Reed Brody : « L’impunité des grands de ce monde n’est pas une fatalité ! »

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Reed Brody : « L’impunité des grands de ce monde n’est pas une fatalité ! »
Reed Brody : « L’impunité des grands de ce monde n’est pas une fatalité ! »

Clarisse Juompan-Yakam

Africa-Press – Tchad. Dans « La Traque de Hissène Habré », qu’il publie aux éditions Karthala, l’avocat des droits humains revient sur vingt années à la poursuite du l’ancien président tchadien, condamné pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité.

Le 23 octobre 1998, l’ex-dictateur chilien Augusto Pinochet était arrêté à Londres, à la demande de la justice espagnole, dans le cadre d’une enquête sur des atrocités commises au Chili et en Argentine dans les années 1970. Pour la première fois, un mandat d’arrêt international se fondait sur le principe de la « compétence universelle », qui donne le droit, voire l’obligation, à n’importe quel État de poursuivre en justice les coupables de graves crimes relevant du droit international quel que soit l’endroit où ces derniers ont eu lieu.

Militant des droits humain à Human Rights Watch, avocat et ancien procureur, Reed Brody a participé aux audiences de la commission judiciaire de la Chambre des Lords, qui faisait alors office de Cour suprême, devant laquelle Augusto Pinochet contestait son arrestation, arguant de son statut d’ancien chef d’État. Les Lords judiciaires rejetèrent pourtant son immunité, confirmant ainsi qu’il pouvait être extradé et jugé n’importe où dans le monde.

Entre euphorie et abattement

Militants des droits humains et victimes se prirent alors à rêver de faire juger des tyrans qui semblaient intouchables. « Pourquoi pas en Afrique, pourquoi pas Hissène Habré ? », suggéra Delphine Djiraïbe, présidente de l’association tchadienne des droits de l’homme. Dans La Traque de Hissène Habré – Juger un dictateur dans un monde d’impunité, qui paraît dans sa version française aux éditions Karthala, Reed Brody raconte s’être lancé à la poursuite de l’ex-président tchadien, réfugié au Sénégal – premier pays à adhérer à la Cour pénale internationale (CPI) –, pour prouver que l’impunité n’est pas une fatalité.

Dans un récit saisissant, riche d’enseignements et de surprises, il retrace une traque semée d’embûches, revient sur les moments d’euphorie et les périodes d’abattement, déplore l’immixtion du politique, redit surtout son admiration pour la détermination des victimes et son espoir que jamais ne cesse cette lutte contre la barbarie des grands de ce monde. Yahya Jammeh, Vladimir Poutine, Benyamin Netanyahou… Pour Reed Brody, nombreux sont les dirigeants qui mériteraient de rendre des comptes.

Jeune Afrique: Dans la préface de votre livre, l’avocate Jacqueline Moudeïna révèle que faire condamner Hissène Habré était pour elle une obsession. Diriez-vous la même chose ?
Reed Brody: Ma vie a été rythmée pendant des années par le dossier Hissène Habré. Dès lors qu’on travaille longtemps et passionnément sur une affaire et qu’on se lie d’amitié avec les victimes, celle-ci devient très vite une obsession. Je n’aurais pas aimé avoir à leur dire qu’on avait fait fausse route… Il faut des personnes obsédées par la cause qu’elles défendent, comme Jacqueline et moi avons pu l’être, pour faire bouger les lignes.

Cette traque de Hissène Habré aura nécessité un travail titanesque. Dans la version anglaise du livre, l’un des chapitres commence par les mots « acharnement », « obstination », « opiniâtreté »… C’est ce qui nous a permis cet énorme travail. Aucun détail de la vie et des crimes de Hissène Habré ne nous a échappé. Pas plus que les histoires de chacune des victimes ou les questions de droit. Quand on se bat contre Goliath, il faut s’armer de patience et d’une parfaite connaissance du dossier.

Vous avez été aidés essentiellement par les victimes, qui vous ont apporté leur témoignage, mais aussi par les archives, qui vous ont été miraculeusement offertes.

En 2001, venu prêter main forte dans le cadre des plaintes déposées par les victimes devant les instances tchadiennes, j’ai visité « la Piscine », la tristement célèbre prison secrète de Hissène Habré, située sur une base militaire voisine du palais présidentiel. En en sortant, j’ai découvert un bâtiment abandonné de la Direction de la documentation et de la sécurité [DDS, la police politique] et j’ai demandé à le visiter.

Ma curiosité s’est avérée payante: dans l’une des pièces, des masses de documents éparpillés étaient enfouis sous une tonne de poussière. Il y avait là des listes de prisonniers, les certificats de décès de personnes mortes en détention, des rapports d’interrogatoires et de surveillance, la litanie des infractions kafkaïennes reprochées aux détenus – avoir accusé le chef de l’État de cacher de l’argent à l’étranger, être en possession d’une photo de Kadhafi, appartenir à un club « rasta »…

Certains documents attestaient même des vagues de répression et d’épuration ethnique dont le régime s’était rendu coupable. Il y avait là des preuves inestimables des exactions commises sous Hissène Habré. Je n’en revenais pas.

