Anouar CHENNOUFI
Africa-Press – Côte d’Ivoire. En Côte d’Ivoire, la situation politique a suscité des débats après la radiation annoncée du principal opposant Tidjane Thiam des listes électorales, dans un contexte tendu et ce à l’approche des élections présidentielles de 2025, à un moment où, dans une démarche qui reflète un nouveau changement dans le paysage politique en Côte d’Ivoire, 25 partis d’opposition ont annoncé la formation d’une nouvelle alliance appelée « Alliance pour l’alternance pacifique (APC) » en vue de concourir contre le parti au pouvoir lors des élections présidentielles prévues en novembre de cette année.
Cette alliance de l’opposition a été officiellement annoncée par Tidjane Thiam, le dimanche 10 mars dernier, et Simone Ehivet Gbagbo en est devenue la porte-parole, lors d’une réunion élargie à Abidjan, à laquelle avaient pris part les dirigeants des partis d’opposition pour signer le document établissant le nouveau bloc, qui vise à présenter un candidat commun ou à adopter une stratégie unifiée pour concurrencer le parti du « Rassemblement pour la démocratie et la paix », dirigé par le président sortant, Alassane Ouattara.
La coalition comprend des forces politiques de premier plan issues de divers horizons, notamment le « Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) », qui dirigeait auparavant le pays, et le « Front populaire ivoirien (FPI) », fondé par l’ancien président Laurent Gbagbo. En plus d’autres partis et blocs qui cherchent à modifier l’équilibre des pouvoirs lors des prochaines élections. Toutefois, le Parti des peuples africains-Côte d’Ivoire (PPA-CI), a brillé par son absence.
• Objectifs de l’Alliance
Dans leur déclaration officielle, les partis fondateurs de la coalition ont affirmé que leur objectif principal est de parvenir à un transfert pacifique du pouvoir par le biais d’élections équitables. Ils ont souligné que l’initiative va au-delà de la simple victoire aux élections, mais vise plutôt à établir un système démocratique plus transparent et plus juste tout en renforçant les libertés publiques.
• L’opposition face à un test historique
L’élection présidentielle prévue le 25 octobre 2025 en Côte d’Ivoire représente un moment crucial pour le pays, avec des enjeux majeurs sur les plans politique, économique et social.
C’est dans cette optique que l’« Alliance pour l’alternance pacifique » représente donc une évolution sans précédent dans le paysage politique ivoirien, car c’est la première fois que l’opposition s’unit bien avant les élections.
Cependant, les observateurs estiment que le succès de cette alliance dépendra de sa capacité à maintenir son unité et à définir une stratégie électorale efficace, et surtout inébranlable.
Ainsi, à l’approche de l’élection présidentielle, on doit s’attend à ce que la Côte d’Ivoire se dirige droit vers une bataille électorale cruciale qui pourrait marquer un tournant dans son histoire politique moderne, car l’opposition (dont le PDCI et le FPI) dénonce une élimination politique de Thiam, et pourrait boycotter ou contester le scrutin.
• Des messages forts adressés aux autorités
Lors de la cérémonie de lancement de la coalition de l’opposition, ses représentants ont prononcé des discours soulignant que cette initiative répondait au désir du peuple d’une alternative politique plus juste et plus stable, et cherche à parvenir à un changement pacifique et démocratique, car la Côte d’Ivoire a besoin d’une nouvelle ère de bonne gouvernance, fondée sur la transparence, la responsabilité et le respect des droits des citoyens.
Selon les leaders présents, ce bloc représente un nouvel espoir pour les Ivoiriens, affirmant que l’opposition est déterminée à continuer sur cette voie malgré les défis.
• Retour sur le cas de l’opposant Tidjane Thiam
Contesté à cause de sa deuxième nationalité française (acquise en 1987), l’éminent Chef de l’opposition ivoirienne et chef du Parti démocratique de Côte d’Ivoire, Tidjane Thiam (élu président du PDCI à l’issue du Congrès extraordinaire de Yamoussoukro, le 22 décembre 2023), a annoncé qu’il renonçait à sa nationalité française en vue de sa candidature à l’élection présidentielle prévue vers la fin de cette année, car cette deuxième nationalité avait alimenté la polémique sur son éligibilité.
La décision fût confirmée après que le décret signé par les autorités françaises ait été publié au Journal officiel, à la date du 20 mars 2025.
Cette décision est conforme aux exigences de la constitution ivoirienne, qui exige que les candidats à la présidentielle soient uniquement de nationalité ivoirienne, sans double nationalité.
Dans le même contexte, la présidente du tribunal avait rendu son délibéré, estimant que le candidat à l’élection présidentielle, Tidjane Thiam, avait perdu la nationalité ivoirienne quand il avait acquis la nationalité française, et donc elle a fait droit aux demandes des requérants et a ordonné la radiation de Tidjane Thiam de la liste électorale.
Ses partisans dénoncent ce qu’ils considèrent comme une manœuvre juridique et politique visant à l’écarter de la course à la présidentielle.
Thiam, qui a été ministre de la Planification et du Développement sous l’ancien président Henri Konan Bédié (mandat présidentiel du 7 décembre 1993 au 24 décembre 1999), jouit d’une solide réputation internationale dans le domaine financier, ayant dirigé plusieurs grandes institutions financières, notamment le Crédit Suisse durant cinq ans (depuis 2015).
Mais malgré son succès international, Thiam est confronté aussi à un défi de taille « construire une base de soutien locale solide », surtout après sa longue absence de la scène politique ivoirienne.
• Une campagne électorale entamée plus d’une année à l’avance
Prés de quinze mois avant le jour « J » des élections présidentielles prévue le 25 octobre 2025, le président du (PDCI), Tidjane Thiam, a entamé une tournée politique à Soubré (région ouest), critiquant le régime du président sortant, Alassane Ouattara.
