Africa-Press – Togo. Arrêté dans la nuit du 26 au 27 mai, le rappeur togolais Aamron, de son vrai nom Tchala Essowè Narcisse, a été remis en liberté ce jeudi après-midi. Une arrestation qui avait provoqué une vive émotion au sein de l’opinion publique nationale et dans la diaspora, mobilisant militants des droits humains, partis d’opposition et internautes autour de sa libération.
Figure du rap engagé au Togo depuis la sortie de son album Black Boys en 2010, Aamron est connu pour ses textes critiques envers le pouvoir en place et ses prises de parole virulentes sur les réseaux sociaux. Depuis plusieurs mois, l’artiste s’était démarqué par une dénonciation constante des injustices sociales et des abus de pouvoir, suscitant à la fois soutien populaire et tensions avec le régime.
Selon des sources proches de la famille, l’artiste aurait été interpellé à son domicile à Lomé, sans mandat ni explication officielle. Il aurait ensuite été conduit vers une destination tenue secrète durant plusieurs heures. L’absence de communication des autorités et le silence prolongé sur les charges qui lui étaient reprochées ont renforcé les soupçons d’une arrestation à caractère politique.
L’arrestation d’Aamron a déclenché une vague d’indignation à travers le pays et au-delà. Des partis politiques comme l’ANC (Alliance nationale pour le changement) et la DMP (Dynamique pour la majorité du peuple), ainsi que plusieurs organisations de défense des droits humains, ont rapidement exigé sa libération. Une manifestation est d’ailleurs prévue ce 6 juin, jour anniversaire du président Faure Gnassingbé, pour protester contre ce que certains appellent une « dérive autoritaire du pouvoir ».
Dans un élan de solidarité, la mère de l’artiste avait lancé un appel émouvant sur TikTok, relayé des milliers de fois, tandis qu’une vidéo montrant la fille de l’artiste en larmes réclamant le retour de son père avait profondément touché les internautes.
Quelques heures après sa libération, Aamron a surpris ses fans en publiant un message d’excuses publiques à l’endroit du président togolais. Dans une déclaration lue sur les réseaux sociaux et largement partagée, l’artiste affirme:
« Je reconnais avoir tenu des propos injurieux et outrageux envers Son Excellence Faure Essozimna Gnassingbé, président du Conseil des ministres. Suite à cela, la justice togolaise m’a interpellé, et les médecins ont diagnostiqué une dépression aggravée. J’ai été transféré au centre psychiatrique de Zébé pour y recevoir des soins. Aujourd’hui, je suis plus apaisé et conscient de la gravité de mes actes. Je présente mes sincères excuses au président Faure Gnassingbé, au peuple togolais, et au monde entier. J’assume mes erreurs et rappelle que le Togo est un pays de droit: nul n’est au-dessus de la loi. »
Il conclut en appelant la jeunesse togolaise à user de sa liberté d’expression avec responsabilité, avant de lancer un message de pardon au chef de l’État:
« Excellence Faure Essozimna Gnassingbé, puisse Dieu vous donner la force de me pardonner. Je vous remercie. »
Si certains saluent un « acte d’humilité » de la part de l’artiste, d’autres y voient le fruit d’une pression psychologique exercée durant sa détention. L’évocation d’un passage en hôpital psychiatrique à Zébé interroge également, tant sur l’état de santé du rappeur que sur les conditions de sa détention.
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