Le gouvernement de son successeur vous a-t-il confié aisément ces documents ? Ne craignait-il pas ce que vous pourriez y découvrir ?

Nous n’avions plus affaire au régime de Hissène Habré mais à celui d’Idriss Déby Itno, un homme qui, c’est vrai, n’était pas exempt de tout reproche: il avait été le chef de l’armée tchadienne pendant le « Septembre noir », en 1984, où des centaines de rebelles venus déposer les armes avant d’être incorporés dans les forces nationales avaient été massacrés avec leur famille. Certains de ces documents émanaient de l’armée mais la plupart d’entre eux relevaient de la police politique. Contre toute attente, le gouvernement d’Idriss Déby Itno a permis aux associations de victimes de photocopier ces documents qui confortaient leurs témoignages. Cela nous a pris de longs mois pour tout numériser, en compagnie d’une équipe de stagiaires venus de New York.

« Contre toute attente, le gouvernement d’Idriss Déby Itno a permis aux associations de victimes de photocopier ces documents qui confortaient leurs témoignages. »

Y a-t-il eu des moments où vous avez craint que le procès de Hissène Habré ne se tienne jamais ?

Oui, à deux ou trois reprises. Le plus déprimant pour nous ayant été la victoire du camp Habré devant la Cour de justice de la Cedeao. En effet, à la demande du Comité contre la torture, le Sénégal avait réformé sa législation afin d’avoir compétence pour des crimes commis à l’étranger. Les avocats de l’ex-président tchadien affirmaient que leur client ne pouvait être jugé sur les bases d’une législation rétroactive. Un argument irrecevable car, depuis Nuremberg, les tribunaux reconnaissent que cette règle ne s’étend pas à des actes constitutifs de crimes selon le droit international.

Toutefois, passant outre la jurisprudence de Nuremberg, la Cour de justice de la Cedeao avait contourné ce principe juridique. Or, à ce moment-là, une réunion de donateurs se préparait et nous avions déjà levé quelque 10 millions d’euros pour permettre la tenue du procès. Par la suite, à la veille du procès, nous avons éprouvé à nouveau des sueurs froides lorsque la télévision sénégalaise a annoncé que Hissène Habré avait subi deux crises cardiaques consécutives. Nous nous sommes dit: « Il ne va pas nous faire ça ! » Finalement, c’était faux. Tout était faux.

Les affaires Pinochet et Habré ont fait des émules, car elles ont rendu la justice internationale plus accessible aux victimes et aux militants…

Cela n’est pas forcément vrai pour la Cour pénale internationale [CPI]. Très peu savent ce qu’il s’y passe, comment les dossiers sont élaborés. En vingt ans d’existence, les procureurs généraux successifs de la CPI n’ont jamais obtenu la condamnation ferme d’un seul acteur étatique, de quelque niveau que ce soit. Seuls cinq rebelles y ont été condamnés. La CPI a le mérite d’exister, et on n’aurait pas pu juger Hissène Habré sans la pression qu’elle a exercé sur l’Afrique, conduisant l’Union africaine à s’investir dans l’affaire pour prouver aux Occidentaux que les Africains pouvaient juger les leurs. Finalement, les Chambres africaines extraordinaires qui ont jugé Hissène Habré à Dakar ont été soutenues par l’UA… Il s’agissait d’une Cour criminelle sénégalaise composée de magistrats sénégalais appuyés par des juges africains, avec le soutien de l’Union africaine.

Avez-vous déploré des obstructions de la part de la France ou des États-Unis ?

Non, même si, comme chacun sait, Hissène Habré était une créature des États-Unis, qui l’avaient soutenu de bout en bout. La France aussi, dans une certaine mesure. Paris l’a finalement lâché non pour des raisons morales – les atrocités commises par Habré étaient désormais connues – mais à cause de sa trop grande proximité avec les États-Unis. La France s’agaçait de voir le dictateur tchadien lui dissimuler qu’avec les Américains, ils formaient en secret un contingent de rebelles anti-Kadhafi, sous la direction de Khalifa Haftar, l’actuel homme fort de la Libye. Pour ce qui est du soutien de la France à notre combat, c’est l’arrivée de Rama Yade au gouvernement, en 2007, qui a tout changé. Le discours très anti-Françafrique de Nicolas Sarkozy nous avait remplis d’espoir. Nous avons alors tenté de sensibiliser le ministre français des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, qui ne s’est pas montré réceptif. En parallèle, l’administration Obama nous a été d’un grand soutien.

