Africa-Press – Tchad. Même si le Tchad est en train d’avancer à « pas de tortue », sa stratégie semble tout de même logique car, avec la disparition du maréchal Idriss Deby Itno, et la prise du pouvoir par son fils le général Mahamat, le pays s’oriente de plus en plus vers la mise en place d’une 5ème République.
Pour rappel, depuis 2014, la République du Tchad est entrée dans une période particulièrement difficile de son histoire, chaque année qui passe infligeant à sa population un nouveau lot d’épreuves et de déconvenues.
Après l’adoption le 30 avril 2018 d’une nouvelle Constitution très controversée et l’entrée chaotique dans la « IVème République », c’est le pacte social sur lequel reposent depuis cinquante ans les bases de la République et de la vie commune des Tchadiens qui sont en péril.
L’entrée donc du Tchad dans la « IVème République », était venue ajouter une grave crise institutionnelle aux crises préexistantes, tandis qu’impérativement, en ce début d’année de 2022, le pays semble à reconstruire entièrement.
En effet, malgré les défis internes et externes, l’institution militaire tchadienne, à travers les officiers supérieurs des Forces armées du pays, soutient solidement le jeune chef militaire, du moins jusqu’à la fin de la période de transitoire fixée par le CMT (conseil militaire de transition) pour une durée de 18 mois.
Personne ne peut nier que Mahamat Idriss Deby jouit d’une grande considération et d’une position importante au Tchad, surtout que le jeune général bénéficie d’une grande unanimité de la part des Forces armées tchadiennes pour diriger la période de transition et l’instauration de la Cinquième République, en accompagnant la renaissance de la nation tchadienne qui était dirigée par son père, aujourd’hui disparu.
Premières pierres de la 5ème République
Dans ses premiers pas vers l’instauration de la 5ème République au Tchad, le général Mahamat Idriss Deby a appelé au règlement des problèmes internes et a lancé plusieurs initiatives nationales visant à un dialogue constructif entre les différentes forces vives et les personnalités politiques qui ont utilisé la diaspora comme lieu d’opposition extérieure.
Deby Jr. s’est également empressé récemment d’intensifier les initiatives d’ouverture aux groupes rebelles dans le nord du pays, et a appelé chacun à saisir l’opportunité et à participer au dialogue national global pour que toutes les composantes de la nation tchadienne puissent former un « État de paix et de stabilité » comme il l’a prévu.
A cet égard, il n’a pas hésité à prendre des mesures concrètes et décisives liées à l’amnistie et à la libération inconditionnelle de tous les détenus politiques et prisonniers de guerre, à la restitution des biens précédemment confisqués et à l’intégration des groupes armés rebelles au sein de l’Armée nationale tchadienne.
Nous pouvons donc en déduire, qu’à la suite de son initiative d’ouvrir la porte aux libertés publiques et de permettre la formation de partis politiques dans le pays, la sphère politique tchadienne a connu un large mouvement des forces politiques, et l’inauguration d’une nouvelle entité politique qui fût annoncée sous le slogan « Une seule Nation pour tous », constituée des 7 partis politiques ci-dessous, en est témoin :
• le Mouvement d’Eveil et de Révolution Sociale,
• la Paix pour la Patrie,
• le Parti Vert pour le Développement,
• le Parti National Républicain,
• le Parti Populaire pour la Justice et l’Egalité,
• l’Union des Nationalistes pour le Changement,
• et enfin l’Union nationale pour le changement au Tchad.
Pour sa part, le Rassemblement du Parti de droite, par l’intermédiaire de son président, le Dr Mohamed Al Nazif Yousef, a salué les efforts acharnés parrainés par l’État pour le dialogue et la réconciliation nationale.
Ces partis se sont engagés de facto à fournir un appui au Conseil militaire de transition jusqu’à la fin de la période transitoire. Toutes les forces politiques tchadiennes ont unanimement approuvé la démarche du président du Conseil de transition dans son encadrement d’une feuille de route nationale et la mise en place du Comité supérieur pour l’organisation du dialogue et de la réconciliation nationale, saluant par la même occasion le projet de loi d’amnistie générale en faveur des détenus.
De son côté, le 24 décembre 2021, le Parlement tchadien (Conseil national de transition dit CNT) a adopté un projet de loi d’amnistie générale au sein du Parlement avec une large majorité, comme une étape importante dans le processus de réconciliation nationale. Cette loi permet à l’élite militaire et politique de participer librement au processus global de dialogue national sans objection des autorités judiciaires compétentes.
Mahamat Idriss Deby réussira-t-il à mener son projet jusqu’au bout ?
Il ne fait aucun doute que le président de transition du Tchad joue un rôle de premier plan dans la réalisation de la stabilité interne et du repositionnement régional. Il a obtenu de nombreux acquis grâce à la réconciliation nationale qu’il a adoptée, ainsi qu’à sa politique de réduction à zéro des problèmes internes.
Il ne fait aucun doute également que Mahamat Idriss Deby soit conscient de sa position dans la région, il place donc parmi ses priorités la coordination régionale pour faire face au terrorisme, en tenant compte de l’intersection des intérêts des puissances régionales et internationales dans la région, et il veut éloigner le Tchad des menaces qui pèsent sur les pays de la région, particulièrement sur le Mali, et peut-être avec la fin de la phase de transition, il aura réussi à s’imposer comme un président digne du leadership tchadien lors de la prochaine étape, d’autant plus qu’il bénéficie du soutien des institutions militaires et sécuritaires, ainsi que des appuis extérieurs, notamment de la France, des États-Unis et des pays voisins au sien.
Mais, tout dépendra des négociations entre le Conseil militaire et les groupes rebelles tchadiens au Qatar, qui devaient débuter à Doha le 27 février dernier, et qui ont été reportées au 13 mars courant.
Anouar CHENNOUFI
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