Africa-Press – CentrAfricaine. Le basketball centrafricain affronte aujourd’hui la période la plus sombre de son histoire moderne. Cette nation qui a fait vibrer l’Afrique avec ses deux titres continentaux voit désormais son prestige sportif s’est effondré inexorablement, témoignant d’une crise structurelle aux ramifications profondes.
Cette déchéance trouve sa traduction la plus éloquente dans les statistiques officielles. Les chiffres dressent un tableau impitoyable de cette dégringolade: en quatre années seulement, les Fauves ont dégringolé de la 78ème à la 89ème place mondiale selon le classement FIBA, parallèlement à une chute du 10ème au 14ème rang continental. Cette régression contraste dramatiquement avec la dynamique ascendante de nombreuses nations africaines qui investissent massivement dans le développement de leurs programmes basketballistiques.
Cette dégringolade trouve sa traduction la plus cruelle dans les performances récentes sur la scène continentale. L’anatomie de cette débâcle sportive révèle des failles béantes: les éliminatoires de l’AfroBasket 2025 ont révélé l’ampleur du marasme avec des défaites catégoriques face à la Côte d’Ivoire et l’Égypte, une élimination prématurée devant Madagascar. Ces revers ne constituent pas des accidents de parcours mais bien les symptômes d’une maladie profonde qui ronge le basketball centrafricain. L’absence remarquée de l’équipe nationale à l’AfroBasket 2025 en Angola marque une rupture historique, la République centrafricaine n’ayant pas manqué cette échéance depuis plus de deux décennies.
Même lors du FIBA AfroCan 2023, les maigres victoires contre le Tchad et la Guinée équatoriale n’ont pu masquer les défaillances honteuses face au Cameroun et au Gabon, montrant un écart technique grandissant avec les standards continentaux.
Au-delà des résultats sportifs, cette déconfiture trouve ses origines dans des dysfonctionnements bien plus profonds. Les racines du mal s’enracinent dans une crise structurelle multidimensionnelle qui paralyse le développement de la discipline. La Fédération Centrafricaine de Basketball (FCBB) évolue dans un écosystème économique précaire, sa dépendance quasi-exclusive aux subventions étatiques la privant d’autonomie financière et d’attractivité commerciale.
L’infrastructure sportive nationale accuse un retard considérable, avec des équipements vétustes inadaptés aux exigences des compétitions internationales modernes. Cette obsolescence matérielle se double d’une carence dramatique en matière de formation des jeunes talents, faute d’un système d’encadrement structuré et pérenne. Le cadre réglementaire lui-même souffre d’une inadéquation chronique aux réalités contemporaines du sport de haut niveau, freinant toute velléité de modernisation et de professionnalisation.
Cette situation actuelle contraste amèrement avec une époque récente où l’espoir avait ressurgi. L’ère Limbio demeure dans les mémoires comme un âge d’or éphémère: la période 2017-2021, marquée par l’engagement de Guy Maurice Limbio, constitue un sursaut salutaire. Son action multidimensionnelle – régularisation des compétitions, amélioration du soutien logistique, professionnalisation de l’arbitrage et lutte contre les falsifications d’âge – avait redonné crédibilité et dynamisme au basketball centrafricain.
Son retrait en 2021 a précipité la discipline dans une spirale descendante, la ligue de Bangui s’enlisant dans des controverses financières et des allégations de malversations qui compromettent jusqu’à l’achèvement des championnats nationaux.
Dans ce contexte délétère, de nouveaux acteurs ont tenté de redresser la barre. Les tentatives de renaissance menées depuis lors illustrent à la fois la volonté de changement et les limites des moyens disponibles. L’arrivée de Serge Singha à la présidence fédérale en mars 2021 s’est accompagnée d’un projet ambitieux de “Renaissance du Basketball centrafricain”. Plusieurs initiatives méritoires ont vu le jour: modernisation partielle du Palais Omnisports, organisation de stages d’été, programmes de formation arbitrale.
Cependant, ces efforts ponctuels, handicapés par des ressources limitées et un manque de coordination stratégique, n’ont pas suffi à inverser la tendance négative. La sanction de deux années infligée à la RCA dans la discipline du basket 3×3 illustre tragiquement les limites de cette approche fragmentaire.
Cette succession d’échecs pose inexorablement la question de l’avenir. L’horizon s’assombrit dangereusement pour le basketball centrafricain et la discipline semble inexorablement attirée vers un point de non-retour. Sans une refondation complète de sa gouvernance, sans investissements massifs dans la formation des jeunes et la modernisation des infrastructures, le basketball centrafricain court vers un déclin irréversible.
Les élections fédérales programmées pour octobre 2025 revêtent une importance capitale. Elles offriront aux acteurs du basketball national l’opportunité de choisir entre la perpétuation d’un statu quo mortifère et l’engagement résolu dans une transformation radicale.
Le basketball centrafricain se trouve aujourd’hui à la croisée des chemins. L’heure du sursaut a peut-être sonné pour cette discipline qui fut jadis l’emblème du rayonnement sportif national mais qui s’étiole désormais sous le poids des querelles intestines et de l’amateurisme gestionnaire. La question n’est plus de savoir si la République centrafricaine peut retrouver son lustre d’antan, mais bien de déterminer si elle saura éviter l’effacement définitif d’un pan entier de son patrimoine sportif. L’urgence est absolue, les enjeux considérables: il s’agit ni plus ni moins de sauver l’âme du basketball centrafricain.
Source: Corbeau News Centrafrique
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