Une violente tempête solaire a frappé la Terre il y a 2700 ans

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Une violente tempête solaire a frappé la Terre il y a 2700 ans
Une violente tempête solaire a frappé la Terre il y a 2700 ans

Africa-Press – Côte d’Ivoire. Les « événements de Miyake » (du nom de la physicienne japonaise Fusa Miyake qui les a découverts en 2012) sont des phénomènes rares durant lesquels le Soleil émet une énorme quantité de particules énergétiques qui frappent la Terre. Ces particules, appelées isotopes cosmogéniques (tels que le carbone 14, le béryllium 10 et le chlore 36), se forment quand des rayons cosmiques de haute énergie entrent en collision avec les noyaux d’atomes. Ce phénomène modifie l’atmosphère et laisse des traces, comme dans les cernes des arbres, que l’on peut analyser pour détecter ces événements. A ce jour, seulement neuf événements de Miyake ont été identifiés (dont six majeurs), et ils ne datent pas d’hier: le plus récent remonterait à 993 après J.-C. Ils sont aussi rares que dangereux: si l’un d’entre eux se produisait aujourd’hui, il aurait le potentiel de griller tous les systèmes électroniques et de communication de la planète.

Une équipe de recherche, dirigée par Irina Panyushkina du laboratoire de recherche sur les cernes des arbres et Timothy Jull du département de Géosciences, tous deux exerçant à l’Université d’Arizona (Etats-Unis), a pu déterminer qu’un de ces neuf événements de Miyake remonte à 664-663 avant J.-C. Ils ont publié leur étude dans la revue Communications Earth and Environment.

L’événement de Miyake, un phénomène rare et extrême

L’événement de Miyake se traduit par un pic de concentration en carbone 14 (isotope radioactif naturel du carbone) dans les cernes des arbres, mais aussi en béryllium 10 et en chlore 36 dans les carottes de glace, datés indépendamment. L’objectif d’Irina Panyushkina et de Timothy Jull était de définir l’année exacte et l’ampleur d’un événement de Miyake en particulier qui se serait produit vers 660 avant notre ère, enregistré dans le contenu en carbone (14C) des cernes de croissance des arbres et les isotopes des carottes de glace (BE10).

Cernes des arbres et activité solaire, quel lien ?

Chaque cerne d’arbre correspond à une année de croissance et la quantité de carbone 14 (C14) qu’il contient varie en fonction de l’activité solaire. Donc, lorsque se produit une éruption solaire se produit, elle perturbe l’atmosphère et augmente la quantité de rayons cosmiques qui atteint la Terre, ce qui par conséquent entraîne une augmentation du C14 dans les arbres. Ainsi, les chercheurs, en étudiant les cernes des arbres, peuvent observer les variations de l’activité solaire au fil du temps.


Quand les arbres racontent l’histoire du Soleil

Pour les chercheurs, toute la difficulté résidait dans le fait de trouver des spécimens de bois appropriés datant de 2500 ans dans les régions proches des pôles. Mais pourquoi ces régions en particulier ? « Elles sont importantes car les lignes de champ magnétique de la Terre y convergent, piégeant davantage de particules solaires qui sont ensuite canalisées dans l’atmosphère », explique Irina Panyushkina. Une fois les bois trouvés, les chercheurs ont analysé les cernes et ont brûlé la cellulose – principal composant du bois – pour déterminer la teneur en radiocarbone.

Afin de déterminer si les tempêtes solaires étaient à l’origine des pics de radiocarbone, les chercheurs ont comparé les données des cernes d’arbres aux pics que d’autres chercheurs ont trouvé dans un autre isotope, le béryllium 10, enfermé dans des carottes de glace prélevées dans des glaciers et des calottes glaciaires. « Car tout comme le carbone 14, le béryllium 10 se forme dans l’atmosphère en raison d’un assaut de particules venues du soleil (…) si les carottes de glace du pôle Nord et du pôle Sud montrent un pic dans l’isotope béryllium 10 pour une année particulière correspondant à une augmentation du radiocarbone dans les cernes des arbres, nous savons qu’il y a eu une tempête solaire », déclarent les chercheurs dans un communiqué de presse.

Une double impulsion de rayonnement cosmique

Les chercheurs ont montré que la double impulsion de rayonnement cosmique (c’est-à-dire qu’il y a eu deux explosions puissantes dans l’espace qui ont envoyé des particules énergétiques vers la Terre à des moments très rapprochés), survenue entre 664 et 663 avant J.-C. a produit un modèle atypique de production d’isotopes cosmogéniques enregistré à plusieurs endroits dans le nord de l’Eurasie. Ce qui avant était décrit par les scientifiques comme l’événement « vers 660 » avant J.-C., a, grâce à ces découvertes, une date bien plus précise.

Mais au-delà d’avoir réussi à dater de manière très précise l’événement, un autre résultat inattendu a surpris les chercheurs. Les tempêtes solaires intenses et de courte durée ont eu un impact prononcé sur la teneur en carbone des anneaux de croissance des arbres. Les niveaux élevés ont persisté pendant deux à trois ans après l’événement de Miyake. Il se peut « que le flux élevé de 14C dans la troposphère (première couche de l’atmosphère terrestre se situant à une altitude de 8 à 15 km, ndlr) ne se mélange pas aussi rapidement ou uniformément à travers le monde que ce que l’on pensait jusqu’à présent. Cela pourrait retarder et allonger la période pendant laquelle le dioxyde de carbone enrichi en 14C provenant de la troposphère est absorbé dans le cycle du carbone des arbres », explique Irina Panyushkina.

Qui ajoute: « Cette étude apporte de nouvelles informations sur la gamme possible d’énergie solaire qui atteint l’atmosphère terrestre et interagit avec le champ géomagnétique de la Terre. Nous commençons à peine à comprendre que le rayonnement solaire et le flux d’énergie peuvent être jusqu’à 100 fois plus élevés que ce que nous connaissions auparavant, ce qui modifie considérablement notre perception de la vulnérabilité des infrastructures essentielles, telles que les réseaux électriques et les technologies de communication, aux phénomènes solaires extrêmes ».

De nombreuses questions persistent

Les résultats de cette étude nous montrent ainsi, selon la chercheuse, « qu’il existe un immense fossé de détection entre les grandes tempêtes solaires observées grâce aux instruments modernes et les super tempêtes solaires de Miyake identifiées grâce aux isotopes cosmogéniques. » « Pourquoi sommes-nous incapables de détecter des évènements solaires intermédiaires ? Pouvons-nous mesurer l’impact d’autres événements galactiques extraordinaires, tels que les explosions de supernova ou les sursauts de rayons gamma, sur les concentrations de radiocarbone dans les cernes des arbres afin de les enregistrer dans le passé ? », s’interroge Irina Panyushkina. Autant de questions qui restent pour le moment en suspens.

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