Vous dites qu’il vous a fallu gagner la bataille de l’opinion. Comment l’expliquez-vous ?

L’opinion internationale et l’opinion publique africaine étaient en notre faveur. Mais au Sénégal, Hissène Habré avait acquis une grande respectabilité. Il comptait de nombreux amis parmi les journalistes, les hommes politiques et, surtout, parmi les religieux dont Serigne Mansour Sy, l’ancien khalife général de la confrérie des Tidianes. Ce dernier, à qui je tentais d’exposer les méfaits de Habré, m’avait fait comprendre qu’il respectait mon engagement mais que son oncle, le légendaire El Hadji Abdoul Aziz Sy, peu avant sa mort, lui avait demandé de veiller sur Hissène Habré.

« Nous avons voulu montrer que l’impunité n’est pas une fatalité. Qu’avec suffisamment d’acharnement, d’imagination, victimes et militants pouvaient y arriver. »

Ce procès, vous l’avez donc voulu pour l’exemple ?

Nous avons voulu montrer que l’impunité n’est pas une fatalité. Qu’avec suffisamment d’acharnement et d’imagination, victimes et militants peuvent y arriver. En tout cas, il aura été exemplaire à plus d’un titre. Il ne s’est pas éternisé (créée en 2013, la Cour a achevé ses travaux en 2017), n’aura coûté que 10 millions de dollars, contre 2 milliards pour la Cour pénale internationale. Le procès s’est tenu, il a été équitable, bien que Hissène Habré ait souhaité garder le silence tout au long des audiences.

Il a aussi fait école: des victimes gambiennes de Yahya Jammeh vous ont contacté. S’achemine-t-on vers la création d’une juridiction destinée à juger les crimes commis durant son règne, de 1994 à 2016 ?

La Cedeao et la Gambie ont mis sur pied un comité technique conjoint destiné à préparer et à présenter, lors du prochain sommet des chefs d’État de la Cedeao, en juillet 2024, le cadre et les statuts d’une telle Cour. Il faudra ensuite parvenir à trouver les financements, ce qui sera le plus difficile. Parallèlement, le gouvernement gambien est en train de créer un bureau du Procureur, afin de débuter les enquêtes sur place. Les cas les moins complexes seront présentés devant les juridictions gambiennes. Yahya Jammeh et ses principaux sbires étant renvoyés devant cette cour, hybride, qui pourra procéder à des placements en détention et organiser des procès hors de la Gambie. Yahya Jammeh pourrait donc être jugé et placé en détention dans un autre pays de la sous-région.

La Guinée équatoriale, qui l’a accueilli après sa chute, consentira-t-elle à le laisser juger ?

La force d’un tribunal de la Cedeao, c’est qu’il permet de mobiliser le soutien de pays comme le Ghana, le Nigeria et le Sénégal, qui, en plus de leur influence, comptent des ressortissants qui ont été victimes du régime de Yahya Jammeh. Celui-ci avait d’ailleurs utilisé une portion de terre sénégalaise comme « cimetière personnel », y enterrant de nombreux migrants dont 44 Ghanéens.

« Je suis très admiratif de la conscience politique du peuple sénégalais. Descendu dans la rue pour dire non à Wade, ils ont fait de même pour Macky Sall. »

C’est Macky Sall et sa ministre de la Justice de l’époque, Aminata Touré, qui avaient permis la tenue du procès de Hissène Habré. Que vous inspire la loi d’amnistie récemment adoptée au Sénégal à la veille de la présidentielle ?

D’abord, je suis très admiratif de la conscience politique du peuple sénégalais. Descendu dans la rue pour dire non à Wade, ils en a fait de même face à Macky Sall. J’aimerais que le peuple de mon propre pays, les États-Unis, défende aussi farouchement la démocratie face aux menaces de Donald Trump. En revanche, la loi d’amnistie adoptée le 6 mars dernier me semble honteuse. L’État n’a pas le droit d’amnistier ses propres agents qui commettent de graves violations des droits humains. C’est contraire aux obligations conventionnelles du Sénégal. Cette loi d’amnistie doit être révoquée par la Cour de justice de la Cedeao. Il faut des enquêtes indépendantes sur les actions commises par l’État pendant ces périodes troubles.

Où en est le Tchad quant au travail de réparation envers les victimes tchadiennes ?

Le gouvernement tchadien vient de débloquer 1 milliard de francs CFA – 15,2 millions d’euros –, ce qui représente à peu près 10 % des indemnités prévues. Cela peut sembler insignifiant pour des héros qui ont changé le cours de l’histoire. Mais à l’échelle tchadienne, 1 500 euros apportent un grand changement de la vie. Et on ne va pas s’arrêter là. L’Union africaine doit mettre sur pied ce fonds d’indemnisation des victimes, notamment en allant récupérer les sommes dues par Hissène Habré. Malheureusement, sept ans après la fin du procès, l’UA et le gouvernement tchadien n’ont pas amorcé ce travail.

