Transplantation Fécale: Pratique Risquée pour la Santé

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Transplantation Fécale: Pratique Risquée pour la Santé
Transplantation Fécale: Pratique Risquée pour la Santé

Africa-Press – Comores. La transplantation de microbiote fécal (TMF) consiste à transférer le microbiote fécal (des selles) d’un donneur sain vers le tube digestif d’un receveur malade. Selon les patients, elle est administrée par voie haute (gélules, sonde naso-gastrique) ou voie basse (coloscopie, lavement). “La TMF est utilisée pour traiter les formes multirécidivantes d’infection à Clostridium difficile, quand il n’y a aucune autre alternative”, explique à Sciences et Avenir Harry Sokol, gastroentérologue à l’hôpital St Antoine (APHP-Sorbonne Université) et coordinateur du centre de transplantation fécale de l’AP-HP. Et les résultats sont au rendez-vous: la guérison survient en 72 heures dans la majorité des cas.

Mais des chercheurs des universités de Chicago et de Hong Kong suggèrent que la TMF pourrait comporter des risques. Dans une étude publiée dans la revue Cell le 6 juin 2025, ils montrent que des bactéries du côlon se retrouvent dans d’autres portions de l’intestin suite à la TMF.

Des bactéries au mauvais endroit

Dans le cadre de l’étude, l’équipe a mené une série d’expériences sur des souris. Un premier groupe a reçu une greffe de micro-organismes provenant du jéjunum, la première partie de l’intestin grêle. D’autres souris ont quant à elles reçues une greffe provenant du cæcum, la section reliant l’intestin grêle au gros intestin.

Résultats: les bactéries issues des transplantations colonisent l’intégralité du tube digestif des souris, pas seulement la portion dont elles proviennent. De plus, les bactéries transférées peuvent modifier l’expression des gènes et des protéines dans la paroi intestinale, de manière à se rapprocher davantage des niveaux d’expression observés dans leur région d’origine. Par conséquent, les bactéries anaérobies du côlon sont capables de modifier leur environnement, l’intestin grêle des souris, pour mieux le peupler.

L’équipe de recherche a également observé des différences dans les comportements alimentaires, l’activité et la dépense énergétique des souris après transplantation. Or, l’étude a aussi montré que des bactéries anaérobies étaient présentes en dehors du côlon chez des patients humains. De quoi affirmer que la transplantation de microbiote fécal est une thérapie risquée?

Des résultats peu alarmants

Tous ces résultats sont à nuancer. Tout d’abord, l’influence du microbiote intestinal sur le comportement et la santé globale de l’individu était déjà bien connue avant cette étude. Ensuite, la méthodologie employée présente plusieurs limites: “La partie humaine de cette étude est extrêmement limitée, commente Harry Sokol. L’essentiel des résultats provient de souris axéniques, c’est-à-dire sans microbiote, ce qui est à des années-lumière de la réalité.” En effet, dans la partie menée sur des patients humains, la présence de bactéries anaérobies dans l’intestin grêle n’a été relevée qu’à un seul moment, quatre semaines après la TMF. “Cette augmentation est tout à fait attendue, d’autant plus qu’elle est modérée et très variable d’un individu à l’autre”, complète le chercheur.

Par ailleurs, le recours à la transplantation de microbiote fécale est pris au sérieux par les professionnels de santé. “Les TMF sont très surveillées, insiste Harry Sokol. Les critères de dépistage des donneurs sont stricts” De plus, les potentiels effets secondaires de la TMF sur la santé sont étudiés. En France, la cohorte de sécurité COSMIC, constituée de centaines de personnes, à la fois des donneurs et des receveurs de selles, permet d’avoir un suivi des patients. “Aucun cas de maladie hors de l’intestin suite à une TMF n’a été rapporté à ce jour.”

“L’étude rappelle que la TMF n’est pas un traitement anodin mais ne la remet absolument pas en cause”, conclut Harry Sokol. Si les mécanismes restent encore partiellement compris, la TMF est très efficace pour traiter certaines infections intestinales. Il s’agit d’une solution thérapeutique majeure en attendant le développement de traitements microbiens plus standardisés comme les probiotiques de nouvelle génération.

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