Florence Richard et Baudelaire Mieu
Africa-Press – Côte d’Ivoire. Si le président Alassane Ouattara décidait de ne pas briguer un nouveau mandat à la présidentielle d’octobre 2025 – une hypothèse encore marginale – un nom revient avec insistance dans les cercles du pouvoir: celui de son vice-président, Tiémoko Meyliet Koné. Portrait d’un technocrate discret, influent sans être flamboyant, et dont la loyauté n’a jamais été prise en défaut.
Invisible, mais incontournable. Depuis sa nomination en avril 2022, mûrement réfléchie par Alassane Ouattara, Tiémoko Meyliet Koné incarne la sobriété. Pas d’interviews, pas de déclarations tapageuses. À 76 ans, l’ancien gouverneur de la BCEAO continue de fuir les caméras comme d’autres fuient le soleil. Son entourage résume sa ligne de conduite: « Je suis venu pour servir le président, pas pour faire de la politique. »
Et pourtant, en coulisses, le nom de Koné circule avec insistance comme potentiel dauphin en cas de retrait d’Ouattara. Officiellement, il n’en est rien. « Le vice-président nous dit toujours qu’il est en mission. Il fait son travail avec sérieux, sans arrière-pensée », confie un ministre. Au RHDP, beaucoup veulent croire à une nouvelle candidature d’Alassane Ouattara: « Il sera notre candidat, c’est une certitude à 100 % », martèle un cadre du parti.
Dans l’attente d’une annonce officielle – attendue mi-juillet – les spéculations vont bon train. Mais une chose est sûre: Tiémoko Meyliet Koné est au cœur du dispositif présidentiel. Chaque matin, il échange directement avec le chef de l’État. Entretiens téléphoniques, réunions au palais, briefings sur les dossiers sensibles… Le binôme présidentiel fonctionne à plein régime.
Contrairement à son prédécesseur Daniel Kablan Duncan, cantonné à un rôle protocolaire, Koné est devenu un acteur-clé du pouvoir, en particulier sur les questions économiques. C’est lui qui a piloté des dossiers majeurs comme la réforme du franc CFA, délestant les Premiers ministres successifs, d’abord Patrick Achi, aujourd’hui Robert Beugré Mambé.
Mai 2025 a été un mois révélateur de l’activisme discret du vice-président: Libreville pour l’investiture d’Oligui Nguema, Odienné pour l’inauguration d’une agence BCEAO, Abidjan pour l’Africa CEO Forum, une table ronde sur la nutrition, et des entretiens avec des ambassadeurs. Tourné vers l’extérieur, il incarne la continuité technocratique du régime.
Dans les coulisses de ces sommets, Koné retrouve d’anciens collègues de la BCEAO ou du FMI. L’homme connaît bien les rouages internationaux: il a été conseiller de Charles Konan Banny dans les années 1990, avant d’être lui-même gouverneur de la BCEAO de 2011 à 2022, un poste obtenu grâce à la confiance d’Alassane Ouattara.
L’histoire entre les deux hommes remonte aux années 1970. Tiémoko Meyliet Koné fréquente alors Balla Ouattara, frère cadet d’Alassane. Depuis, leur relation n’a cessé de se renforcer. Dans le sillage du président, Koné a gravi les échelons: directeur de cabinet de Guillaume Soro (2007–2010), ministre de la Construction, puis conseiller spécial à la présidence.
Originaire de Ferkessédougou (Tchologo) par son père et de Tarifé (Hambol) par sa mère, il reste solidement ancré dans le Nord, fief politique du RHDP. Il y possède des plantations, une résidence secondaire, et un complexe hôtelier. À Ferké, il garde des liens étroits avec Dossongui Koné, magnat de la finance, et Lassina Cardosi Koné, député et président de la commission Défense à l’Assemblée nationale. Il partage aussi une proximité forte avec Téné Birahima Ouattara, le frère cadet du président.
Quand il ne parcourt pas le pays, Tiémoko Meyliet Koné reçoit dans sa résidence de Beverly Hills, à Cocody. Ce quartier chic abrite aussi Kandia Camara, présidente du Sénat, et Patrick Achi. Sociable mais réservé, travailleur méticuleux, patriarche respecté, il dirige une famille discrète mais soudée.
Son avenir politique reste suspendu à une seule volonté: celle du président Ouattara. Sera-t-il propulsé dans la lumière ou demeurera-t-il dans l’ombre? Un membre du gouvernement conclut: « Personne ne peut prédire ce que décidera le président. Mais une chose est sûre: Tiémoko Meyliet Koné est prêt. »
Source: Jeune Afrique
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