Africa-Press – CentrAfricaine. Le débat sur l’éligibilité d’Anicet Georges Dologuélé à l’élection présidentielle de décembre prochain prend une tournure juridique. Au cœur de la polémique, la détention par l’ancien Premier ministre d’un passeport français depuis 1994, alors même que la Constitution centrafricaine interdit formellement la double nationalité.
L’article 10 de la Constitution de 2023 dispose que « la nationalité centrafricaine est une et exclusive ». De plus, le Code de la nationalité de 1961 précise que tout citoyen ayant acquis volontairement une nationalité étrangère perd automatiquement sa nationalité centrafricaine, art. 46 et 48.
En d’autres termes, si Dologuélé a bien obtenu la nationalité française en 1994, il aurait perdu à cette date son statut de Centrafricain jusqu’à une éventuelle réintégration par décret, un point qui reste à éclaircir.
Si la perte de nationalité avait été effective dès 1994, toutes les fonctions exercées par Dologuélé par la suite, ministre, Premier ministre, député, auraient été juridiquement incompatibles avec son statut.
En droit, cela pourrait relever d’infractions pénales précises. L’Usurpation de fonctions publiques art. 408 du Code pénal) ; faux et usage de faux documents administratifs (art. 355 à 359).
Une situation qui, selon certains juristes, dépasse la simple question d’éligibilité et pourrait, si elle était confirmée, être qualifiée de violations pénales. Dologuélé a lui-même reconnu avoir renoncé à sa nationalité française en 2025 pour se conformer aux règles en vigueur. Cet acte, destiné à régulariser sa candidature, est interprété par ses détracteurs comme un aveu implicite d’incompatibilité passée.
Trois contre-arguments circulent déjà dans les cercles politiques et juridiques. Le Code de 1961 aurait été peu appliqué, tolérant de facto la double nationalité; la Constitution actuelle serait contestée, donc ses prescriptions discutables ; d’autres personnalités politiques auraient violé la règle sans conséquences.
Mais, rappellent les juristes, l’inapplication d’une loi ne l’abroge pas. Tant que la Constitution et le Code sont en vigueur, leurs prescriptions s’imposent à tous.
La question dépasse le cas Dologuélé et touche à la crédibilité des institutions. Plusieurs observateurs appellent à vérifier officiellement les dates d’acquisition et de renonciation à la nationalité française, ainsi que l’existence d’un décret de réintégration en RCA; publier les résultats de cette enquête administrative ; tirer les conséquences juridiques en cas de confirmation d’irrégularités.
À moins de trois mois de la présidentielle, ce dossier sensible met en lumière un enjeu central, la primauté de la loi dans un État de droit. Pour de nombreux citoyens, la question n’est pas seulement de savoir si Dologuélé peut se présenter en 2025, mais si les institutions centrafricaines sont prêtes à appliquer leurs propres règles de manière impartiale.
Source: Ndjoni Sango
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