Vive Inquiétude de la Communauté Internationale et de L’Union Africaine Suite à la Détérioration dans L’Est de la RDC

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Vive Inquiétude de la Communauté Internationale et de L'Union Africaine Suite à la Détérioration dans L'Est de la RDC
Vive Inquiétude de la Communauté Internationale et de L'Union Africaine Suite à la Détérioration dans L'Est de la RDC

Anouar CHENNOUFI

Africa-Press – Congo Kinshasa. La crise en République démocratique du Congo s’oriente, vers de nouvelles tensions, suite aux combats qui se déroulent à l’Est du pays, et ce, après que le ministère des Affaires étrangères à Kinshasa a saisi le Conseil de sécurité de l’ONU en appelant à une session urgente.

Il faut reconnaître tout de même que les relations entre le Rwanda et la République démocratique du Congo sont devenues de plus en plus tendues au cours des deux derniers mois en raison de l’escalade du conflit dans l’Est du Congo, principalement alimenté par le mouvement rebelle « M23 », après avoir pris le contrôle de zones stratégiques.

En plus, les événements se sont développés avec le mouvement M23 qui avait pris le contrôle de la ville de Minova, laquelle est une ligne d’approvisionnement principale pour les forces gouvernementales, puis continuant à avancer vers la ville de Sake, qui se trouve à environ 20 kilomètres de la capitale régionale, Goma, et prenant le contrôle de celle-ci, selon la confirmation de la mission des Nations Unies.

• Réunion expresse du Conseil de sécurité

Le Conseil de sécurité de l’ONU s’est réuni en urgence, le dimanche 26 janvier 2025, à la demande de la RDC, pour discuter des violences qui sévissent dans ses régions dans l’est, sachant que la République démocratique du Congo a déjà annoncé le rappel de ses diplomates au Rwanda, après l’escalade des combats entre l’armée congolaise et les militants du M23 soutenus par le Rwanda et son armée.

Cette réunion qui devait se tenir le lundi a été avancée à dimanche, selon des sources diplomatiques citant « Bintou Keita », la cheffe de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO), experte en résolution de conflits.

Quelques jours avant, précisément le jeudi 23 janvier, le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a exprimé sa « préoccupation » face à la recrudescence des violences, mettant en garde contre « le risque d’une guerre régionale ».

Par ailleurs, le ministère congolais des Affaires étrangères qui a déjà rappelé ses diplomates du Rwanda, a demandé aux autorités rwandaises de rappeler ses diplomates des activités diplomatiques et consulaires exerçant dans la capitale congolaise, Kinshasa, et ce dans un délai de 48 heures.

• Branle-bas autour de la situation entre la RDC et la Rwanda

Après l’échec de la médiation entre la République démocratique du Congo et le Rwanda sous l’égide de l’Angola, les militants du M23 et environ 4.000 soldats rwandais, selon les Nations Unies, ont pu faire des progrès rapides ces dernières semaines, jusqu’à encercler désormais Goma, la capitale de la province du Nord-Kivu, avec une population d’environ un million de personnes, et comptant au moins autant de personnes déplacées.

« Le Rwanda est déterminé à reprendre la ville de Goma », a déclaré le porte-parole de l’armée congolaise FARDC, général Sylvain Ekenge, tout en soulignant la détermination des forces armées congolaises à « repousser l’ennemi ».

• Les forces régionales peinent à contenir les attaques du M23

Des responsables de l’ONU ont déclaré aujourd’hui que six soldats des Forces régionales ont été tués dans des affrontements avec des militants du M23, en plus des deux Casques bleus sud-africains tués le vendredi, ainsi qu’un Casque bleu uruguayen et trois Casques bleus malawites qui ont également été tués dans l’Est du Congo.

Dans ce contexte, le ministère sud-africain de la Défense a annoncé il y a moins d’une semaine que 9 de ses soldats ont été tués dans l’Est du Congo dans des combats auxquels ont participé l’armée congolaise et les forces de maintien de la paix pour stopper l’avancée des combattants du M23 vers la ville de Goma. Le ministère a ajouté dans SON communiqué officiel qu’« une violente bataille a duré deux jours, entraînant la mort des soldats », et a confirmé que « les forces ont pu repousser l’attaque du mouvement M23 ».

A noter que ces forces régionales sont déployées dans l’Est de la RDC depuis fin 2023 pour soutenir le gouvernement de Kinshasa, et comprennent notamment 2.900 soldats sud-africains.

