Africa-Press – CentrAfricaine.
L’homme d’affaires Mahamat Djamil Babanani, détenu illégalement à l’OCRB depuis deux semaines, est devenu le symbole d’un système de vol et de braquage organisé par les autorités sécuritaires du pays, notamment Bienvenu Zokoué et Armel Baraba.
En effet, Mahamat Djamil Babanani possède tout ce qu’il faut pour réussir en Centrafrique. Sa société Nani-Trans dispose de toutes les autorisations légales, dont la rédaction du CNC a pu obtenu copies: licence de transport, agrément d’import-export, autorisation d’importation de sucre avec un entrepôt de 10 000 tonnes. Ses papiers fiscaux sont en règle, son capital social déclaré à 5 millions de FCFA. Un homme d’affaires qui respecte scrupuleusement la loi.
Malheureusement, en Centrafrique, aujourd’hui, une telle probité ne protège plus de rien, bien au contraire. Désormais, la prospérité attire plus d’attention des prédateurs en uniformes. Et les chefs de ces criminels ne sont que le directeur général de la Police, monsieur Bienvenu Zokoué, et son collègues Armel Baraba, directeur de l’OCRB.
Et ce système de braquage institutionnel frappe tout le monde, et l’homme d’affaire Mahamat Djamil Babanani y fait partie désormais. Ainsi, la première attaque contre ce dernier remonte au 27 octobre 2023. Ce jour-là, vers 8h30, sa vie bascule. Des véhicules de l’OCRB s’arrêtent devant sa maison au Km5. Les hommes d’Armel Baraba descendent, accompagnés de mercenaires russes. Pas de mandat de perquisition, pas d’ordre du procureur. Juste la force brute.
L’opération commence comme une perquisition, mais dérape rapidement. Les braqueurs policiers et les mercenaires russes fouillent partout, retournent les meubles, vandalisent les pièces. Ils aspergent des produits chimiques dans la maison, une odeur qui persiste encore selon l’huissier de justice.
Le butin de ce braquage dépasse l’imagination: 5 840 000 FCFA en liquide disparaissent dans leurs poches. Ils emportent le passeport de Babanani, ses cartes bancaires BSIC et UBAC Cameroun, sa carte Dream Miles, tous ses papiers d’identité, son permis de conduire, sa carte d’électeur, sa carte de séjour camerounaise. Les objets de valeur suivent: ordinateurs Acer et MacBook Pro, montres Hublot et Tommy Hilfiger, iPhone 13 Pro Max, Samsung, bague en or.
Un inventaire qui ressemble plus à celui d’un cambriolage qu’à une saisie judiciaire. D’ailleurs, aucun procès-verbal de saisie n’accompagne cette razzia.
Souvenez-vous: en 2023, après ce braquage organisé par les mercenaires russes et les policiers de l’OCRB, nous avions publié un article détaillé sur cette affaire. L’histoire ne s’arrête pas là malheureusement. Aujourd’hui, les mêmes voyous récidivent avec encore plus d’audace.
Face à cette agression, l’avocat de la victime réagit dans les règles. Maître Albert Panda Gbianimbi dépose une plainte circonstanciée le 30 octobre 2023 auprès du procureur Foukpio. Le document de trois pages recense minutieusement tous les biens volés, accompagné d’un procès-verbal d’huissier et d’une vidéo des dégâts.
Cette plainte va s’évaporer. Purement et simplement. Les archives judiciaires ne conservent aucune trace de ce dossier gênant. Une disparition qui en dit long sur le fonctionnement de la justice centrafricaine.
Babanani comprend le message: se taire et accepter le vol de son argent. Mais l’homme d’affaires refuse de baisser les bras. Il consulte ses avocats, cherche des recours légaux. Cette résistance va lui coûter cher.
L’étau se resserre autour de l’entrepreneur récalcitrant. En août 2025, il décide de voyager à Douala pour ses affaires. Direction l’aéroport de Bangui. Le directeur général de la police Bienvenu Zokoué et le directeur de l’OCRB Armel Baraba l’attendent. Pas de mandat d’arrêt, pas d’accusations précises. Une interpellation musclée, point final.
