Africa-Press – Togo. Une billetterie à guichets fermés, un stade rénové, des partenaires renouvelés, le monde des affaires qui s’y presse et des affiches alléchantes : l’édition qui s’ouvre s’annonce déjà comme la plus belle de l’histoire sur le plan économique. Un bol d’air frais après deux années tronquées par le Covid.
Ce n’était jusqu’ici que quelques coups de raquettes, des accès de fièvre sporadiques sur les courts annexes, des boutiques éparses qui ont levé le rideau pour servir les premiers badauds. Mais dimanche, au terme d’une semaine de chauffe avec un tournoi des qualifications déjà bien fréquenté, ce sera pour de vrai : Roland-Garros reprend enfin ses droits après deux années ternies par la crise sanitaire.
Voilà des mois que la Fédération française de tennis (FFT), le propriétaire du tournoi, prépare ces deux semaines absolument cruciales. Pas seulement parce que l’événement tennistique le plus regardé au monde (690 millions d’heures de visionnage cumulées dans 220 pays l’an passé) est une formidable vitrine pour ce sport. Le « French Open » est aussi et surtout le poumon économique de la discipline, une « machine à cash » à but non lucratif dont les bénéfices – 101 millions d’euros de marge brute en 2021 – servent directement à éponger le déficit des activités fédérales.
« Roland-Garros, ça n’est pas qu’un business, c’est une délégation de service public dont la marge irrigue le tennis amateur, rappelle Lionel Maltese, professeur de marketing sportif et organisateur des tournois ATP de Lyon et de Marseille. C’est pour ça qu’il y a de grands clubs en France, beaucoup d’enseignants et que le prix de la licence n’est pas élevé. »
Mauvais film
Un Roland-Garros en demi-teinte sur le plan financier, et c’est donc l’ensemble du tennis français qui trinque. Or c’est précisément le mauvais film qu’a fait subir le Covid à la FFT, ces deux dernières années : l’édition 2020 a dû être décalée à l’automne et s’est déroulée presque à huis clos ; la suivante, moins mauvaise, n’a pu recevoir qu’à un cinquième de sa capacité. A l’arrivée, une perte cumulée de « presque 96 millions d’euros », selon la directrice générale de la FFT, Amélie Oudéa-Castera, au moment même où les charges immobilières de la rénovation du stade ont été les plus élevées.
Il a donc fallu contracter un prêt garanti par l’Etat (PGE) de 40 millions d’euros et se serrer la ceinture, faire autant avec des budgets rabotés de 15 %, mutualiser les dépenses, internaliser certains projets comme la nouvelle signature « Move the lines with style », qui aurait d’ordinaire été confiée à une agence marketing. Mais voilà que se profile cette édition 2022 sans jauge, avec un chantier presque finalisé (ne reste à livrer que le toit du court Suzanne-Lenglen), un public retrouvé, des partenaires renouvelés et un spectacle sportif qui s’annonce à la hauteur : tous les ingrédients sont réunis pour réaliser le meilleur Roland Garros de l’histoire sur le plan économique.
Les fructueuses « night sessions »
Déjà, on pianote sur les calculettes pour faire les premières estimations. Avec entre 106 et 107 millions d’euros de recettes, les droits télévisuels, en légère augmentation, tiennent encore le haut du pavé. Un peu moins de 60 millions d’euros sont attendus côté sponsors, dont une petite quinzaine du seul BNP Paribas, partenaire depuis 40 ans et parrain du tournoi. Depuis 2017, Rolex a pris la place de Longines, Lacoste a pris seul en charge la partie équipementier, Renault succède désormais à Peugeot…
« Pour les marques, c’est aussi bien l’occasion de démontrer leur savoir-faire que d’avoir une exposition incroyable. Sur une minute de diffusion, le sigle BNP apparaît au moins 55 secondes à la télévision », note Bertrand Pulman, sociologue et auteur de « Rouge est la terre : Dans les coulisses de Roland-Garros » (Calmann-Lévy, 2013).
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Les sessions de nuit, nouveauté de la dernière édition, sont aussi fructueuses à plusieurs titres. Outre la hausse des droits TV, elles ont permis d’écouler 150.000 billets de plus que la dernière édition « normale », en 2019, pour un total de quelque 600.000 places – dont le gros est parti le jour de l’ouverture de la billetterie, record de célérité.
Les « night sessions », c’est aussi plus de loges, plus de salons et plus de repas réservés aux entreprises et à leurs invités. Ces « hospitalités », qui font aussi de Roland-Garros un haut lieu d’affaires (il est d’ailleurs l’inventeur du concept), font elles aussi le plein avec 1.500 clients, 200 de plus qu’en 2019. Elles devraient rapporter 56 millions d’euros, tout comme la billetterie.
Record
Reste enfin la griffe, dernier pilier de ce modèle à cinq pattes inventé par Philippe Chatrier, président de la FFT de 1973 à 1993. Une trottinette électrique, un macaron Ladurée… les produits dérivés devraient rapporter au moins 16 millions d’euros (+15 % sur un an), bien aidés par l’essor de l’e-commerce.
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