Esclavage Humain et Exploitation à la Minusca

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Esclavage Humain et Exploitation à la Minusca
Esclavage Humain et Exploitation à la Minusca

Africa-Press – CentrAfricaine.
Au cœur de la MINUSCA prospère un réseau mafieux d’expatriés qui transforment la mission de paix en machine d’exploitation des employés centrafricains.

Depuis plusieurs années, les techniciens journaliers de la MINUSCA travaillent sans contrat formel tout en étant essentiels aux opérations techniques de la mission. Ces hommes et femmes sont payés 5 000 FCFA par jour alors que la grille salariale officielle des Nations Unies prévoit 11 300 FCFA. Cette différence de 6 300 FCFA quotidiens représente un manque à gagner considérable pour des familles.

Pourtant, le Collectif des Techniciens Journaliers de la MINUSCA avait formalisé ses griefs dans une pétition datée du 18 septembre 2023, où il dénonce ce vol salarial. Ce document révèle également une réalité amère: des arriérés de salaire de deux à trois mois qui poussent les familles à l’expulsion de leurs logements, empêchent le paiement des frais de scolarité des enfants et plongent les foyers dans la précarité alimentaire.

L’absence de contrat génère des conséquences dramatiques sur la protection sociale. Un soudeur, victime d’un accident du travail à la base de M’Poko qui lui a coûté une main, a été abandonné à l’hôpital communautaire. La MINUSCA a refusé de prendre en charge ses soins médicaux, invoquant l’absence de contrat de travail. Cette situation montre l’absence totale de couverture sociale pour ces employés: ni sécurité au travail, ni assurance maladie, ni possibilité de recours légal.

Les revendications des journaliers portent sur quatre points principaux: le paiement des arriérés calculés sur la base de 11 300 FCFA par jour, la fixation de dates précises pour les versements de salaires, l’attribution de contrats de travail pour tous les journaliers et le remplacement des responsables de la section ingénierie, notamment M. Boniface. La réponse de la direction a été sans équivoque: les signataires de la pétition ont été licenciés, transformant ainsi une demande légitime en répression pure et simple.

Les journaliers bénéficiant de contrats LICA (Local Individual Contractor Agreements) ne sont pas épargnés par cette exploitation organisée. Notre équipe, dans son investigation, a consulté Les bulletins de paie de certains journaliers contractuels, mais ceux-ci révèlent une manipulation comptable organisée.

Regardez par exemple, ces bulletins de salaires affichent un taux journalier de 36 250 FCFA, mais les travailleurs ne perçoivent que 20 000 FCFA par jour. Pour un bulletin de mai 2021 couvrant 23 jours de travail, le calcul officiel devrait donner 833 750 FCFA (23 x 36 250), mais le travailleur n’a reçu que 460 000 FCFA (23 x 20 000). L’écart de 373 750 FCFA pour un seul mois révèle l’ampleur de ce détournement.

Un autre exemple concerne un bulletin pour 22 jours de travail. Au taux officiel de 36 250 FCFA, le montant dû s’élève à 797 500 FCFA, mais le versement effectif n’a été que de 440 000 FCFA. Cette différence de 357 500 FCFA par mois, multipliée par le nombre de contractuels et les années d’exercice, représente des millions de francs CFA détournés.

Selon les témoignages recueillis, ces sommes considérables alimentent un réseau incluant des superviseurs expatriés et leurs complices centrafricains. Cette organisation parallèle fonctionne avec la complicité passive, voire active, de la hiérarchie de la mission.

Tony Mushimbelé, superviseur d’entrepôt, incarne les dérives comportementales qui gangrènent certains services de la MINUSCA. Les témoignages recueillis l’accusent de favoriser certaines employées, surtout des femmes, en échange de relations intimes, créant des tensions qui ont parfois conduit à des ruptures conjugales.

Son management repose sur l’intimidation et la sanction arbitraire. Il confisque les badges d’accès pour des interactions mineures entre collègues, suspend des travailleurs sans motif valable et instaure un climat de peur qui paralyse l’environnement professionnel. Ces pratiques révèlent une dérive autoritaire qui transforme l’espace de travail en territoire personnel.

Les accusations convergent vers l’existence réelle d’une organisation mafieuse au sein de la MINUSCA, dirigée en partie par des superviseurs identifiés: M. Boniface, Diamanka, Lafleur, Abasse et TK. Ces responsables sont auteurs du détournement de salaires, de gonfler artificiellement les effectifs pour s’approprier les surplus et de réprimer toute tentative de dénonciation.

Aussi, la pétition de septembre 2023 qualifie la gestion de la section ingénierie de « calamiteuse », dénonçant son fonctionnement comme une entreprise privée au service des intérêts personnels de ses dirigeants. Cette organisation parallèle prospère grâce à un vide de responsabilité institutionnelle.

L’unité de conduite et discipline de la MINUSCA, théoriquement chargée de sanctionner les écarts de comportement, s’avère totalement inefficace. Les plaintes déposées disparaissent dans les méandres administratifs sans donner lieu à des sanctions contre les responsables mis en cause. La direction générale de la mission, y compris le Représentant spécial du Secrétaire général, maintient un silence qui équivaut à une validation tacite de ces pratiques mafieuses. C’est un système d’auto-protection, où les expatriés mafieux se protègent entre eux.

Les autorités centrafricaines, soit par corruption soit par intimidation, ferment les yeux sur ces agissements. Cette complicité passive crée un environnement d’impunité totale où les responsables de ces mafias peuvent agir sans crainte de sanctions.

La lettre de recours du 16 décembre 2024, rédigée par le Collectif des Techniciens Intermédiaires sans Contrats, réitère l’ensemble de ces griefs en accusant formellement la MINUSCA de violer les normes de conduite des Nations Unies et le droit international du travail. Ce document établit une comparaison édifiante avec d’autres missions onusiennes au Mali, au Soudan et en République démocratique du Congo, où les travailleurs locaux bénéficient de contrats de travail et de salaires équitables.

Cette différence de traitement révèle que l’exploitation des travailleurs centrafricains résulte d’un choix délibéré plutôt que de contraintes budgétaires ou réglementaires. La MINUSCA reproduit et amplifie les dysfonctionnements de la gouvernance centrafricaine au lieu de servir d’exemple.

Le port de badges de visiteurs par les journaliers constitue à la fois un risque sécuritaire et le symbole de leur marginalisation. Ces employés, pourtant indispensables au fonctionnement de la mission, sont traités comme des personnes extérieures temporaires, sans droits ni protection.

Les promesses de régularisation par l’attribution de contrats à tous les journaliers avant janvier 2023, formulées publiquement par la direction, n’ont jamais été tenues. Cette promesse non respectée révèle soit l’incapacité de la direction à imposer ses décisions, soit l’existence d’une résistance interne organisée aux réformes.

Les témoignages révèlent l’existence d’une résistance structurée aux tentatives de changement. Lors de manifestations contre le vol des salaires, la section financière des Nations Unies a bloqué les paiements, contraignant les superviseurs à financer temporairement les salaires de leur poche pour éviter un audit externe. Cet incident, rapporté fin 2024, démontre que le système de détournement est connu des services financiers centraux et que des mesures de camouflage sont mises en place pour éviter les contrôles.

Les travailleurs subissent des intimidations constantes, avec des employés nationaux qui servent de relais aux superviseurs expatriés pour maintenir la pression sur leurs collègues. Cette utilisation d’intermédiaires centrafricains permet aux responsables expatriés de maintenir une façade de respectabilité tout en exerçant un contrôle total sur leurs équipes….

 

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