Depuis, Babanani croupit dans les geôles de l’OCRB. Deux semaines de détention illégale sans motif légal. Sa famille s’inquiète, ses avocats protestent, mais rien n’y fait.
Cette méthode d’intimidation s’inscrit dans un système parfaitement organisé. L’affaire Babanani montre un racket d’État qui fonctionne comme une entreprise criminelle bien organisée. Au Km5, dans ce quartier commerçant du 3ème arrondissement, une cellule informelle collecte les informations. Qui a de l’argent? Qui voyage souvent? Qui possède des biens de valeur? Les renseignements remontent vers Bienvenu Zokoué, et Armel Baraba et leurs complices russes.
Le mode opératoire reste identique: perquisition sans mandat, vol organisé, intimidation, puis arrestation si la victime proteste. Un racket d’État parfaitement huilé.
Les bénéfices de cette entreprise criminelle enrichissent rapidement les protagonistes. Prenant l’exemple du braqueur Bienvenu Zokoué, simple directeur général de police, avec seulement 400 000 francs CFA de salaire par mois, fait construire plusieurs immeubles simultanément dans la capitale. Jamais un fonctionnaire de ce rang n’avait affiché un tel enrichissement dans l’histoire du pays. Les sources de financement restent mystérieuses. Et tout le monde le sait: le vol.
Armel Baraba profite également du système. Son train de vie dépasse largement ses revenus officiels. Ces enrichissements suspects ne gênent personne au sommet de l’État.
Même la justice semble découvrir l’ampleur du problème. Le nouveau procureur de la République, arrivé récemment, découvre ces pratiques. Il tente de convoquer Armel Baraba sur cette affaire, mais il devient rapidement impuissant face à la puissance de ces criminels d’État.
Au sommet de l’État également, le silence présidentiel encourage ces dérives. Faustin-Archange Touadéra reste muet face au sort des hommes d’affaires centrafricains, pourtant, il est le premier à se plaindre du mauvais climat d’affaire du pays. Son indifférence encourage ces pratiques mafieuses.
Selon nos sources, Touadéra ne réagit que lorsque son pouvoir personnel est menacé. Pour le reste, chacun fait son business. Police, gendarmerie, militaires, tous développent leurs petites affaires aux dépens des citoyens.
Cette passivité présidentielle transforme le pays en zone de non-droit. L’opposition dénonce un État fantôme où plus personne ne gouverne vraiment.
Les conséquences dépassent le simple cas Babanani. L’économie centrafricaine paie le prix fort de cette prédation institutionnalisée. D’autres entrepreneurs subissent le même sort. Le cas de l’entrepreneur malien Traoré, de l’homme d’affaire Dobo Abdel Karim qui sont actuellement en détention depuis plus de 4 ans est aussi un exemple parfait de cette dérive. Centrafricains ou étrangers, tous peuvent devenir des proies. Investir devient un parcours du combattant face à cette agression permanente.
Le climat des affaires s’effondre. Les investisseurs fuient, les entrepreneurs ferment boutique ou s’exilent. Cette razzia organisée détruit méthodiquement l’économie centrafricaine.
La confiance dans l’État disparaît. Quand les forces censées protéger les citoyens deviennent leurs bourreaux, l’effondrement devient inévitable.
Aujourd’hui, Babanani incarne tous les entrepreneurs victimes de ce système prédateur. Sa détention illégale à l’OCRB rappelle que plus personne n’est à l’abri en Centrafrique. Tant qu’il restera derrière les barreaux, tant que ses biens resteront confisqués, son cas servira de baromètre. Un baromètre qui mesure la décomposition d’un État devenu voyou.
L’histoire de Babanani raconte celle d’un pays à la dérive, où les uniformes cachent des bandits et où la loi ne protège plus personne. Une réalité centrafricaine qui se répète chaque jour dans l’indifférence générale.
Source: Corbeau News Centrafrique
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