• Réaction d’instances régionales et internationales

L’Union africaine a immédiatement appelé à une « cessation immédiate » des combats dans la région, appelant également au « strict respect du cessez-le-feu convenu par les parties ».

C’est ainsi que le président de la Commission de l’Union africaine, Moussa Faki Mahamat, a exhorté toutes les parties à respecter l’accord de cessez-le-feu et à protéger les civils dans l’Est de la République démocratique du Congo.

De son côté, l’Union européenne est intervenue à son tour pour appeler le mouvement M23 à « stopper son avancée » et à « se retirer immédiatement », alors que l’Allemagne a exhorté ses citoyens à quitter la province du Nord-Kivu, comme le ministère britannique des Affaires étrangères, qui a exhorté leurs citoyens à quitter Goma.

Il va de soi pour les Etats-Unis qui, dans un contexte de tensions croissantes en République démocratique du Congo (RDC), l’ambassade américaine à Kinshasa a lancé un appel pressant à ses ressortissants pour qu’ils quittent le pays dès que des vols commerciaux sécurisés soient disponibles.

Cette décision intervient après une vague de manifestations violentes. Celles-ci ont visé plusieurs ambassades étrangères, dont celles des États-Unis, du Rwanda, de la France, de la Belgique et de l’Ouganda.

Par ailleurs, le Haut-commissariat des Nations Unies pour les réfugiés a indiqué quant à lui qu’environ 400.000 personnes ont été déplacées du Nord et du Sud-Kivu en raison des combats entre le mouvement M23 et ses alliés d’une part, et l’armée congolaise et ses forces de soutien d’autre part. Selon lui, des employés étrangers en provenance de Goma, dans l’Est de la République démocratique du Congo – qui ont traversé la frontière vers le territoire rwandais – ont rapporté que rester dans la ville de Goma est devenu impossible, après que les autorités aient coupé l’électricité, les services de communication et d’Internet dans la ville, rendant leurs tâches impossibles.

De son côté, le porte-parole du secrétaire général de l’ONU, Stéphane Dujarric, a condamné ce qu’il a décrit comme la nouvelle offensive « du mouvement M23 depuis le début de l’année et son expansion au Nord et au Sud-Kivu, y compris son contrôle de la ville de Sake », et a averti que l’attaque « augmente le risque d’une guerre régionale plus large ».

Dujarric a appelé le mouvement M23 à « cesser immédiatement son offensive et à se retirer de toutes les zones dont il a pris le contrôle ».

Human Rights Watch a averti entre-autres que la situation était « de plus en plus dangereuse » pour les civils à Goma, notant qu’il y avait « des besoins humanitaires massifs » avec le nombre de personnes déplacées par les combats depuis le début de ce mois (atteignant environ 400.000, selon les Nations Unies).

À son tour, l’Alliance du fleuve Congo a appelé dans un communiqué la mission de l’ONU à « cesser sa coopération avec l’armée congolaise qui cible les zones peuplées », ajoutant que la mission de l’ONU doit se recentrer sur son mandat de protection des civils au lieu de participer activement à la « conflit », selon la déclaration.

• Affrontements en bouilloire entre « Armée du RDC – M23 »

Les événements se sont développés avec le mouvement M23 après avoir pris le contrôle de la ville de Minova, qui est une ligne d’approvisionnement principale pour les forces gouvernementales, puis a continué à avancer vers la ville de Sake, qui se trouve à environ 20 kilomètres de la capitale régionale, Goma, dont il prit le contrôle également, selon la confirmation de la mission des Nations Unies.

Il importe de savoir que les militants du M23 font partie d’une centaine de groupes armés en lice pour une présence dans l’Est de la République démocratique du Congo, une zone riche en minéraux, le long de la frontière avec le Rwanda, sachant que les conflits font rage dans la région depuis plus de 30 ans. Six accords de cessez-le-feu et de trêve avaient déjà été annoncés dans la région, mais ils ont rapidement été violés, le dernier accord en date fût signé fin juillet dernier.

Toujours dans le même contexte, le chef du M23, Bertrand Bisimwa, a déclaré que ses forces « contrôlent désormais toutes les positions défensives dans la ville de Goma », ajoutant que « les unités de l’armée congolaise restantes à l’intérieur de la ville ne sont plus en mesure de la défendre », selon ses termes. Bisimwa vient d’ailleurs d’ordonner aux soldats congolais présents encore à Goma de déposer les armes dans environs 48 heures « afin d’éviter des confrontations inutiles dans la ville ».

