Réforme des Finances Publiques en Centrafrique 2025-2027

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Réforme des Finances Publiques en Centrafrique 2025-2027
Réforme des Finances Publiques en Centrafrique 2025-2027

Africa-Press – CentrAfricaine. En Centrafrique, où corruption et détournements structurent la gouvernance depuis des années, le nouveau plan Finances peut-il réellement produire un changement durable?

Présenté officiellement à Bangui par le ministre des finances Hervé Ndoba, le Plan Finances Publiques RCA 2025 – 2027 vise à moderniser la gestion budgétaire du pays. Huit axes stratégiques ont été annoncés par le ministre des Finances, Hervé Ndoba, allant de la mobilisation des recettes à la digitalisation du système de dépenses publiques. Doté d’un financement initial de 21,4 millions d’euros, le programme entend marquer une rupture avec la gestion opaque des fonds publics.

Mais cette volonté affichée entre en contradiction avec neuf années d’impunité généralisée. Aucun ministre du gouvernement, aucun cadre de l’État, y compris certains fonctionnaires n’ont été poursuivi pour détournement, alors que les témoignages d’enrichissement illicite, du détournement massif, , de fausses facturations et de caisses parallèles s’accumulent. L’administration publique centrafricaine est minée par un système informel de prédation, où les fonctions sont utilisées à des fins personnelles, sans mécanisme de contrôle réel.

Depuis des années, la chaîne de la dépense en République centrafricaine est régulièrement contournée. Des avances non justifiées, des missions fictives, des marchés publics attribués sans appel d’offres et des doubles paiements sont signalés, sans qu’aucune mesure disciplinaire ne suive. Dans plusieurs ministères, les responsables de la comptabilité générale ont signalé des irrégularités graves, restées sans suite. Ces pratiques sont rendues possibles par l’absence de contrôle indépendant et l’instrumentalisation des institutions de vérification.

Le ministre Hervé Ndoba évoque une boussole pour orienter les finances publiques. Mais une boussole sans gouvernance équitable, sans justice ni sanctions, reste un simple objet symbolique. Dans un tel contexte, la transparence budgétaire ne peut pas reposer uniquement sur des outils numériques.

Au Rwanda par exemple, les réformes engagées dans la gestion budgétaire s’appuient sur des fondements solides: tolérance zéro face à la corruption, inspections permanentes et sanctions systématiques. Le système IFMIS (Integrated Financial Management Information System) est utilisé pour tracer toutes les dépenses en temps réel. En 2022, plusieurs hauts fonctionnaires ont été arrêtés pour mauvaise gestion. Ce climat de responsabilité renforce la crédibilité de toute réforme budgétaire.

Au Sénégal, la plateforme SUNU Budget permet aux citoyens de suivre l’exécution des dépenses publiques. Les rapports d’audit sont accessibles en ligne, et des organisations de la société civile participent activement au suivi. Bien que la justice sénégalaise reste parfois critiquée pour son inégalité de traitement, des ministres ont été interrogés publiquement et certains dossiers sensibles ont été ouverts.

Ces pays montrent que la technologie seule ne suffit pas. La réforme n’est crédible que si elle s’accompagne d’une volonté politique ferme, de mécanismes de contrôle indépendants, et surtout de sanctions effectives contre les gestionnaires fautifs.

Dans un pays où l’impunité est devenue norme de gestion, chaque réforme annoncée suscite la méfiance. Le système actuel fonctionne comme une économie parallèle intégrée à l’État: les fonctions publiques sont détournées, les postes achetés ou attribués en échange de loyauté politique, et les ressources détournées sans poursuite. Ce mode de gouvernance ne relève plus seulement d’un dysfonctionnement administratif mais constitue un système de prédation institutionnalisé.

Tant que les institutions de contrôle ne sont ni autonomes ni appliquées, tant qu’aucune sanction n’est prise contre les auteurs de malversations identifiés, aucun plan – aussi technique ou soutenu par des bailleurs – ne pourra inverser la tendance. La transparence ne peut pas cohabiter avec l’impunité.

Soumis à une crise de gouvernance profonde, le Plan Finances Publiques 2025-2027 peut-il être autre chose qu’un document de communication destiné aux partenaires extérieurs? À quelles conditions la République centrafricaine pourrait-elle enfin rompre avec un système budgétaire fondé sur le vol organisé…?

Source: Corbeau News Centrafrique

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