Africa-Press – Congo Kinshasa. Derrière son chariot lourdement chargé, pagne noué autour des reins, Morena Silu sillonne les rues de Kinshasa. 46 ans révolus, elle passe comme l’une de rares femmes « pousse pousseur » de la capitale. C’est une célébrité. L’une des rares femmes à pratiquer ce dur métier considéré comme l’apanage des hommes.
C’est chaque jour, depuis une dizaine d’années, qu’on voit cette mère de trois enfants transporter des colis de tout genre d’un dépôt à un autre au marché 7 à N’djili. Elle dessert presque toute la commune avec sa charge. Du quartier 1 vers CECOMAF, elle se rend à toutes les destinations où elle est sollicitée pour déposer des colis. Grâce à ce boulot, Morena Silu arrive à nouer les deux bouts du mois.
Parfois, les circonstances de la vie orientent les personnes vers des métiers dont ils n’ont jamais rêvé. Morena Silu est de celles-là ? Elle est passée de la vendeuse de pondu et de braise à la conductrice de chariot. « Auparavant, je vendais le pondu et le makala, confie-t-elle. Un jour, j’ai fait une fausse affaire et j’ai perdu tout mon capital. Au lieu de quémander, j’ai préféré faire un virement à 180 degrés. J’ai sollicité le service d’un propriétaire des chariots. Ce dernier a accepté et j’ai commencé à travailler. Au départ, les gens n’y croyaient pas. Ils pensaient que je n’allais pas m’en sortir. Mais j’ai osé. Et maintenant, les choses marchent bien« , déclare-t-elle.
Morena Silu ne se souvient pas exactement de l’année où elle a commencé ce métier. Elle soutient qu’à l’époque, son fils ainé était en 4ème année primaire. Lorsqu’il a terminé les humanités en 2018, Morena a réalisé que ce métier lui rapporte du gain.
« Je verse 1.500 Fc par jour au propriétaire du chariot. Le surplus est pour moi. C’est avec ce fonds que je prends en charge la scolarité de mes trois enfants et d’autres charges« , précise Morena Silu.
Elle tire quelques avantages de ce métier, tout en reconnaissant tout de même que c’est un travail pénible qui exige beaucoup d’endurance. « Comme j’aime voler de mes propres ailes, je suis fière de le faire. En tant que femme, les gens ont confiance en moi. Ils me confient leurs marchandises sans un moindre doute. Ce qui fait que je me retrouve avec des recettes journalières consistantes« , révèle-t-elle
Mais le rêve de Morena Silu est d’avoir sa propre charrette pour qu’elle soit indépendante. Les moyens font toutefois défaut. « Si j’ai mon chariot, ce serait une aubaine pour moi. Mais cela coûte cher/Le prix varie entre 200 et 250 dollars. Ma bourse ne me permet pas de me le procurer. Comme tout le monde sait que cette dame est conductrice de chariot, je travaillerai davantage avec mon chariot, parce que je sais que c’est un travail qui paie bien« .
Aux femmes, elle ne demande qu’une seule chose: « avoir du courage. Au Congo, c’est quand on est courageux qu’on peut évoluer et ne plus dépendre des autres. Que les femmes ne croisent pas les bras. Qu’elles ne soient pas des mendiantes. Si une personne te donne aujourd’hui, demain elle ne le fera pas. Le travail garantit l’avenir de nos enfants« , conclut-elle.
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