La ville de Soubré fût le théâtre d’une mobilisation exceptionnelle lors d’un meeting tenu par Tidjane Thiam, où le rassemblement avait pu réunir des milliers de militants et sympathisants de diverses localités de la région de Nawa, située dans le sud-ouest ivoirien.
Il avait déclaré que « la gouvernance ne consiste pas seulement à être fier d’être élu ou de rester au pouvoir, mais plutôt, avant tout, à apporter des solutions concrètes aux préoccupations et aux souffrances des personnes qui ont voté pour nous ». Il a souligné également que « la vie quotidienne des Ivoiriens est extrêmement difficile, et ils font face à des défis importants et à de sérieuses difficultés pour prendre soin de leurs familles », sous les applaudissements des militants.
Thiam avait souligné entre-autres que « la faiblesse des ventes des produits agricoles, la pauvreté croissante des populations rurales et des agriculteurs, ainsi que la montée des eaux pendant la saison des pluies dans les villes, notamment à Abidjan ».
Il avait ensuite dénoncé les expulsions menées à Abidjan: « sans humanité ni compassion, le coût toujours croissant de l’électricité pour les ménages et les entreprises, la hausse du coût de la vie et l’endettement massif qui met en péril l’avenir du pays ».
Thiam a poursuivi ses meetings, en lançant des appels à tous les Ivoiriens: « Il faut que tous les Ivoiriens en âge de voter s’inscrivent sur les listes électorales pour gagner l’élection présidentielle de 2025 », exhortant ses militants à enregistrer leurs pièces d’identité. Il a ajouté: « C’est le vote qui permettra de construire les écoles qui nous manquent, les routes et les hôpitaux dont nous avons besoin, et les médecins qui nous manquent. »
Il a tenu à préciser que: « C’est un bulletin de vote, pas une dépense, c’est un investissement dans votre avenir ».
« Pour relever ces défis, je vous demande, en tant que président du parti, de vous unir dès maintenant, militants du Parti démocratique de Côte d’Ivoire, d’aller partout, des villes aux campagnes, pour porter le message de notre grand parti à fin de voter massivement en notre faveur », a-t-il indiqué.
• Une étape importante dans la vie politique de Thiam
Se voulant plus explicite, Tidjane Thiam a confirmé dans un message vidéo adressé au peuple ivoirien et à tous ses partisans, que renoncer à sa nationalité française était « une étape importante et planifiée de longue date », soulignant que la mesure visait à garantir son éligibilité légale à se présenter.
Il a ajouté qu’il s’engage à œuvrer pour « un véritable changement en Côte d’Ivoire pour améliorer les conditions de vie des Ivoiriens ».
Selon lui, les prochaines élections présidentielles devraient être le théâtre d’une forte concurrence entre plusieurs candidats de premier plan, dont:
-/- l’ancien ministre du Commerce Jean-Louis Billon,
-/- l’ancien président Laurent Gbagbo, qui a dirigé le pays entre 2000 et 2011. Malgré sa condamnation qui le rend actuellement inéligible,
-/- l’ex-Première Dame, Simone Ehivet Gbagbo, qui a annoncé son intention de se présenter à l’élection présidentielle, compliquant encore davantage le paysage politique,
-/- l’ancien Premier ministre Pascal Affi N’Guessan, en poste de 2000 à 2003, comme candidat officiel, désigné par le parti « Front populaire ».
L’un des principaux défis est d’assurer une élection transparente et inclusive, afin d’éviter les tensions postélectorales qui ont marqué le passé du pays.
En revanche, le président actuel, Alassane Ouattara, n’a pas annoncé ses intentions concernant les prochaines élections. Mais en janvier, il a indiqué son désir de « continuer à servir son pays ».
Pour l’instant, Ouattara entretient le suspense, mais les pressions de son parti pourraient le pousser à officialiser sa candidature dans les mois à venir.
• Un intérêt international accordé aux prochaines élections
Compte tenu du rôle central de la Côte d’Ivoire en Afrique de l’Ouest, les organisations internationales et régionales suivent de près les prochaines élections.
Dans ce contexte, les Nations Unies et l’Union africaine ont appelé à un processus électoral transparent et pacifique, mettant en garde contre toute escalade qui pourrait ramener le pays à l’atmosphère tendue observée lors des élections précédentes.
La société civile, quant à elle, et les observateurs internationaux s’inquiètent d’un climat électoral délétère, notamment si la décision de radiation est maintenue, des manifestations ou des tensions sociales pourraient éclater.
Tidjane Thiam pourrait saisir la justice ivoirienne ou des instances régionales (CEDEAO, UA), et la communauté internationale, en particulier la France et l’Union européenn, suivra de près l’évolution du processus électoral.
En résumé, cette radiation s’inscrit dans un climat politique volatile en Côte d’Ivoire, où les élections de 2025 risquent d’être marquées par des tensions accrues entre pouvoir et opposition.
En conclusion, pour les proches de Thiam, qui estiment que c’est la première fois que l’article 48 est appliqué, cette radiation ne vise qu’à ralentir son ascension. Les responsables du PDCI ont déclaré que cette décision intervient à un moment où Thiam semble gagner du terrain, devenant même le coordinateur de la Coalition pour le changement pacifique, qui comprend plusieurs personnalités de l’opposition.
L’homme politique avait été élu « président du Parti démocrate en décembre 2023 avec 96,48 % des voix » et semble avoir réussi son retour au pays après une brillante carrière internationale.
Un sujet qui demeure en attente jusqu’au 25 octobre prochain…
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