Arrêts CADHP Gbagbo Soro et crédibilité judiciaire

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Arrêts CADHP Gbagbo Soro et crédibilité judiciaire
Arrêts CADHP Gbagbo Soro et crédibilité judiciaire

Africa-Press – Côte d’Ivoire. La Cour africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP) a rendu, le jeudi 26 juin 2025, ses décisions définitives dans deux affaires très attendues: Laurent Gbagbo ancien président de la République de Côte d’Ivoire et Guillaume Soro ancien premier ministre. Contrairement aux attentes de leurs partisans, la juridiction africaine n’a retenu aucune violation des droits civils et politiques à l’encontre de l’État ivoirien. Ces arrêts viennent clarifier plusieurs années de débats juridiques et de confusion autour des décisions provisoires prises en 2020.

Les deux requêtes remontent à 2020, dans un contexte électoral tendu. Laurent Gbagbo contestait sa condamnation à 20 ans de prison pour détournement de deniers publics et sa radiation subséquente de la liste électorale. Guillaume Soro, quant à lui, dénonçait le mandat d’arrêt lancé contre lui, ainsi que ceux émis contre certains de ses proches.

La Cour avait alors prononcé des mesures provisoires, demandant à l’État de garantir certains droits en vue de l’élection présidentielle d’octobre 2020. Ces décisions avaient été interprétées par certains comme des condamnations définitives de l’État ivoirien, ce qui n’était juridiquement pas fondé.

La CADHP a finalement débouté les deux requérants dans ses arrêts rendus le 26 juin 2025.

Concernant Laurent Gbagbo, la Cour a jugé que l’État de Côte d’Ivoire n’a violé aucun de ses droits, tant sur le plan de sa condamnation pénale que de sa radiation électorale. La Commission électorale indépendante (CEI) a, selon la Cour, simplement tiré les conséquences d’une décision judiciaire antérieure. Aucun manquement aux principes de la défense, à la présomption d’innocence ni au droit de participation politique n’a été constaté.

S’agissant de Guillaume Soro, la Cour a estimé que sa requête était irrecevable, faute d’avoir épuisé les voies de recours internes. Dès lors, elle n’a pas examiné le fond de l’affaire, conformément à son règlement qui exige le respect strict de la condition d’épuisement préalable.

Pour le Dr Guibessongui N’Datien Séverin, ces arrêts mettent fin à une confusion juridique alimentée depuis 2020.

« On ne peut se prévaloir des décisions provisoires de la Cour comme si elles étaient définitives. Ces mesures visent uniquement à prévenir un préjudice irréparable en attendant l’examen du fond. Seules les décisions rendues au fond ont autorité de chose jugée », explique-t-il.

Il précise également que ces arrêts confirment la régularité des procédures nationales, tant sur le plan judiciaire qu’administratif, et renforcent la légitimité des décisions prises par les autorités ivoiriennes.

« Ces arrêts signifient clairement que l’État ivoirien n’a violé aucun droit reconnu par la Charte africaine. Cela constitue un signal important pour la crédibilité de notre système judiciaire. »

Depuis le 28 avril 2021, la Côte d’Ivoire a officiellement retiré sa déclaration de compétence permettant aux individus et aux ONG nationales de saisir directement la Cour africaine, conformément à l’article 34(6) du Protocole à la Charte africaine.

Le Dr Guibessongui tient à corriger un malentendu courant.

« Parler de retrait de la Côte d’Ivoire de la Cour africaine est un abus de langage. L’État reste membre de la Cour et de la Charte africaine des droits de l’homme. Il a simplement retiré la possibilité pour les citoyens et les organisations de la société civile ivoirienne de saisir directement la Cour. »

Ce retrait n’affecte pas les affaires engagées avant cette date, comme celles de MM. Gbagbo et Soro, que la Cour était tenue de traiter jusqu’à leur conclusion.

Avec ces décisions définitives, la CADHP met un terme à deux dossiers qui ont alimenté le débat politique et juridique en Côte d’Ivoire depuis cinq ans.

En déboutant Laurent Gbagbo et Guillaume Soro, la Cour conforte les institutions nationales dans la gestion des affaires judiciaires et électorales. Ces arrêts pourraient aussi servir de base à une meilleure pédagogie du droit auprès de l’opinion publique, souvent mal informée sur la portée réelle des décisions internationales.

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