Florence Richard
Africa-Press – Côte d’Ivoire. L’organisation de la Coupe d’Afrique des nations focalise l’attention des autorités ivoiriennes, soucieuses de faire de cette compétition « la plus belle de l’histoire » et la vitrine du développement du pays.
La prochaine Coupe d’Afrique des nations (CAN), organisée du 13 janvier au 11 février 2024 en Côte d’Ivoire, devra être « la plus belle de l’histoire ». Une exigence des autorités devenue une véritable obsession dans un pays qui n’a pas gardé un bon souvenir de la dernière compétition continentale qu’il a accueillie, en 1984. Plus de 5 000 journalistes originaires de 70 pays ont demandé à être accrédités. Les matchs seront diffusés dans 155 pays. Du jamais-vu.
Pendant quatre semaines, tous les projecteurs seront braqués sur la Côte d’Ivoire, qui prépare l’événement depuis 2014 – année de sa désignation comme pays hôte –, avec un net coup d’accélérateur ces derniers mois.
Au-delà de la dimension sportive, c’est l’image toute entière du pays qui est en jeu, mais aussi celle du président Alassane Ouattara, qui achèvera son troisième mandat en 2025 et compte bien faire de l’événement une vitrine de sa politique de développement.
« Pression permanente »
« Vous pouvez compter sur nous, la pression est là en permanence », a dernièrement assuré le nouveau Premier ministre, Robert Beugré Mambé, à propos de chantiers importants – voire essentiels – pour le bon déroulement de la compétition, mais pas encore tout à fait achevés: celui de la voie de contournement Y4 permettant de fluidifier le trafic jusqu’au principal stade d’Ebimpé, à une vingtaine de kilomètres du centre d’Abidjan, et celui du quatrième pont de Yopougon, en chantier depuis 2018.
Robert Beugré Mambé a promis une mise en service de ces deux ouvrages fin décembre. Sur le fil. « La compétition devait initialement se dérouler en juin et juillet 2023, c’est dire le retard accumulé… », fait remarquer un bon connaisseur du dossier.
Depuis sa nomination, Robert Beugré Mambé s’est transformé en chef de chantier, multipliant les déplacements sur le terrain et, au besoin, pressant les constructeurs. Alassane Ouattara a choisi cet ingénieur de formation, ancien gouverneur du district d’Abidjan et superviseur des Jeux de la francophonie, en 2017, pour gérer l’organisation de l’événement, devenue centrale jusqu’au plus au niveau de l’État. Exit le premier ministre Patrick Achi et son ministre des Sports, Claude Paulin Danho, mis sur la touche début octobre. « Allez jusqu’à remanier le gouvernement pour s’assurer du bon déroulement d’une CAN, c’est du jamais-vu », constate Hervé Penot, journaliste français et spécialiste du football africain.
« Le choc du 12 septembre au stade d’Ebimpé a été ressenti comme un séisme, rappelle l’ancien chef du service des sports de la Radiodiffusion télévision ivoirienne (RTI), Fernand Dedeh. D’un seul coup, tout le monde s’est posé la question: comment est-il possible de consacrer autant de temps et d’argent à une infrastructure comme celle-ci si une pluie exceptionnelle de vingt minutes aboutit à la suspension de la rencontre ? Le match d’ouverture va s’y dérouler, c’est un événement avec un enjeu médiatique considérable. »
Investissements « massifs »
En 1984, huit équipes seulement étaient en lice. À Abidjan, la compétition avait été ouverte par le président Félix Houphouët-Boigny dans l’enceinte sportive portant son nom. Sur une vidéo, on reconnait près de lui le jeune Henri Konan Bédié. La fanfare de la gendarmerie nationale chauffe le stade, plein à craquer.
Quarante ans plus tard, la compétition a considérablement changé de dimension. De huit équipes, elle est passée à vingt-quatre. Les infrastructures doivent suivre. Six stades ont été construits ou rénovés à Abidjan, Yamoussoukro, Bouaké, San Pedro et Korhogo, dont celui d’Ebimpé, le stade Alassane-Ouattara.
Pour cette compétition, plus de 762,5 millions d’euros ont été investis dans les infrastructures à travers le pays, sur un coût total de 1,5 milliard d’euros. Les exigences de la Confédération africaine de football (CAF) sont grandes. « Ces investissements massifs ne sont pas propres à la Côte d’Ivoire, chaque pays veut montrer qu’il se développe et qu’il avance. L’Égypte ne s’était pas posé la question puisque, pour elle, tout était prêt, mais ç’a été le cas dernièrement du Cameroun, qui a également dépensé beaucoup d’argent, ou, avant cela, du Gabon ou de l’Angola. Cela fait partie du cahier des charges des présidents », explique Hervé Penot, qui s’apprête à couvrir sa quatorzième CAN.
« Nouvel élan pour le sport »
« Les politiciens au pouvoir jouent leur rôle en considérant cette compétition comme un aboutissement, un marqueur de prestige et de leadership du président », estime de son côté Fernand Debeh, qui compte surtout sur l’événement pour « donner un nouvel élan au sport en Côte d’Ivoire ». « Quand nous avons voulu abriter cette compétition, le but était d’amener le pays à se doter d’infrastructures à la dimension des exigences de la CAF et de la Fifa. Nos stades étaient dépassés et ne répondaient à aucune norme. »
Dix-sept mille membres des forces de défense et de sécurité, ainsi que 2 500 stadiers formés par les écoles de police, seront mobilisés. La Côte d’Ivoire attend 1,5 millions de visiteurs. Pour faire de cette CAN « la plus belle de l’histoire » ? « La Côte d’Ivoire est un pays accueillant, très festif et qui adore le football. Tous les ingrédients sont réunis pour une ambiance magnifique. Sans trop m’avancer, je peux dire que ce sera certainement un des plus belles CAN », prédit déjà Hervé Penot.
Source: JeuneAfrique
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