Africa-Press – Côte d’Ivoire. C’est une question fascinante: comment les oiseaux se comportent-ils lors d’une éclipse totale de Soleil ? Plusieurs données indiquent qu’ils s’arrêtent de chanter et qu’ils adoptent un comportement nocturne en se perchant. Mais elles souffrent de plusieurs biais, notamment d’une présence humaine qui peut se révéler perturbatrice (pétards, cris…). Des études ont, quant à elles, indiqué que le chant diminuait mais ne s’arrêtait jamais totalement.
Le 8 avril 2024, une éclipse de Soleil a plongé une partie de l’Amérique dans le noir en traversant le Mexique, les États-Unis et le Canada. Une occasion unique – les éclipses solaires totales sont rares – pour les chercheurs de mieux comprendre la réponse comportementale des oiseaux grâce à un protocole solide. Leurs résultats ont été publiés un an, jour pour jour, après l’éclipse, le 8 avril 2025, dans la revue Scientific Reports.
Un dispositif basé sur l’intelligence artificielle
Pour obtenir une éclipse solaire, il faut un parfait alignement entre le Soleil, la Lune et la Terre. Autre requis pour une éclipse totale: une distance idéale afin que les disques du Soleil et de la Lune se superposent parfaitement pour les observateurs sur Terre.
Mais une éclipse, ce n’est pas seulement l’obscurité. « Lorsque la Lune bloque les rayons chauffants du Soleil, l’humidité relative augmente, les températures de l’air chutent de 1,5 °C avec un obscurcissement solaire de 97 % et jusqu’à 7 °C pendant la totalité » de l’éclipse, rappellent les auteurs de cette nouvelle étude, qui officient au Cornell Lab of Ornithology et à l’entreprise Loggerhead Instruments, spécialiste des outils de surveillance de la nature.
En effet, pour cette étude, les scientifiques se sont basés sur les données recueillies par 344 dispositifs de surveillance acoustique communautaires, des outils baptisés Haikubox. Il s’agit d’une sorte de boîte de la taille d’une main, connectée au Wi-Fi et capable d’identifier les oiseaux grâce à une branche de l’intelligence artificielle baptisée « apprentissage automatique ». « Lorsqu’un particulier achète et installe une Haikubox près de chez lui, celle-ci se connecte au système Haikubox et commence à identifier acoustiquement les oiseaux », expliquent les chercheurs.
Les Haikubox sont aussi capables de détecter une présence humaine. Ainsi, si une forte présence anthropique a été enregistrée durant l’éclipse, alors ces données ont été exclues de l’étude. Cette dernière est ainsi la première, à l’échelle continentale, à prendre en compte cet important biais.
Des réactions très variables
Pour les oiseaux situés à des endroits où l’obscurcissement était de plus de 99 %, « une augmentation du taux de vocalisation a été détectée 10 à 30 minutes avant l’obscurcissement maximal, suivie d’une diminution du taux de vocalisation au pic de l’éclipse », relate l’étude. Cela a par exemple été le cas pour des tarins des pins sur un site d’étude.
Avec cependant d’étranges exceptions. Ainsi, un merle d’Amérique a chanté durant l’éclipse totale, si bien qu’on entendait que lui dans la zone. Quant aux mésanges à tête noire, sur un site d’étude elles ont vocalisé après le pic d’obscurcissement alors que sur un second site, elles ont vocalisé durant le pic. Sinon, dans de nombreuses localités où l’obscurcissement était inférieur à 99%, les oiseaux n’ont quasiment pas changé leurs vocalisations.
« La variabilité des réactions des oiseaux et les différences entre les sites étaient fascinantes, remarque dans un communiqué David Mann, co-auteur de l’étude et créateur de la Haikubox. Nous ignorons vraiment pourquoi les oiseaux ont réagi de manière si différente à l’obscurité totale pendant l’éclipse. Malgré l’examen de facteurs comme la température, la nébulosité et la vitesse du vent, nous n’avons trouvé aucune corrélation significative avec les variations de vocalisation. »
Cette étude permet d’apporter un début de réponse, même si ce n’était pas forcément celle attendue: les vocalisations des oiseaux soumis à une éclipse totale sont hautement variables. Il n’y a pas de réaction sonore universelle, même pas au sein d’une même espèce. Cependant, cette étude ne prenait pas en compte d’autres comportements, comme les déplacements, le lissage des plumes… La différence était peut-être cachée par l’obscurité.
Pour plus d’informations et d’analyses sur la Côte d’Ivoire, suivez Africa-Press