De leur côté, les forces congolaises ont affirmé avoir repoussé une tentative des combattants du M23 d’avancer vers la ville de Goma, et avoir pu maintenir les lignes de défense et empêcher les rebelles de les pénétrer. Parallèlement, le porte-parole officiel de l’armée congolaise, le général Sylvain Ekenge, a déclaré à l’issue d’une réunion du Conseil suprême de défense que le chef de l’Etat, Félix Tshisekedi, « a donné des ordres stricts pour poursuivre les forces ennemies, les attaquer dans leurs bastions et les repousser », et « les éloigner de la ville de Goma ».

Vendredi, Sylvain Ekenge a annoncé le décès du gouverneur régional en raison des blessures subies dans les zones de combat.

En outre, la mission des Nations Unies en République démocratique du Congo a déclaré que ses forces ont ciblé les positions du M23 dans la ville de Sake avec de l’artillerie lourde dans le cadre de « l’appui aux forces armées de la République démocratique du Congo dans leurs efforts pour arrêter l’expansion de ce mouvement », ajoutant que la mission a soutenu les forces congolaises en déployant de l’artillerie lourde et des hélicoptères d’attaque.

La mission de l’ONU a déclaré aussi qu’elle « continue de maintenir des positions défensives au Nord-Kivu pour limiter l’avancée du M23 et protéger les civils et les infrastructures vitales de la province ».

Les Nations Unies ont également rapidement relocalisé leur personnel non essentiel de Goma en réponse à la détérioration de la situation sécuritaire au Nord-Kivu, selon un communiqué officiel qui précise que « cette mesure de précaution vise à protéger la sécurité du personnel tout en garantissant que les tâches vitales des Nations Unies soient effectuées dans le cadre de la mission de l’ONU dans le Nord-Kivu ».

« Malheureusement, les opérations dans la région se poursuivent sans interruption ».

• Quelles sont les perspectives attendues de la crise actuelle ?

Les perspectives de la crise actuelle entre la République démocratique du Congo et le Rwanda semblent complexes et présentent une série de scénarios possibles:

A) Escalade militaire et guerre totale

Les récents développements sur le terrain et l’escalade des mesures entre les deux parties menacent de déclencher une guerre régionale, la ministre congolaise des Affaires étrangères, Thérèse Kayikwamba Wagner, ayant qualifié l’entrée des forces rwandaises sur le territoire de son pays d’« agression directe et de déclaration de guerre ».

Ce scénario renforce l’échec des précédentes initiatives de paix et l’importance du contrôle des zones riches en ressources de l’est du Congo pour de nombreuses parties, y compris le Rwanda.

B) Solutions pacifiques

Par l’intervention de médiateurs et d’institutions internationales et continentales soucieuses d’endiguer la crise, alors qu’Antonio Guterres appelait « les Forces de défense rwandaises à cesser de soutenir le mouvement M23 et à se retirer du territoire de la République démocratique du Congo », Washington a dénoncé les attaques du Rwanda et du M23, appelant – avec la Grande-Bretagne et la France – Kigali à retirer ses forces et appelle à un cessez-le-feu.

Bien que ces efforts puissent réussir à apaiser les tensions – sans parvenir à des solutions pacifiques qui clôturent les dossiers sanglants entre les deux parties – de nombreux défis subsistent, notamment le manque total de confiance dû aux conflits historiques et aux différences politiques, et l’existence de conflits profondément enracinés des problèmes dans l’Est du Congo tels que les divisions ethniques, la concurrence pour les ressources naturelles, et la responsabilité des violations contre les civils.

C) Éviter la guerre totale et poursuivre le conflit par d’autres moyens

Selon ce scénario, les deux parties évitent d’être entraînées dans une guerre à grande échelle, en raison des coûts économiques et humanitaires élevés et des défis internes auxquels sont confrontés les deux pays, en plus de la possibilité que d’autres parties régionales s’impliquent dans le conflit de guerre, comme en Ouganda et au Burundi, qui menace d’enflammer la région des Grands Lacs, ce qui accroît la pression internationale pour éviter que la situation n’explose.

En revanche, ce scénario suggère que l’état de fluidité sécuritaire dans l’Est du Congo se poursuivra à travers des confrontations indirectes et des guerres par procuration dans lesquelles les groupes rebelles utilisent l’opposition, exploitant le vide sécuritaire dans la région, ce qui signifie la poursuite des souffrances des civils pris entre les deux feux.

