Africa-Press – Congo Kinshasa. L’accord entre la République démocratique du Congo (RDC) et le Rwanda, sous l’égide des États-Unis, suscite des inquiétudes croissantes quant à sa véritable nature et à ses implications. Le professeur de politique économique, Jo M. Sekimonyo, met en lumière les défis et les ambiguïtés de cette situation complexe. Selon lui, malgré les corps-à-corps qui se poursuivent dans l’Est de la RDC et la pression du M23/AFC pour reobtenir le statut d’acteur central, plutôt que d’être relégué, une fois de plus, au rôle de simple pion, les Congolais s’efforcent de donner du sens à la promesse répétée vendredi par Kinshasa et Kigali de « poser les gants de boxe » sous l’œil menaçant de Washington. Sans un véritable changement de ton dans le ballet diplomatique de Luanda, Nairobi et du Qatar, la rigueur du bâton et la douceur de la carotte brandies par Trump suffiront-elles à vraiment sceller une harmonie ou à entériner une impasse où chacun accepte d’en sortir vaincu? Un accord perdant-perdant?
La promesse d’une métamorphose, passant des tambours de guerre à ceux de la reconstruction, semble, selon Sekimonyo, un vœu pieux. « Il est impensable que Paul Kagame se contente d’un tel accord sans obtenir d’abord, sur un plateau, la tête de ceux qui ont ébranlé le mythe de sa puissance militaire, les Wazalendos. » Les opportunistes, motivés par une soif de pouvoir, continuent de transformer la violence en un outil politique.
Le professeur souligne que, côté congolais, « le carrousel infernal de négociations sans applications des résolutions et les flots incessants de briefings propagandistes signés Muyaya, aussi vains qu’un tambour vidé de sa résonance, toujours présent, mais vidé de toute substance, ont défiguré notre patriotisme et désorienté notre colère. »
Une crise économique mondiale
La progression du M23–RDF vers Walikale a perturbé les équilibres bien au-delà du Nord-Kivu. Sekimonyo note que cette offensive a créé un goulet d’étranglement qui a eu un impact direct sur les marchés mondiaux. « Sous le coup de la panique suscitée par ces affrontements, Alphamin, unique exploitant industriel d’étain du Nord-Kivu, a brutalement suspendu l’exploitation de la mine de Bisie, exposant d’un coup environ 6 % de l’offre mondiale au risque de l’incertitude. » Cette situation a provoqué une flambée des prix, soulignant la dépendance du monde industriel aux ressources congolaises.
Une fable révélatrice
Pour illustrer cette dynamique complexe, Sekimonyo évoque une fable. « Imagine un village où, en pleine crise d’ado collective, tous les garçons se proclament majeurs en tapant du pied: « Plus personne ne nous dira comment vivre sous le toit des parents adoptifs ! » » Dans cette métaphore, la belle épouse représente les richesses naturelles de la RDC, tandis que les voisins envieux incarnent les puissances étrangères et les groupes armés qui exploitent ces ressources.
« Je n’esquisse qu’un rire jaune, histoire d’empêcher les larmes de s’éterniser. Oui, la beauté sans gardien attire les loups, la fable rappelle surtout qu’aucun destin n’est gravé », a-t-il laissé entendre.
Sekimonyo conclut en appelant à la nécessité d’un verrou solide pour protéger les richesses congolaises et assurer un avenir où la population puisse vivre sans crainte de prédation.
L’accord RDC-Rwanda, bien que présenté comme une avancée vers la paix, est à la croisée des chemins. Les enjeux économiques, politiques et sociaux s’entrelacent dans un contexte où la méfiance prévaut. Alors que les Congolais aspirent à une véritable souveraineté, la communauté internationale doit réfléchir aux conséquences de ses interventions et à la manière dont elles peuvent, au lieu de stabiliser, exacerber les tensions déjà présentes.
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