Africa-Press – CentrAfricaine. Un mois s’est écoulé depuis l’expulsion des jeunes couturiers-stylistes de l’ACFPE. Leurs machines à coudre et tous leurs outils de travail sont toujours enfermés dans les locaux de l’agence. Personne ne les a appelés. Personne ne leur a proposé de discuter. Et pendant ce temps, ces jeunes qui ont des familles à nourrir errent dans les quartiers de Bangui sans travail, sans revenus, sans perspectives.
La ministre du Travail, Annie Michelle Mouanga, née Gambor, n’a montré aucune volonté de régler le problème. Elle les a chassés le 12 septembre 2025 en faisant intervenir la gendarmerie. Depuis, elle les ignore complètement. Comme si ces jeunes n’existaient plus. Comme si leurs trois ans et quatre mois de formation ne comptaient pour rien.
Rappelons comment tout a commencé. En mai 2022, le ministère a lancé un appel à la radio pour une formation avec une styliste ivoirienne. Beaucoup de jeunes ont répondu. La formation a démarré le 16 mai. Après une semaine, ils pensaient rentrer chez eux. Mais la ministre les a retenus pour préparer un défilé de mode.
Ce défilé a eu lieu le 21 juin 2022 à l’hôtel Oubangui. Brigitte Touadéra, la Première dame, était présente. Plusieurs membres du gouvernement aussi. Le lendemain, les couturiers ont reçu des certificats à l’hôtel Ledger. Et là encore, la ministre les a empêchés de partir.
Elle parlait de financements venant de la Banque mondiale, du PAM, de l’UNICEF, de l’UNFPA et de la BAD. Elle promettait la création d’une coopérative après trois années de formation. Ces promesses n’ont jamais été tenues.
Pendant trois ans et quatre mois, ces jeunes sont restés à l’ACFPE. Ils ont eu deux marchés en tout. Le principal concernait les uniformes de l’école du président Touadéra à Damara. Mais même là, la ministre décidait seule du prix. Elle leur donnait des forfaits. Ils n’avaient pas leur mot à dire. Tout l’argent des financements internationaux passait par la coordinatrice camerounaise, Mme Ouahm-Diane, proche de la ministre.
En août 2025, la ministre a soudainement décidé de les expulser. Elle leur a envoyé une note leur donnant une semaine pour quitter les lieux. Pourquoi cette expulsion brutale? Parce qu’elle veut installer un restaurant dans les locaux de l’ACFPE. Un restaurant obligatoire pour les employés, dont les salaires seront automatiquement amputés pour payer les repas. Le même système qu’elle a déjà imposé à la CNSS.
Les couturiers ont demandé à rencontrer la ministre pour comprendre. Le 10 septembre, ils se sont présentés à son bureau. Elle s’est mise à hurler: “Sortez de mon bureau ! Sortez de mon bureau !”. Elle criait si fort qu’on l’entendait dans tout le bâtiment.
Elle leur disait: “Qui vous a embauchés ici? Vous avez quel contrat? Sortez d’ici !”. C’est pourtant elle qui les avait fait venir en 2022 et retenus pendant trois ans. Legrand Youkoumande, l’un des couturiers expulsés, a raconté cette scène dans une interview accordée à Corbo News Centrafrique.
Après que la ministre les ait chassés de son bureau, son chargé de mission, M. Aristide Ganabo, est sorti derrière eux. Il leur a reproché d’avoir envoyé leur recours aux médias et aux ambassades. “Vous êtes malades ou quoi? Comment vous pouvez mettre les médias dans vos documents?”.
Puis il a ajouté que c’était uniquement par “la bonne volonté” de la ministre qu’ils étaient restés trois ans. “Vous devez remercier la ministre. Sans elle, vous ne seriez pas là. Elle vous a donné des marchés, vous devez lui dire merci.”
Les couturiers ont répondu qu’ils ne voulaient pas être des assistés, mais des professionnels accompagnés dans leurs projets. Mais Ganabo insistait que tout venait de la ministre et qu’ils n’avaient aucun droit de discuter.
Deux jours plus tard, le vendredi 12 septembre, la ministre a fait venir la gendarmerie. Les couturiers ont été expulsés. Leurs machines, leurs outils, tout leur matériel de travail est resté sur place. Tout a été fermé à clé.
Depuis ce jour, rien n’a bougé. Ces jeunes se sont retrouvés dans les quartiers sans rien. Pas de machines pour travailler. Pas de revenus pour nourrir leurs familles. Et personne ne les appelle pour trouver une solution.
La ministre continue son business. Elle a nommé sa sœur cadette, Renée Michèle Bimbo, directrice générale de l’ACFPE. Elle place ses parents partout dans l’institution. Elle installe son restaurant. Et elle oublie ces jeunes qu’elle a utilisés pendant plus de trois ans.
Annie Michelle Mouanga se glorifie d’être parente à Tina Touadéra. Elle pense que cette connexion familiale la protège. Elle pense qu’elle peut maltraiter les jeunes sans conséquence. Elle pense que le pouvoir durera toujours.
Mais le pouvoir finit toujours. Ces jeunes qu’elle a chassés ne vont pas tous disparaître. Ils vont rester. Ils vont se souvenir. Ils vont raconter à leurs enfants comment une ministre les a utilisés pendant trois ans, puis les a jetés comme des malpropres quand elle n’avait plus besoin d’eux.
Cette femme est mère de famille. Elle devrait comprendre ce que vivent ces jeunes. Elle devrait savoir ce que c’est que de ne pas pouvoir nourrir sa famille. Mais elle s’en fiche. Elle ne pense qu’à son argent, à son restaurant, à placer ses proches.
Le président Touadéra parle tout le temps de la jeunesse. Il dit que c’est sa priorité. Mais que fait-il quand sa ministre chasse des jeunes couturiers pour installer un restaurant? Rien. Il regarde et il laisse faire.
Ces jeunes ont investi trois ans et quatre mois de leur vie dans cette formation. Ils ont participé à des défilés en présence de la Première dame. Ils ont fabriqué des uniformes pour l’école présidentielle à Damara. Et maintenant, on les jette.
Leurs machines sont enfermées quelque part dans l’ACFPE. Ils ne peuvent pas les récupérer. Ils ne peuvent pas travailler. Ils ne peuvent pas gagner leur vie. Et personne ne les appelle.
Un mois déjà. Trente jours sans revenus. Trente jours à expliquer à leurs familles pourquoi il n’y a rien à manger. Trente jours à se demander ce qu’ils vont devenir.
La ministre Annie Michelle Mouanga doit débloquer cette situation. Elle doit appeler ces jeunes. Elle doit leur rendre leurs machines. Elle doit leur permettre de travailler. Si elle refuse, le président doit intervenir.
Si rien ne bouge, on saura que tous les discours sur la jeunesse ne sont que des paroles vides. Que les promesses ne valent rien. Que les jeunes Centrafricains ne comptent pas.
Source: Corbeau News Centrafrique
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