Africa-Press – Côte d’Ivoire. Entré en vigueur le 1er janvier 2021 et signé par 54 pays (mais ratifié par seulement 44), le projet de la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf) commence à se concrétiser. Une première étape vers la libéralisation du commerce intracontinental tant attendue a enfin été franchie. Officiellement lancée le 7 octobre par le secrétariat de Zlecaf l’« initiative sur le commerce guidé » vise à faciliter les échanges libres sur 96 produits, dont le thé, le café, les produits bovins transformés, le sucre et les fruits secs.
Source de motivation pour les opérateurs commerciaux africains, le lancement du commerce guidé doit servir de préparation opérationnelle, juridique et institutionnelle au déploiement de plus grande ampleur d’ici à 2023 d’un volume de produits échangés trois fois plus important. Et ce, à mesure que le nombre de pays impliqués augmentera.
Cette initiative « symbolise le fait que la Zlecaf n’existe pas uniquement sur le papier, mais constitue une réalité. Nous passons ainsi de la parole et des négociations à l’action », s’est réjoui Alan Kyerematen, le ministre ghanéen du Commerce et de l’Industrie.
2 500 milliards de dollars de PIB
Selon le plan d’action de l’Union africaine (UA) pour la promotion du commerce intra-africain, seuls 10 % des échanges commerciaux se font entre pays d’Afrique, contre respectivement 60 %, 40 % et 30 % pour les pays d’Europe, d’Amérique du Nord et de l’Association des nations d’Asie du Sud-Est (Asean).
Avec un marché de 1,2 milliard de personnes et un PIB combiné de 2 500 milliards de dollars dans les 54 États membres, les analystes de l’UA estiment que conformément à son Agenda 2063, le commerce intrarégional pourrait atteindre au moins 33 % au cours de la prochaine décennie. Et d’ici à 15 ans, la Zlecaf prévoit la suppression de 90 % des taxes douanières sur les biens et les services.
Le 25 novembre, lors du sommet spécial de l’Union africaine à Niamey, le processus de mise en œuvre de la Zlecaf sera à l’ordre du jour, tout comme les questions de droit de propriété intellectuelle et d’investissements nécessaires.
Implication du secteur privé
En attendant, les promoteurs de l’initiative sur le commerce guidé, réunis à Accra au début d’octobre, veulent faire savoir que les choses commencent à prendre forme. De façon symbolique ou non, quelques jours avant la signature de ladite initiative, le Cameroun a délivré le tout premier certificat d’origine Zlecaf à ses produits à destination du Ghana.
L’ex-président du Niger, Mahamadou Issoufou, qui était également présent à la conférence, a annoncé un accord de 6 milliards de dollars entre la Zlecaf et Equity Group pour approfondir l’intégration économique en Afrique, tout en encourageant les entreprises privées opérant dans les domaines de l’alimentation et de l’agriculture, des industries extractives, de la fabrication et de la logistique, du commerce et des investissements, de l’impact social, de la santé et des investissements environnementaux, et de la technologie.
« Ce partenariat permettra, entre autres, de soutenir la création de 50 millions d’emplois d’ici à 2025, et 5 millions de PME recevront des prêts pour se développer, en utilisant les outils de la Zlecaf », a-t-il déclaré. Pour répondre aux contraintes logistiques auxquelles sont confrontés certains États membres, la Zlecaf a signé un accord avec les sociétés ghanéennes McDan Shipping et McDan Aviation pour le chargement et le transport de marchandises entre les pays membres. À cet égard, ces dernières mettront à disposition un avion-cargo et des navires de commerce maritime.
Manque d’engagement de certains États membres
Lors du lancement de l’initiative à Accra, le secrétaire général de la Zlecaf, Wamkele Mene, a déclaré que cet accord démontre la capacité du continent à s’engager dans la voie du commerce intra-africain, tout en ajoutant que « cela ne sera pas facile ».
« Il y aura des désaccords, des désillusions et des revers économiques, mais notre détermination ne doit pas être mise à l’épreuve par les défis à venir, mais plutôt encouragée par notre engagement à sortir des millions d’Africains de la pauvreté et à faire en sorte que le commerce soit un instrument d’inclusion et de prospérité pour l’Afrique », a-t-il clamé.
Dans les faits, la mise en œuvre complète de la Zlecaf été confrontée à de nombreux défis, notamment au manque d’engagement de certains États membres, aux revers institutionnels et contraintes logistiques. Par exemple, jusqu’à présent, le transport d’un conteneur de thé destiné à l’exportation du Kenya vers le Ghana peut prendre jusqu’à six semaines.
« Nous devons nous assurer que tous nos pays disposent des structures institutionnelles et du programme d’action pour soutenir les entrepreneurs afin qu’ils puissent produire et commercer. Nous devons également disposer du soutien logistique nécessaire pour acheminer les marchandises d’un pays à l’autre », a déclaré Alan Kyerematen, tout en soulignant que des efforts doivent être faits pour que davantage de pays adhèrent à l’initiative afin d’en assurer le succès. Et de ponctuer : « [Avoir] huit pays [à l’essai] sur les 44 qui ont ratifié l’accord commercial ne devrait pas nous satisfaire. Il devrait être possible pour tous les États membres de participer aux échanges. »
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