Flambée de Chikungunya à la Réunion

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Flambée de Chikungunya à la Réunion
Flambée de Chikungunya à la Réunion

Africa-Press – Mali. Tout le monde ou presque a-t-il croisé le chikungunya à la Réunion? Jusqu’à présent, on compte plus de 200.000 consultations dont 50.000 cas confirmés grâce à un test PCR. « C’est énorme », déclare Muriel Vincent, épidémiologiste à la cellule régionale de la Réunion à Santé publique France.

Lors de la précédente épidémie de chikungunya en 2005 et 2006, le nombre de malades total s’élevait à 250.000 sur 2 ans. « Là, c’est 200.000 en quelques mois. Et encore, quand le virus est réapparu en 2024, il y restait encore une part résiduelle d’immunité dans la population. » Certaines personnes touchées par le virus en 2005 possédaient encore une forme d’immunité, qui les protège contre cette nouvelle vague épidémique.

Ajouté à cela, le chiffre de 200.000 malades ne se base que sur la médecine de ville, avec les consultations chez le généraliste. Ce chiffre de 200.000 malades pourrait bien être sous-estimé, puisque toutes les personnes contaminées ne consultent pas forcément un médecin. « Jusqu’à 80% des personnes sont asymptomatiques. Dans les foyers familiaux, beaucoup de gens ont donc été atteints de façon silencieuse », explique Antoine Bertolotti, du service des maladies infectieuses au CHU de la Réunion.

Des prises de sang aléatoires

Pour tenter de connaître le nombre exact de personnes contaminées, plusieurs études vont être lancées. « Nous allons analyser des prises de sang de façon aléatoire dans la population, avec des techniques de randomisation pour que ce soit représentatif de la population », explique Muriel Vincent.

En plus de ces travaux de séroprévalence, le CHU de la Réunion prépare une étude centrée sur les foyers familiaux afin de savoir combien de personnes ont réellement été impactées. « C’est rare qu’une partie du foyer soit épargné. Quand quelqu’un a été contaminé, même avec une moustiquaire, des vêtements amples ou des sprays, il y a une certaine fatalité. Les gens se plient à ces mesures quelques jours mais cela ne suffit pas », poursuit Antoine Bertolotti.

Concrètement, il suffit qu’après avoir piqué une personne malade du foyer, le moustique se pose sur un membre encore sain et le pique lui aussi, pour qu’il soit infecté. Les symptômes se manifestent au plus tard 12 jours après la piqûre. Les moustiques ont donc largement le temps de contaminer un foyer avant que les premiers signes ne se fassent sentir. Les résultats de ces travaux doivent être publiés « au fur et à mesure. » « Comme souvent, c’est un processus lent qui demande des moyens humains et financiers. »

« Moi-même, j’ai encore des douleurs »

Cette année, les patients semblent présenter des formes plus sévères que durant la précédente épidémie de 2005-2006. En plus de symptômes ressemblant à ceux d’une grippe, les malades présentent des douleurs musculaires et des éruptions cutanées. « Cela dure normalement quelques jours. Mais cette fois, les patients disent que cela n’a rien à voir par rapport à l’épidémie de 2006. Les douleurs articulaires sont plus importantes et peuvent persister », explique Antoine Bertolotti, du service des maladies infectieuses au CHU de la Réunion. « Moi-même, j’ai encore des douleurs aux doigts, aux poignets, aux coudes, plusieurs semaines après avoir été contaminé. » Le médecin raconte que sa propre secrétaire a encore du mal à marcher. L’ANRS prévoit une analyse de cohortes pour comparer les manifestations cliniques entre l’épidémie de 2006 et celle en cours.

Un « effondrement » de la vaccination

Ajouté à cela, la campagne de vaccination, destinée à protéger les plus fragiles, n’a pas eu l’effet escompté. Elle a démarré le 7 avril, avec 40.000 doses du vaccin Ixchiq prévues selon l’Agence régionale de santé de la Réunion. « 6.000 doses ont été délivrées sur le territoire, dont 4.500 doses pensées en priorité pour les personnes de plus de 65 ans. On sait que ce sont eux qui font des formes graves, c’est donc eux qu’on a voulu protéger en premier », explique Emilie Mosnier, infectiologue au service des maladies infectieuses au CHU de la Réunion.

Mais fin avril, une série de 17 événements graves, dont la grande majorité à la Réunion, survient chez les personnes de plus de 62 ans. Depuis, les autorités constatent un « effondrement » de la vaccination. « Tous ces événements ont eu un impact, à savoir une baisse de l’acceptabilité du vaccin. Au début, la population y était favorable, puis au fur et à mesure, cette acceptabilité a baissé », explique Emilie Mosnier. Selon la chercheuse, moins d’une cinquantaine de doses de vaccin anti-chikungunya ont été administrées depuis fin avril, date à laquelle les plus de 65 ans ont été retirés de la campagne de vaccination. Un élément de plus en faveur d’une circulation du virus.

En 2006, 28% de la population avait été touchée à la Réunion. Reste à attendre la fin de l’épidémie et les résultats des études pour connaître le chiffre exact de cette nouvelle flambée.

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