdimi est un homme politique tchadien, membre de l’ethnie Zaghawa, frère jumeau de l’opposant Timan Erdimi (exilé au Qatar), et il est le neveu de l’ancien président du Tchad, Idriss Déby Itno, auquel il s’opposait depuis décembre 2005.

Erdimi, qui est un géophysicien et ancien haut cadre tchadien, avait occupé plusieurs postes au sein de l’administration publique tchadienne, tels que doyen de la Faculté des sciences exactes et appliquées, recteur de l’Université du Tchad ou encore représentant du Tchad auprès du consortium pétrolier à Houston (USA).

Après sa rupture avec le régime de son oncle, il avait décidé de rejoindre l’Union des forces de Résistance (UFR), la rébellion dirigée par son frère jumeau Timane Erdimi, puis aurait été l’objet d’une disparition forcée en Egypte.

Que reprochait le gouvernement tchadien à Tom Erdimi ?

Les autorités tchadiennes accusent Erdimi d’avoir organisé une attaque armée contre lui avec le soutien du Qatar.

Dans ce contexte, un mandat d’arrêt international aurait été émis par le Tchad contre Tom Erdimi et son frère jumeau Timan Erdimi en 2007. Il a été parmi les 12 personnes condamnées à mort par contumace par un tribunal tchadien le 15 août de la même année.

Demande d’asile aux Etats-Unis

Erdimi aurait quitté le Tchad en 2005 après ses différends avec le gouvernement, et se serait rendu aux États-Unis d’Amérique pour demander l’asile, mais sa demande fût rejetée parce que son frère a rejoint l’opposition armée, il s’est donc rendu en Égypte en novembre 2014 et s’est enregistré auprès du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés en avril 2015, obtenant de facto une carte de demandeur d’asile en décembre 2019.

Disparition présumée en Egypte

Drapeau du la République d’Egypte
Drapeau du la République d’Egypte

La disparition présumée de Tom Erdimi en Egypte, aurait provoqué une vague d’indignation dans la rue tchadienne, à tel point que le journal « News and Facts from Chad » a publié au cours du mois de septembre dernier une caricature satirique représentant le président égyptien Abdel Fattah El-Sissi tenant une cage avec Erdimi à l’intérieur et remettre la cage au président tchadien Mamamat Deby Itno, Président du Conseil militaire de transition.

Il importe de rappeler que la Convention de 1951 sur les réfugiés et son Protocole de 1967, que l’Égypte avait signés, le Haut Commissariat pour les Réfugiés et le Gouvernement égyptien s’étaient engagés à protéger les réfugiés et les demandeurs d’asile, et la communauté internationale criminalise également le crime de provoquer la disparition forcée de détenus, mais la loi égyptienne ne prévoit pas explicitement, dans sa législation, la criminalisation des disparitions forcées et à cause de cette lacune, le nombre de disparitions forcées en Égypte aurait augmenté au point que le « Centre Shehab pour les droits de l’homme » a annoncé le mois dernier que le nombre de disparitions forcées dépassait 12.000 cas au cours de la huit dernières années.

Déclaration de Latifa l’autre fille de Tom Erdimi

Latifa Erdimi, la fille de l’opposant tchadien Tom Erdimi, a révélé au journal « Mada Masr » que son père avait disparu après que les services de sécurité égyptiens l’aient arrêté en octobre 2020. Elle a expliqué que le dernier message qu’elle avait reçu de son père, avant son disparition en Egypte, était daté du 25 septembre dernier.

La famille, qui au cours des deux derniers mois a organisé des manifestations devant l’ambassade d’Égypte à N’Djamena, à Ottawa (Canada), et dans la capitale française Paris, chercherait actuellement à saisir la Cour Pénale Internationale (CPI), selon Latifa, qui a déclaré que les manifestations au Tchad ont été dispersées par la force, mais les membres de la famille continuent de manifester devant les institutions égyptiennes établies à N’Djamena, telles que EgyptAir et l’Arab Contractors Company, dans le but de faire pression sur le Gouvernement égyptien pour révéler où se trouve Tom Erdimi ou bien de le libérer.

Diverses manifestations devant les ambassades égyptiennes

Sa fille, qui réside en France, a déclaré : « Un des amis de mon père s’est rendu chez lui dans la région d’Ard El-Lewa dans le gouvernorat de Gizeh pour le vérifier plusieurs jours après sa disparition, et il ne l’a pas trouvé, et tout le contenu de la maison était intact, même son téléphone et son ordinateur étaient à la maison. Plus tard, mon père l’a appelé et lui a dit qu’une agence de sécurité l’avait arrêté, puis l’appel a été coupé. »

La question qui se pose en ce moment est la suivant : Le Conseil militaire de transition est-il impliqué de loin ou de prés à cette disparition ?

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