Maada Bio (Sierra Leone) Prend la Présidence de la CEDEAO

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Maada Bio (Sierra Leone) Prend la Présidence de la CEDEAO
Maada Bio (Sierra Leone) Prend la Présidence de la CEDEAO

Anouar CHENNOUFI

Africa-Press – Mali. Le récent sommet de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) a connu un rebondissement inattendu avec l’élection du président sierra-léonais Julius Maada Bio en tant que nouveau président, alors que le président sénégalais Bassirou Diomaye Faye était pressenti pour ce poste.

Dans ce contexte, le président sénégalais s’était envolé pour Abuja, Capitale du Nigeria, le samedi 21 juin 2025, pour participer aux travaux électifs de la 67e Session des Chefs d’Etat de la CEDEAO, avec l’assurance de prendre la tête de l’organisation ouest-africaine.

Donné favori, le président Bassirou Diomaye Faye a été battu par son homologue Sierra-Léonais, qui a finalement été désigné à sa place. Un revirement de dernière minute qui suscite « l’ire du bloc francophone ».

• L’élection du nouveau président de la Commission de la CEDEAO crée la surprise

Ce retournement inattendu, survenu lors de la séance du 22 juin à Abuja, a été vécu comme un revers diplomatique majeur pour Dakar, puisqu’il s’agit de la deuxième défaite en moins d’un mois pour le Sénégal sur la scène régionale, après la perte de la présidence de la Banque Africaine de Développement (BAD), au profit du représentant de la Mauritanie.

Malgré l’amère déception, le président Faye a fait part de son mécontentement à ses homologues ouest-africains tout en félicitant son homologue sierra-léonais en appelant également au renforcement de l’unité de la CEDEAO, dans un contexte déjà fragilisé par la sortie des pays de l’AES.

Ce revers, qu’il n’avait pas anticipé, s’ajoute à une série d’accrocs diplomatiques pour le jeune et ambitieux chef d’État sénégalais, qui, au terme de discrètes consultations, les chefs d’État de la CEDEAO s’étaient accordés d’avance, dans la soirée du 20 juin, pour désigner le président sénégalais à la tête de l’organisation régionale, dont le leadership est plus que jamais contesté

• Les facteurs ayant joué contre le président sénégalais

1. Un choix inattendu malgré les attentes

Il importe de noter que le président sénégalais, considéré comme un favori en raison de son profil consensuel et de ses efforts de médiation avec les pays du Sahel (Mali, Burkina Faso, Niger), a finalement été écarté au profit de Julius Maada Bio.

A ce propos, des sources diplomatiques ont laissé entendre qu’un consensus semblait s’être formé autour de Faye avant le sommet, mais la décision finale a été surprenante pour de nombreux observateurs.

2. Les raisons ayant favorisé Julius Maada Bio

Le président de la Sierra Léone, a été choisi, quant à lui, pour son engagement en faveur de la stabilité régionale et son expérience en matière de gouvernance démocratique, malgré les critiques concernant l’efficacité de la CEDEAO.

Il avait promis de se concentrer sur la restauration de l’ordre constitutionnel, la sécurité régionale, l’intégration économique et la crédibilité institutionnelle de l’organisation.

3. Les réactions et tensions au sein de la CEDEAO

L’éviction de Bassirou Diomaye Faye a, certes, suscité des inquiétudes, notamment parmi les pays francophones, qui espéraient un leadership plus unificateur sous Faye, mais certains estiment que la CEDEAO a besoin plutôt d’une approche plus ferme face aux défis sécuritaires et politiques dans la région, notamment après le retrait du Mali, du Burkina Faso et du Niger.

4. Les défis qui guettent Julius Maada Bio

Bio se trouve désormais face à une région en proie à l’instabilité politique, aux crises sécuritaires (terrorisme, coups d’État) et aux tensions géopolitiques et régionales, notamment avec l’Alliance des États du Sahel (AES).

Il devra également travailler à renforcer la coopération régionale et à restaurer la confiance dans une CEDEAO déjà affaiblie et pointée du doigt.

5. L’avenir de Bassirou Diomaye Faye

Bien que déçu, le président du Sénégal pourrait jouer un rôle clé dans les futures négociations avec les pays ayant quitté la CEDEAO, étant donné ses relations avec les dirigeants militaires de la région. Son échec dans la course à la présidence de la CEDEAO pourrait aussi lui permettre de se concentrer plus intensément sur les réformes internes au Sénégal, où il fait face déjà à des défis politiques majeurs.

On peut d’ores et déjà affirmer que la présidence de Julius Maada Bio marque un tournant pour la CEDEAO, alors que l’organisation cherche à se réinventer face aux multiples crises régionales. Son leadership sera testé par la capacité à réconcilier les divisions et à relancer l’intégration ouest-africaine.

Quant à Bassirou Diomaye Faye, son influence pourrait rester déterminante dans les efforts de médiation et de stabilité en Afrique de l’Ouest.

• Investiture de Julius Maada Bio à la tête de la CEDEAO

Pour le président sierra-léonais, Julius Maada Bio, il a pris ses fonctions à la tête de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), succédant ainsi à son prédécesseur le président nigérian, Bola Ahmed Tinubu, lors du sommet tenu dans la capitale nigériane. Cet événement s’est déroulé à un moment où la région est confrontée à une escalade des menaces sécuritaires et à des tensions politiques.

