Togo/Face au refrain alambiqué de «bâtir un Etat fort» : Biden crache ses vérités à Faure

16
Togo/Face au refrain alambiqué de «bâtir un Etat fort» : Biden crache ses vérités à Faure
Togo/Face au refrain alambiqué de «bâtir un Etat fort» : Biden crache ses vérités à Faure

Africa-Press – Togo. A l’Assemblée Générale des Nations Unies qui s’est tenue du 22 au 27 septembre 2024, le Chef de l’Etat togolais Faure Gnassingbé s’est exprimé devant ses pairs sur divers sujets affichant ses ambitions politiques. Au rang des priorités de ces ambitions, la construction d’un Etat fort au Togo. Une volonté affichée qui contraste avec la politique des intérêts personnels appliquée dans le pays par le régime du père en fils.

Depuis l’arrivée au pouvoir en 2005 du Président Faure Gnassingbé, la rhétorique sur la construction d’un état fort revient souvent. Il nous souvient notamment que fin 2016 dans ses vœux à la nation, le Chef de l’Etat togolais avait énoncé son ambition de « bâtir des institutions fortes ». C’était le début de son troisième mandat. Mise sous éteignoir entre temps, la formule est sortie de nouveau pour justifier la nouvelle constitution contestée. Visiblement, pour le Chef de l’Etat , aucun sacrifice ne saurait être trop grand pour parvenir à la construction d’un Etat fort au Togo. Et même l’adoption des réformes aussi impopulaires que le changement de la constitution tel qu’opéré au Togo.

Un refrain inaudible

« Au Togo, nous nous efforçons de bâtir un État fort. Nous voyons cet État au centre de toute solution d’aide au développement et humanitaire, en collaboration avec le secteur privé et la société civile. Je constate que malgré les efforts de ces dernières années, l’aide internationale reste trop souvent déconnectée tant des besoins que des capacités des populations qui en bénéficient. C’est pourquoi il faut renforcer le rôle des États africains dans l’aide au développement comme partenaire réellement stratégique et équitable », a déclaré le Président togolais le 23 septembre à l’ONU.

Début septembre en Chine lors du sommet organisé par le pays avec des Etats africains, Faure Gnassingbé a prononcé un discours quasi similaire avec un accent sur le changement constitutionnel. « La réforme institutionnelle majeure qui est en cours au Togo transforme notre régime présidentiel en régime parlementaire. Celle-ci vise à mieux équilibrer les pouvoirs exécutif et législatif. Il en va de même pour la création d’un Sénat. Nous garantissons ainsi que nos institutions politiques soient inclusives et représentatives. Nous renforçons aussi la démocratie, la transparence électorale et la redevabilité des gouvernants vis-à-vis de leurs populations », a souligné Faure Gnassingbé ajoutant que ces changements relèvent d’une « ambition stratégique »: celle de construire « un Etat fort, visionnaire et protecteur ».

Afficher une ambition stratégique pour son pays, n’est pas mauvais en soi. Cependant, les réformes devant aboutir à la concrétisation de cette ambition doivent, avant leur adoption, faire l’objet d’un large débat conformément aux principes démocratiques universellement admis.

Un Etat fort au service d’un régime

Pour inscrire dans un pays une nouvelle démarche politique au service de l’intérêt général, la première étape est l’adhésion des populations. Cette adhésion s’obtient par la présentation de sa vision aux populations. Autrement dit, ce que devrait être le Togo, comment il devrait être gouverné, comment ses populations devraient vivre et penser. Mais cette étape a été volontairement brulée. C’est face au tollé général que le régime s’est précipité pour organiser une mascarade de consultations des populations. Conséquence, plus de 7 mois après l’adoption de la nouvelle constitution et sa promulgation, nombre d’observateurs de loin les plus avisés s’interrogent encore sur les tenants et les aboutissants. D’ailleurs, c’est après l’adoption de la constitution que le régime a envoyé certains de ses émissaires auprès d’autres pays pour être formés sur leur propre loi. Curieux…

Si l’ambition était réellement de construire un Etat fort qui tisse des liens entre la population sur des valeurs positives, un Etat qui s’adresse à l’ensemble de la population, la fondation est incontestablement l’organisation d’élections réellement démocratiques. De sorte que les populations puissent s’identifier aux dirigeants. Au Togo, les réformes électorales semblent être faites dans le seul but d’affermir un plus le régime en place depuis bientôt 60 ans.

C’est une évidence, cette nouvelle constitution qui ouvre la voie d’un pouvoir à vie au Président Faure Gnassingbé s’inscrit inéluctablement dans ce sens. Et pour cause. Depuis son accession au pouvoir en 2005 dans les conditions que tout le monde sait, toutes les élections organisées au Togo ont été remportées par le parti au pouvoir malgré une gouvernance décriée.

La dernière leçon de Joe Biden

S’adressant aux Chefs d’Etat qui s’accrochent au pouvoir, à la tribune des Nations Unies la semaine dernière, le Président américain Joe Biden a sans détour mis la main dans la plaie, à l’instar de certains cancers, se métastase. L’homme qui, en juillet 2024, a de lui-même, renoncé à sa candidature présidentielle face à des sondages désastreux, a déclaré: « J’aime ce travail, mais j’aime encore plus mon pays », avant d’ajouter: « je serai heureux de passer le relais à une nouvelle génération ». « N’oublions jamais qu’il y a des choses plus importantes que de rester au pouvoir. », a-t-il précisé.

En Afrique, au mépris des valeurs démocratiques et à coup de réformes constitutionnelles, des chefs dont la légitimité est mise à rude épreuve, battent des records de longévité au pouvoir. Au Togo, le changement de la constitution opéré permet au Président Faure Gnassingbé, au pouvoir depuis 2005 et dont la famille dirige le Togo depuis cinquante-sept ans, d’exercer désormais, le pouvoir sans limitation de mandats. De ce fait, le refrain de la construction d’un Etat fort n’est sans aucun doute que du saupoudrage.

Lemy Egblongbeli

Source: Le Correcteur

Pour plus d’informations et d’analyses sur la Togo, suivez Africa-Press

LAISSER UN COMMENTAIRE

Please enter your comment!
Please enter your name here