La situation des droits de l’homme à Gaza ou en Ukraine a-t-elle à voir avec celle des victimes tchadiennes de Hissène Habré ?

Les situations et les crimes sont différents, mais la soif de justice est la même. Cela fait un moment que je prodigue des conseils aux avocats palestiniens. Évidemment, les enjeux politiques internationaux sont plus cruciaux et c’est plus compliqué. Il faut donc se focaliser sur les histoires individuelles. Comme le disait Staline: « Un mort, c’est une tragédie ; un million, une statistique. » Chaque fois qu’on juge un dictateur, chaque fois qu’on juge un chef d’État, on augmente la pression mondiale pour ne pas avoir des doubles standards et en finir avec le deux poids, deux mesures.

Le titre de l’un de vos précédents livres est Faut-il juger George Bush ? Au regard de l’actualité, diriez-vous qu’il faut-il juger Benjamin Netanyahou ou Vladimir Poutine ?

Ma réponse est: oui. Il faut juger Vladimir Poutine pour crimes de guerre, crimes contre l’humanité et pour agression – le crime qui ouvre la voie à tous les autres. Benjamin Netanyahou préside à la punition collective du peuple de Gaza. Cela fait des années que le gouvernement israélien commet un crime de colonisation, lequel constitue un crime de guerre découlant d’une politique étatique. Le responsable, ce n’est pas le colon: c’est la personne qui a décidé d’installer ses citoyens dans un territoire occupé. Des organisations palestiniennes de défense des droits humains ont porté plainte devant la CPI, en vain. Je suis juif. En tant que tel, je mesure ce qui se passe en Israël en ce moment, et c’est justement ce qui m’amène à aider les Palestiniens à faire valoir leurs droits. J’ai en horreur le fait que la mémoire de la Shoah puisse être mise en avant pour justifier des crimes commis par Tel-Aviv.

« Le droit existe. Israël est du mauvais côté de ce droit. Et tous les pays qui l’aident pourraient être accusés de complicité de ces crimes. »

Comment expliquer qu’à l’inverse, Vladimir Poutine soit visé par un mandat d’arrêt international ?

C’est un deux poids, deux mesures: Poutine ne fait pas partie du club de la CPI, qui, outre les États-Unis, qui n’en sont pourtant pas membres, réunit les grands de ce monde. Mais ce qui est intéressant, c’est l’exploit de l’Afrique du Sud, qui a décidé de contourner la CPI pour attaquer l’État d’Israël pour génocide. Pour l’avocat que je suis, constater que le monde entier avait les yeux rivés sur les quinze juges de La Haye pendant les deux jours d’audience et la journée durant laquelle le verdict a été rendu était assez réconfortant. Le droit existe. Israël est du mauvais côté de ce droit. Et tous les pays qui l’aident pourraient être accusés de complicité de ces crimes.

La démarche sud-africaine n’a pas arrêté Israël…

Elle n’a pas changé la face du conflit du jour au lendemain, c’est évident. Les pays occidentaux font davantage attention. Les États-Unis se montrent plus critiques. Cela ouvre des perspectives. La CPI adresse des avertissements de plus en plus fréquents. Seul le temps nous dira s’il le fait pour amuser la galerie ou s’il finira par agir.

Vous êtes l’un des conseils du président Mohamed Bazoum. Comment va-t-il ?

Beaucoup sont étonnés que je le défende. Je ne fais pas de la géopolitique, je fais du droit. Et avec toutes ces manœuvres politiques autour de la Cedeao, on a tendance à oublier qu’un président démocratiquement élu, honorable, qui n’a commis aucun crime, fait l’objet, avec sa femme, d’une détention arbitraire depuis novembre dernier. Son téléphone a été coupé, nous-mêmes, ses avocats, ne pouvons plus lui parler. Un collectif composé d’ex-bâtonniers de la Mauritanie, du Niger, de la Côte d’Ivoire, ainsi que d’un avocat sénégalais, s’est formé. Mais nous ne parvenons pas à communiquer avec lui en dépit d’une décision de la Cour de justice de la Cedeao enjoignant l’État du Niger à le libérer. Il incombe aux autorités de l’organisation et aux États membres de la faire appliquer. Et bien que le Niger prétende quitter la Cedeao, ce pays est malgré tout tenu de respecter cela.

Et vous, concrètement, que faites-vous pour obtenir sa libération ?

Nous avons remporté une première victoire devant la Cour de justice de la Cedeao, en décembre 2023. Nous comptons désormais saisir le groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire. Nous n’avons pas de chars ; le droit est la seule arme dont nous disposons.

Source: JeuneAfrique

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