Africa-Press – Cameroun. Ce lundi 2 mai 2022 marque cette année la fin du jeûne du ramadan pour les musulmans. Il s’agit du jour de l’Aïd al-Fitr. Au programme : dégustation de gâteaux en famille, cadeaux offerts aux enfants, prières et récolte de l’aumône. Quelle importance revêt donc cette journée pour les musulmans à travers le monde ? Et quels sont les objectifs derrière ces rites ?
28 jours, c’est « exceptionnel »
L’Aïd al-Fitr est donc un moment passé en famille, avec des petits gâteaux sucrés souvent préparés à l’avance, mais il est surtout « la célébration d’être parvenu, pendant un mois, à suivre les préceptes de ne pas manger, ne pas boire ou encore ne pas avoir de relations sexuelles le jour », explique Felice Dassetto, professeur émérite du centre d’études de l’Islam à l’UCLouvain. Selon lui, l’Aïd al-Fitr est certes un moment marquant car il s’agit de la fin de la période de jeûne, mais en réalité, c’est surtout « le déroulement tout entier du ramadan qui est important. »
Selon Felice Dassetto, ce qui démarque particulièrement le ramadan des autres célébrations religieuses, c’est en effet sa durée. Il explique: « Plus les festivités durent longtemps, plus c’est important. Le ramadan se déroule pendant 28 jours, c’est totalement exceptionnel. D’autant qu’il y a une vraie motivation, une vraie participation populaire. » Par ailleurs, ajoute-t-il, « tout au long du ramadan, le jeûne est rompu la nuit et comme le temps est inversé, cela renforce le caractère exceptionnel. »
Mais quel est finalement l’objectif de ces festivités ? La réponse est simple : renforcer les liens familiaux. « Dans toutes les religions, les rites sont importants et sont souvent accompagnés de festivités car cela rapproche les individus et permet la réconciliation », analyse Felice Dassetto. A cette occasion, « la famille se retrouve autour d’un repas spécial et même s’il y a eu des mésententes pendant l’année, elle célèbre ensemble. »
Aider les pauvres : le rôle social du ramadan
Au-delà du rôle de renforcement familial, le ramadan a aussi un rôle social. L’Aïd Al-Fitr est d’ailleurs le moment propice pour s’acquitter de l’aumône, fixé à 7 euros par personne. Chaque responsable de famille doit verser cette somme pour les personnes dont il a la charge. « L’idée est de donner aux pauvres, d’être solidaire et de faire preuve de générosité. Le ramadan a donc aussi vraiment un rôle social, » souligne Felice Dassetto.
Ces rôles sociaux et familiaux du ramadan ont toujours une grande importance actuellement. Mais il est intéressant de noter une autre fonction du ramadan qui s’est globalement perdue avec le temps : la suspension des conflits armés.
A l’origine, explique le professeur émérite, » les conflits armés étaient suspendus pendant tout le ramadan. Cette obligation a été faite pour réconcilier les peuples musulmans dans le cadre de guerres tribales, au sein de communautés restreintes. » Cependant, avec la modernité, les guerres sont devenues « méta-tribales », explique Felice Dassetto, « et puisque ce sont des Etats qui se font la guerre, on est désormais dans une autre logique. » Résultat: « Certains acteurs du monde musulman vont encore tenir un discours de paix pendant le ramadan, similaire à un discours du pape François à Pâques. Mais c’est tout. »
A côté de cela, le ramadan a évidemment une dimension spirituelle. « C’est un croisement des connaissances religieuses, un moment de réflexion sur ce qu’est la foi, où on va nourrir religieusement son esprit, » explique Felice Dassetto.
Ainsi, résume le professeur émérite, le ramadan est donc un « évènement total avec plusieurs dimensions : festive, familiale, sociale et spirituelle. » En plus, insiste-t-il encore, « sa durée de 28 jours en fait vraiment un phénomène extraordinaire ».
Un ramadan plus difficile en Europe ?
Appliquer à la lettre les préceptes du ramadan peut néanmoins s’avérer plus difficile en fonction de l’endroit géographique où l’on se trouve et cela soulève certaines questions. « Dans les sociétés musulmanes d’origine, le jeûne pendant la journée avait une durée plus ou moins égale », explique Felice Dassetto.
« Aujourd’hui, avec les migrations musulmanes vers le nord, en Europe ou au Canada, ça pose des problèmes majeurs. En Suède par exemple, la nuit ne dure que quelques heures l’été. C’est donc plus difficile pour les musulmans de tenir. Faut-il dès lors, dans ces cas-là, continuer à suivre à la lettre ces préceptes ? La question se pose », dit le professeur émérite. « D’autant que le ramadan n’est, à la base, pas du tout une pénitence comme peut l’être le carême chrétien. Il est un effort pour Dieu, mais pas une pénitence. »
« Petite fête » vs. « Grande fête »
Tâchons aussi de distinguer l’Aïd al-Fitr de l’Aïd al-Kebir. La première est la « petite fête » qui marque la fin du ramadan et la seconde est la « grande fête » des musulmans qui se déroule tout juste 50 jours après la première. L’Aïd al-Kebir célèbre l’alliance de Dieu avec les Hommes et est marquée par le sacrifice d’un animal (mouton, chèvre ou poulet en fonction du pays du globe).
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