Pour conclure ce dossier, il importe de noter que la frontière avec le Rwanda est fermée à Goma, et une source émanant d’une organisation humanitaire a indiqué que: « Personne n’entre, personne ne sort, à part quelques personnels de l’ONU et leur famille évacués ces derniers jours ». Des bus ont été mis à disposition à la frontière rwandaise avec l’Est de la RDC, afin d’évacuer vers Kigali des personnels de l’ONU et leurs familles venant de Goma.

Alors que des habitants tentent de fuir la ville, la prison, qui comptait environ 3.000 détenus, a été « totalement incendiée » à la suite d’une « évasion massive » qui a causé des « morts », sans qu’aucun bilan ne soit publié.

Par ailleurs, le porte-parole de l’armée rwandaise a affirmé de son côté que cinq personnes avaient été tuées et 26 autres blessées à Rubavu, ville frontalière rwandaise, dans un pilonnage qu’il a attribué à l’armée congolaise.

• Un sommet régional attendu avec Paul Kagame et Félix Tshisekedi

Dans un communiqué rendu public, le président kényan, William Ruto, a annoncé réunir « dans les prochaines jours » un sommet extraordinaire de la Communauté d’Afrique de l’Est (EAC) sur la situation en République démocratique du Congo.

« J’ai discuté de la réunion au sommet de mercredi avec le président Paul Kagame et le président Félix Tshisekedi, et tous deux ont confirmé leur participation », a-t-il confié aux médias.

• Quel est le rôle des puissances régionales et pourquoi certains pays interviennent-ils dans le conflit ?

Il ne faut pas oublier que l’Est de la République démocratique du Congo est une arène de compétition géopolitique intense entre pays voisins, où les motivations sécuritaires, ethniques et économiques s’entremêlent avec les ambitions régionales, alimentées par la faiblesse de l’État congolais, résultat de décennies de conflits continus.

Les vastes gisements de matières premières enfouies sous les sols de la région des lacs sont la porte d’entrée de nombreuses puissances régionales concurrentes. L’Est du Congo recèle des matières premières vitales pour la transformation mondiale de l’énergie et des transports, et il existe un conflit autour de la contrebande de minéraux tels que l’étain, le tungstène et les diamants, tandis que l’or et le coltan sont transportés via la frontière vers le Rwanda et l’Ouganda et sont revendus à partir de là.

Avec la prise de la mine de Rubaya, en avril 2024, le M23 a mis la main sur l’une des plus grandes sources mondiales de coltan, représentant environ 15% de la production mondiale. Ce contrôle a permis au groupe armé de se constituer une véritable base financière, en percevant des taxes sur l’extraction et la vente du minerai. En parallèle, il a imposé un système de régulation parallèle, en attribuant des permis d’exploitation et supervisant les transactions minières.

Dans ce contexte, la relation entre le M23 et le gouvernement rwandais est l’un des sujets les plus controversés, le Rwanda ayant nié à plusieurs reprises avoir apporté son soutien au groupe rebelle, tandis que le Groupe d’experts des Nations Unies sur la République démocratique du Congo a fourni des informations détaillées dans ses rapports sur le soutien militaire rwandais au mouvement, qui comprend différents aspects tels que les combattants, l’assistance logistique et le soutien politique.

En cherchant les motivations derrière ce soutien, certains observateurs soulignent l’adhésion de l’Est du Congo à un groupe rebelle rwandais appelé les « Forces démocratiques pour la libération du Rwanda », que le délégué de Kigali aux Nations Unies a décrit comme « un groupe terroriste armé qui représente une menace pour la sécurité nationale », soit une « menace existentielle pour le Rwanda », accusant l’armée congolaise de lui fournir un soutien continu.

En plus de ce qui précède, un rapport préparé par le chef du bureau de la Fondation allemande Konrad-Adenauer à Kinshasa, Jakob Kerstan, explique la position de Kigali en partie par la dépendance économique du Rwanda à l’exportation de matières premières, qui proviennent principalement du Congo, comme ces matières premières ne sont disponibles qu’en quantités très limitées dans le pays.

Pour illustrer cela, le rapport cite un certain nombre d’exemples, notamment en liant l’augmentation significative des exportations de coltan rwandais ces dernières années à l’expansion régionale du mouvement M23, qui s’est emparé de la mine de Rubaya, que les experts estiment être la plus grande mine du pays dans le monde.

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