Dans son discours lors de ce sommet, le nouveau président élu a déclaré: « Notre région se trouve à la croisée des chemins », soulignant que l’Afrique de l’Ouest est confrontée à des défis « anciens et nouveaux », notamment la détérioration de la situation sécuritaire au Sahel et dans les États côtiers, tels que:

-/- la montée du terrorisme,

-/- l’instabilité politique,

-/- la croissance du trafic d’armes et de la criminalité transnationale organisée.

A savoir que plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest ont été le théâtre de coups d’État militaires ou de tentatives de coup d’État au cours de la dernière décennie, ce qui a entraîné des tensions entre certains États membres.

Dans son évaluation de la situation régionale, le président Julius Maada Bio a décrit l’Afrique de l’Ouest comme étant « un carrefour dangereux », soulignant les défis sécuritaires persistants au Sahel et dans les régions côtières, la criminalité transnationale et l’instabilité politique, ainsi que la colère croissante de la population, en particulier des jeunes, en quête de justice sociale, de transparence et d’opportunités pour sécuriser leur avenir.

Il a également souligné les défis économiques auxquels la région est confrontée, tels que le changement climatique, l’inflation mondiale, l’insécurité alimentaire et la fragilité croissante des économies due à l’accumulation de la dette.

Pour relever ces défis, le président Maada Bio a annoncé quatre priorités clés qu’il s’efforcera de mettre en œuvre durant son mandat à la présidence de la CEDEAO, au premier rang desquelles:

-/- la sécurité,

-/- le développement économique,

-/- la stabilité institutionnelle,

-/- et le renforcement de la confiance entre les peuples et les gouvernements.

Parmi ses priorités, le président élu prévoit la refonte de la coopération sécuritaire régionale. Il a également plaidé pour une architecture de sécurité plus efficace, fondée sur le partage de renseignement et une capacité de réaction rapide face aux menaces transfrontalières.

De même sur le plan économique, il a appelé à accélérer l’intégration régionale à travers l’application effective de la zone de libre-échange africaine (ZLECAf), le développement des infrastructures communes et le soutien aux chaînes de valeur, avec une attention particulière pour la femme et la jeunesse.

• Mot du président sortant Bola Tinubu

De son côté, le président sortant de l’organisation, Bola Tinubu, a reconnu que « les défis sécuritaires, l’extrémisme violent et les menaces transnationales continuent d’entraver nos aspirations », appelant à une coopération régionale renforcée pour y répondre.

Malgré l’engagement des régimes militaires des pays du Sahel à faire de la sécurité une priorité, ils n’ont pas, jusqu’à présent, réussi à endiguer la prolifération des groupes armés, qui menacent désormais plus que jamais les pays du Sahel occidental, a-t-il indiqué.

• Importante constatation des observateurs

Les observateurs et les experts des affaires africaines ont convenu de noter que l’élection de Julius Maada Bio, deuxième président anglophone consécutif, a rompu la règle implicite de « rotation entre francophones, anglophones et lusophones ».

Cette décision pourrait refléter un changement dans l’équilibre des influences au sein de l’organisation, alors que l’on s’attend à ce que le nouveau président mène une phase charnière de l’histoire de la CEDEAO.

Inutile de rappeler leur souci à propos des trois pays dirigés par des régimes militaires – le Mali, le Burkina Faso et le Niger – qui s’étaient retirés officiellement de l’organisation cette année et ont formé une nouvelle coalition appelée « Alliance des États du Sahel ».

Par ailleurs, des groupes armés exploitent les tensions régionales pour étendre leur influence. Ils ont récemment intensifié leurs attaques au Mali, mené des incursions dans les principales villes du Burkina Faso et infligé de lourdes pertes à l’armée nigérienne.

A noter que le Nigéria, pays hôte du sommet, a également constaté une augmentation des attaques ciblant des villages et des bases militaires.

• Faites connaissance avec le nouveau président de la CEDEAO

Julius Maada Bio, qui est né le 12 mai 1964 à Tihun, une ville située dans le sud de la Sierra Léone, est un ancien militaire formé à l’Académie de Benguema, principal centre de formation des recrues militaires en Sierra Léone, situé à plus de 50 km à l’est de Freetown. En plus d’être un centre de formation, Benguema abrite également la plus grande caserne militaire du pays

Maada Bio s’est illustré dans les années 1990 en organisant une transition démocratique après avoir brièvement pris le pouvoir suite à un coup d’État, néanmoins, il dût quitter volontairement le pouvoir après avoir organisé des élections pluralistes en 1996.

Il a poursuivi des études dans diverses universités américaines, dont il était sorti nanti d’un master en relations internationales, avant de revenir à la politique.

Candidat malheureux durant les élections de 2012, il fût quand même élu président en 2018 puis réélu en 2023. Son action est marquée par des réformes ambitieuses:

-/- abolition de la peine de mort, -/- gratuité de l’enseignement primaire et secondaire, -/- promotion de l’égalité femmes-hommes, -/- et lutte active contre la corruption.

Avec pour ambition de renforcer le rôle de la CEDEAO dans une Afrique de l’Ouest en mutation, à 61 ans, Julius Maada Bio se positionne désormais comme une figure régionale clé !

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