Africa-Press – Congo Kinshasa. Alors que l’accord de paix signé à Doha entre le gouvernement congolais et les rebelles de l’AFC-M23 se voulait une étape décisive vers la fin du calvaire dans l’Est de la République démocratique du Congo, les espoirs de paix s’effritent à mesure que les massacres se poursuivent sur le terrain.
Plus de 300 civils ont été tués en juillet 2025 dans le territoire de Rutshuru, au Nord-Kivu, en dépit du cessez-le-feu convenu. Face à cette tragédie, Kinshasa, fidèle à sa posture diplomatique, « condamne fermement », un réflexe devenu mécanique et presque désincarné dans un contexte où les populations meurent chaque jour dans l’indifférence générale.
Alors que le Rwanda et sa milice supplétive du M23-AFC continuent d’afficher une attitude ouvertement belliqueuse, une question fondamentale s’impose: le Gouvernement congolais doit-il se contenter de dénoncer ou enfin repenser sa stratégie? Entre accords non respectés, processus de paix illusoire et souffrance ininterrompue des civils, l’heure n’est-elle pas venue de sortir du cycle des condamnations rituelles pour une action plus ferme, plus cohérente, et surtout, plus souveraine?
Malgré les multiples efforts diplomatiques engagés pour ramener la paix dans l’Est de la République démocratique du Congo, la réalité du terrain démontre, une fois de plus, que les actes contredisent les paroles. En juillet 2025, plus de 300 civils ont été massacrés dans plusieurs localités du territoire de Rutshuru, dans la province du Nord-Kivu, par les rebelles du M23, selon un communiqué officiel du gouvernement congolais daté du 7 août 2025.
Une situation qui relance le débat sur l’efficacité des accords de paix signés récemment, notamment ceux de Doha et de Washington, mais aussi sur la posture adoptée par Kinshasa face à des groupes armés qui, au fil des années, se montrent toujours plus déterminés à défier l’autorité de l’État.
« En dépit de l’accord de paix signé à Doha entre l’AFC-M23 et le gouvernement congolais, toutefois cet accord s’écarte des engagements pris pour le retour de la paix dans l’Est du pays. En effet, le M23 a massacré plus de 300 civils au mois de juillet. Kinshasa reste dans son style de condamnation. Un concept qui devient une redondance au moment où la population congolaise est tuée presque chaque jour par les rebelles. Faut-il changer de concept ou maintenir « condamner »? Ce dernier est devenu inefficace, cela ressemble au ton de la communauté internationale. »
Le gouvernement condamne
Dans son communiqué, transmis par le ministre de la Communication Patrick Muyaya, le Gouvernement de la RDC a exprimé sa condamnation ferme de ces exactions, qualifiées de « crime de masse » par plusieurs ONG de défense des droits humains. Le texte dénonce la violation flagrante du cessez-le-feu de Doha, et alerte sur le fait que ce massacre constitue le plus lourd bilan depuis la résurgence du M23.
« La majorité des victimes, parmi lesquelles des femmes et des enfants, étaient des civils sans défense, sommairement exécutés dans leurs champs et leurs villages », précise le communiqué.
En plus des tueries, le document officiel signale un climat d’extrême violence généralisée, marqué entre le 2 juillet et le 2 août 2025 par:
125 cas de viols ;
Recrutements forcés d’enfants ;
300 cas de torture, parfois sur des élèves ;
Pillages systématiques, incendies de maisons ;
Arrestations arbitraires et déportations de populations non identifiées dans les zones contrôlées par le M23.
Face à cette situation, le Gouvernement s’incline devant la mémoire des victimes et présente ses condoléances aux familles.
Paix signée, guerre perpétuée
Ces atrocités interviennent à peine quelques semaines après deux événements diplomatiques majeurs: l’Accord de Washington signé le 27 juin 2025 entre la RDC et le Rwanda, et la Déclaration de Doha signée le 19 juillet 2025 entre Kinshasa et le M23/AFC. Ces deux textes avaient pour but de relancer un processus de paix inclusif, sous les auspices de la communauté internationale.
Mais leur efficacité est déjà remise en cause.
« Entre-temps, les résultats de l’accord de Doha et ceux de Washington ne sont pas encore palpables sur le terrain. Mais, la RDC espère toujours au retour d’une paix durable dans cette partie du pays. Face à cette situation, le gouvernement congolais doit changer d’alternative, en étant vigilant sur les accords signés, car le Rwanda et sa marionnette M23-AFC continuent d’afficher toujours une attitude belliqueuse. »
Ces propos traduisent le désarroi d’une partie de l’opinion publique congolaise, qui constate, année après année, que les condamnations officielles ne suffisent plus à freiner l’avancée des groupes armés.
L’illusion diplomatique?
Le gouvernement congolais réaffirme pourtant son attachement au dialogue sincère et à la recherche d’une paix durable et définitive. Il appelle également à la mise en œuvre de la commission d’enquête internationale, prévue par la résolution A/HRC/RES/S-37/1 adoptée le 7 février 2025 par le Conseil des droits de l’homme de l’ONU.
Mais sur le terrain, la réalité est toute autre: les rebelles poursuivent leur offensive, violent les accords, tuent, pillent, enrôlent, déplacent, et instaurent une administration parallèle dans les territoires sous leur contrôle. De quoi remettre en question la stratégie actuelle du pouvoir congolais.
La Belgique condamne aussi !
Face à cette tragédie humaine, le ministre belge des Affaires étrangères, Maxime Prévot, a vivement réagi, qualifiant ces violences de « crimes insoutenables ». Il a déclaré qu’ils ne peuvent rester impunis, appelant à des enquêtes nationales et internationales pour traduire les auteurs de ces actes en justice. Le chef de la diplomatie belge plaide également pour un accès libre des enquêteurs aux zones actuellement sous contrôle du M23, afin de faire toute la lumière sur les exactions commises.
Maxime Prévot exhorte en outre toutes les parties prenantes au respect strict de la Déclaration de principes de Doha, et insiste sur l’urgence de protéger les populations civiles, souvent prises au piège dans ce conflit sanglant. La communauté internationale est désormais face à ses responsabilités pour faire cesser l’impunité dans l’est de la RDC.
À l’approche de la prochaine étape des pourparlers de Doha, une question brûle les lèvres: jusqu’à quand la diplomatie continuera-t-elle à faire l’autruche face à la barbarie?
« Aucun processus de paix ne saurait prospérer sur le silence face à l’horreur. Car, la protection des vies humaines reste non négociable et demeure au centre de l’action de l’État. »
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