Africa-Press – Comores. Devant Emmanuel Macron, le président comorien Azali Assoumani a revendiqué avec force la souveraineté de son pays sur Mayotte, dénonçant les manœuvres françaises pour intégrer l’île au sein de la COI comme entité indépendante. Un discours salué par ses pairs, à rebours du silence du président malgache sur les Îles Éparses.
Un discours qui fera date. Lors du Ve sommet de la Commission de l’océan indien tenu à Antananarivo jeudi 24 avril, c’est le discours d’Azali Assuomani qui semble avoir retenu l’attention parmi ses homologues des pays de l’Océan indien et pour cause. Alors que la France fait des pieds et des mains pour intégrer Mayotte, la quatrième île de l’Union des Comores, en tant qu’entité indépendante au sein de la COI, le locataire de Beit-Salam s’est encore une fois armé du droit international pour répondre sans détour au président français Emmanuel Macron, présent au Sommet.
« Puisque nous parlons de droit, je tiens également à rappeler que l’ADN de la COI c’est le respect du droit international. Ainsi, en vertu du droit international, l’île de Mayotte est une île comorienne. Nos pays en sont les témoins et à plus forte raison, la France qui est membre permanent du Conseil de sécurité des Nations Unies », devait rappeler un Azali Assoumani droit dans ses bottes, lui qui accuse la France de « provocations ». À noter que son homologue malgache, Andry Rajoelina, n’a, lui, pas évoqué la question des Îles Éparses, préférant éluder le sujet 24h après la visite d’État d’Emmanuel Macron, laquelle est assortie de plusieurs accords bilatéraux.
Depuis 2019, la France demande à ce que Mayotte puisse bénéficier des programmes et projets de la COI, mais elle n’a jamais demandé aussi clairement son intégration au sein de la Commission. Ce qui explique les réactions musclées aussi bien de la diplomatie que de la présidence comoriennes. Interrogé par nos soins, le conseiller diplomatique d’Azali Assoumani et ancien secrétaire général de la COI, Hamada Madi Boléro, trouve « naturelle » la fermeté d’Azali Assoumani face aux velléités de Paris. « Qu’un président des Comores tienne ces propos après ceux de Bruno Retailleau, Manuel Valls et du président Emmanuel Macron lui-même ces derniers temps, ça ne pouvait pas passer inaperçu lorsque nos États de l’océan indien clament poursuivre ensemble l’aventure indianoceanique dans la solidarité et le respect du droit », a-t-il soutenu. La France multiplie en effet ces derniers mois les déclarations visant à renforcer sa présence à Mayotte.
Lors des travaux préliminaires en amont du Sommet, la partie française a essuyé les revers. Elle a tenté d’inscrire la question de l’intégration de Mayotte à l’ordre du jour, mais l’Union des Comores s’y est fermement opposée. Il faut dire que c’est à la surprise générale que la France a adopté la déclaration finale du Sommet, vu que ses amendements n’ont pas été pris en compte. « Si la France s’était abstenue, ça aurait été d’abord un échec pour le pays hôte, Madagascar. Un échec aussi pour la COI qui aura étalé au grand jour ses contradictions internes », observe un agent diplomatique comorien basé à Antananarivo. Et comme les décisions de la COI sont prises par consensus des États membres, le refus des Comores fait que la question n’a jamais été discutée.
Depuis le Sommet de Moroni en 2014, Paris pousse pour une redéfinition de la COI en « organisation des îles du Sud-Ouest de l’océan Indien », une formulation qui viserait à intégrer pleinement Mayotte sans en reconnaître l’appartenance comorienne. Une ligne que Moroni refuse catégoriquement. Mayotte n’a donc pas été inscrite à l’ordre du jour, mais c’est elle qui a occupé tous les esprits. Si la France espérait une adhésion en douce, elle est surtout repartie avec une leçon de droit… et un rappel à la réalité signé Azali Assoumani. Protocolaire, mais ferme. Diplomatique, mais cinglant. Comme un coup de tampon refusé au guichet de l’histoire: Mayotte est comorienne et le restera à jamais.
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