Africa-Press – Congo Brazzaville. Trente-quatre ans après la fin de la Conférence nationale souveraine, nombreux sont les acteurs politiques et de la société civile qui déplorent l’absence d’une instance appropriée habilitée au suivi des actes issus de cette grande assemblée.
Le vent de la perestroïka qui a bouleversé la plupart des États de l’Union Soviétique n’a pas épargné les pays africains, dont beaucoup ont organisé dans la foulée des conférences nationales, avec pour objectif le passage des régimes politiques socialistes au régime démocratique.
C’est dans ce contexte que le président de la République Denis Sassou N’Guesso a convoqué la tenue de la Conférence nationale dite souveraine le 25 février 1991. Cette grand-messe a réuni plus de 1 200 délégués de toutes obédiences venus scruter de fond en comble l’état de la nation. Cependant, trente-quatre ans après ces assises, il convient de s’interroger sur ce qu’il reste de ces actes. Qu’a-t-on fait des acquis de la Conférence?
Le Congo, qui ne pouvait se soustraire à cette exigence démocratique, n’a pas su capitaliser les retombées de cette Conférence nationale qui a pourtant constitué, selon une frange de politiciens, un moment historique marquant le passage du monopartisme au régime démocratique.
Trente-quatre ans après, les acteurs politiques devraient opérer un retour critique en revisitant minutieusement toutes les résolutions de la Conférence nationale souveraine, qui demeurent d’actualité en termes de diagnostic.
La Conférence nationale souveraine avait apporté une lueur d’espoir concernant les droits politiques, la démocratisation du pays et la construction de l’État de droit. Cet espoir suscité par les assises s’est progressivement étiolé, étouffé par des dirigeants politiques qui n’ont pas su préserver les acquis de cette rencontre historique.
À travers ses actes, la Conférence nationale souveraine avait pourtant posé les jalons d’un fonctionnement efficient du pays sur le plan économique, de la gouvernance électorale et bien d’autres aspects. « La Conférence nationale souveraine a milité pour que l’on mette fin aux crimes et scandales économiques, mais jusqu’à présent c’est encore le statu quo: opacité dans la gestion pétrolière et des ressources naturelles. Il y a également la dette qui constitue un obstacle et compromet l’avenir des générations futures », indique le président du Parti social-démocrate congolais, Clément Mierassa (PSDC). « Ce qui subsiste de cette Conférence nationale souveraine: un pluralisme balbutiant, un recul drastique en termes de droits humains», fait-il observé.
La Conférence nationale a ressemblé à un tribunal où un seul homme a été placé au banc des accusés, le Président Denis Sassou N’Guesso, littéralement lâché par plusieurs de ses compagnons, ne demeurant autour de lui que quelques rares fidèles de sa famille politique.
Certains cadres du Parti congolais du travail estiment pour leur part qu’ils étaient face à un complot politique visant la destruction du pays et ciblant le président Denis Sassou N’Guesso. Au lieu de mettre l’accent sur le développement du pays et la recherche de voies et moyens pour relancer l’activité économique, reconstruire les infrastructures scolaires et sanitaires, « nous avons plutôt assisté à une partie de chasse à l’homme envers le président et ses compagnons. Ceux qui avaient choisi de rester avec le président contre vents et marées l’ont fait par conviction, détermination, honnêteté et engagement politique », ajoutent-ils.
Pour les cadres du PCT, le plus grand acquis de la Conférence nationale souveraine réside dans le fait que le président Denis Sassou N’Guesso avait accepté d’assumer toutes les accusations portées contre lui.
Le mouvement syndical, dont la contribution a été essentielle pour la tenue de la Conférence nationale souveraine, s’est trouvé affaibli et gangrené par des querelles et divisions intestines. Force est de constater qu’il n’est aujourd’hui que l’ombre de lui-même. Ce qui a été réalisé par les syndicalistes est loin de satisfaire les attentes des citoyens. Cette situation découle notamment de la prolifération des plateformes syndicales après la Conférence nationale souveraine, qui a dilué l’action syndicale au Congo.
Cette grand-messe républicaine, qui a duré cent cinq jours, a permis aux délégués de passer au crible la situation de la nation pour aboutir à des actes dont l’appropriation défaillante a hanté au quotidien la conscience collective. Ces failles ont contribué à plonger le pays, six ans plus tard, dans un conflit civil.
Aujourd’hui, le bilan de cette Conférence nationale souveraine demeure contrasté, oscillant entre espoirs déçus et acquis préservés, témoignant de la complexité de toute transition démocratique.
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