Envie de solitude lors de la maladie

1
Envie de solitude lors de la maladie
Envie de solitude lors de la maladie

Africa-Press – Côte d’Ivoire. Je vais devoir annuler pour ce soir, vraiment désolé ! » L’humain, comme bon nombre d’animaux, a tendance à vouloir s’isoler socialement lorsqu’il est malade. On pourrait penser qu’il s’agit d’un réflexe « pour être tranquille » ou que ce comportement découle de notre caractère. Mais une étude publiée dans la revue Cell révèle qu’il s’agit en réalité d’un processus biologique déclenché par le système immunitaire. Celle qui nous ordonne de nous reposer, seul sur notre canapé, c’est l’interleukine 1 bêta.

Les interleukines sont des petites molécules produites par le système immunitaire. Elles agissent comme des messages chimiques pour envoyer des instructions, comme activer ou calmer la réponse immunitaire, déclencher l’inflammation ou réparer les tissus. Selon cette nouvelle recherche, l’interleukine 1 bêta, elle, est sécrétée dès que nous sommes malades. « Elle est l’un des premiers intervenants du système immunitaire lors d’une infection. Bien qu’elle aide à coordonner la défense de l’organisme contre les agents pathogènes, notre étude a montré qu’elle sert également de signal pour le cerveau, l’informant que le corps est malade et déclenchant des changements comportementaux adaptés », explique le professeur Gloria Choi, neuroscientifique au MIT (Etats-Unis), qui signe ces travaux.

La molécule se rend alors jusque dans le cerveau, où elle se lie à des récepteurs situés sur nos neurones (les IL-1R1). Or ces récepteurs se trouvent sur une zone appelée le noyau du raphé dorsal, une région du cerveau impliquée dans la régulation de l’humeur et de la motivation sociale. « Lorsque ces neurones sont activés, les animaux se retirent des interactions sociales », détaille le Pr Choi. Et c’est la même chose chez l’humain. « L’interleukine 1 bêta semble reprogrammer l’état motivationnel social du cerveau, réduisant l’envie d’interagir socialement tout en favorisant le repos et la récupération. »

Rester au lit, un réflexe évolutif?

Nous pourrions avoir adopté ce réflexe afin de « préserver l’espèce. » « D’un point de vue évolutif, ce comportement a probablement émergé parce qu’il offre un avantage évident: réduire le risque de transmettre des agents pathogènes aux autres. Ce que nous montrons, c’est qu’il ne s’agit pas simplement de « se sentir malade ou asocial », mais d’un programme biologique profondément conservé, inscrit dans les circuits du cerveau », explique la chercheuse.

Selon elle, une infection est énergétiquement exigeante. En supprimant l’activité sociale, l’exploration et l’alimentation, le corps réalloue son énergie vers la défense immunitaire et la réparation des tissus. Une sorte de « compromis » mis en place durant notre évolution. Cette théorie ne fait toutefois pas l’unanimité. Pas même au sein de l’équipe qui publie ces travaux. Le Pr Huh, spécialisé en immunologie à Harvard, ne souscrit pas à « cette hypothèse de « réserve d’énergie ». Nous vivons dans un monde de nutrition excessive. J’ai du mal à imaginer que nous ayons besoin d’économiser de l’énergie pour lutter plus efficacement contre une infection. Nous avons déjà énormément d’énergie dans notre corps ! »

Simple rhume ou maladie grave, même réflexe

Ce réflexe n’est pas uniquement déclenché pour des maladies « bénignes » pour la plupart d’entre nous (comme le rhume, la grippe ou la gastro-entérite): il l’est en réalité pour toutes sortes de pathologies, même les plus graves. « L’interleukine 1 bêta est produite dès que le système immunitaire détecte une infection ou des dommages tissulaires ; elle peut donc apparaître lors de situations allant d’un simple rhume à un état inflammatoire plus sévère », poursuivent les auteurs. Ils supposent que l’ampleur de son impact sur le comportement dépend de l’intensité et de la durée de l’activation immunitaire. « Dans nos expériences, nous avons modélisé la phase aiguë de la maladie, lorsque les niveaux d’interleukine 1 bêta augmentent de façon transitoire et entraînent un retrait comportemental via des circuits neuronaux définis. »

Une fois la menace écartée, le système immunitaire possède aussi les mécanismes capables d’éteindre ces réponses. Une autre interleukine (IL-10), à l’action anti-inflammatoire, est cette fois chargée de réinitialiser ces circuits cérébraux. Remis sur pied, cette « mini hibernation » touche alors à sa fin. Les activités sociales reprennent… jusqu’aux prochains symptômes.

Pour plus d’informations et d’analyses sur la Côte d’Ivoire, suivez Africa-Press

LAISSER UN COMMENTAIRE

Please enter your comment!
Please enter your name here