Un lien entre écrans et maladies mentales chez les enfants ? C’est plus compliqué que cela…

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Un lien entre écrans et maladies mentales chez les enfants ? C’est plus compliqué que cela...
Un lien entre écrans et maladies mentales chez les enfants ? C’est plus compliqué que cela...

Africa-Press – Côte d’Ivoire. Le temps d’écran chez les enfants fait l’objet de nombreuses études. La recherche tente entre autres de savoir si ces heures passées à regarder la télévision ou une tablette peuvent nuire à leur bon développement.

Cette fois, une large étude menée sur 16.000 participants a voulu savoir si les écrans pouvaient aussi entraîner des maladies mentales chez les plus jeunes. Ces travaux menés en Chine sur des petits de 3 à 6 ans ont expertisé la façon dont les enfants, âge par âge, consomment les écrans (des programmes qui leur sont destinés, des jeux vidéo, des réseaux sociaux ?). Les chercheurs se sont aussi intéressés à l’impact de ces habitudes sur leur bien-être psychologique.

L’importance du programme regardé

C’est la première fois que l’impact de différents types de programmes est observé sur les plus jeunes. « On voit que la répartition change avec l’âge. L’enfant consomme d’abord plutôt des programmes éducatifs qui lui sont destinés. Puis, plus il grandit, plus il se tourne vers les jeux vidéo et les réseaux sociaux. Cela nous apprend aussi que les programmes éducatifs ne présentent pas une association forte avec des problèmes de santé mentale tandis que les autres, oui. C’est l’enseignement principal de ces travaux », commente le Dr Jonathan Bernard, chercheur à l’Inserm et spécialiste des effets des écrans sur les enfants.

En effet, dans ces travaux publiés par le JAMA Pediatrics, l’exposition aux programmes éducatifs était liée à un faible risque pour la santé mentale. En revanche, les programmes destinés aux adultes avaient un impact négatif sur le bien-être psychologique des enfants.

Par ailleurs, peu importe la nature des programmes, plus l’enfant passe de temps devant un écran et plus le lien avec des problèmes de santé mentale est accru. « Nous recommandons de limiter le temps devant l’écran des enfants, de prioriser des programmes éducatifs et d’éviter des programmes qui ne leurs sont pas directement destinés », concluent les auteurs.

Le bien-être psychologique ou santé mentale

Mais ces travaux – présentant quelques faiblesses – sont à prendre avec des pincettes. Premier écueil, ce sont les parents qui renseignent le temps d’écran et le comportement de l’enfant. Impossible de faire autrement pour suivre 16.000 enfants 24 heures sur 24. Mais cela implique de légers biais.

« Par ailleurs, on parle de santé mentale mais le concept reste assez flou. Il faudrait plutôt parler là de « bien être psychologique ». Il ne s’agit pas là de cas cliniques souffrant de bipolarité ou de schizophrénie. De quoi parle-t-on alors ? D’inattention, d’extériorisation, d’hyperactivité, de régulation des émotions ? Les auteurs ne répondent pas à la question. Ils suggèrent seulement que les enfants hyperactifs souhaitent être calmés avec des dessins animés mais disent ne pas avoir la capacité de mesurer ce comportement », comment le Dr Bernard.

Point fort de l’étude, les auteurs ont pu prendre en compte les revenus familiaux, le niveau d’éducation, le statut marital, la présence de frères et sœurs, le mode de garde afin de ne pas biaiser les résultats. « Mais ce qui n’a pas été pris en compte, ce sont les interactions au cœur de la famille entre les parents et les enfants. Il n’existe pas beaucoup d’échelles pour mesurer comment un parent s’occupe de son enfant. Nous avons choisi de demander aux parents à quelle fréquence et quels types de jeux ils ont avec leurs enfants : raconter une histoire, faire un peu de sport, chanter ensemble. Cumulé, cela donne une indication sur l’investissement parental », explique Jonathan Bernard.

Finalement, les autres facteurs sous-jacents du milieu familial, comme l’aisance financière ou le capital culturel, même mesurés façon imparfaite, viennent corriger très fortement les observations faites autour des écrans.

« Accompagner l’enfant dans toute sa vie »

Finalement, le lien direct avec l’exposition aux écrans reste assez modeste selon le chercheur Serge Tisseron, à l’origine de la méthode « 3-6-9-12 » pour apprivoiser les écrans durant l’enfance, en adaptant leur consommation à chaque âge de la vie. « Je ne suis pas étonné. On sait déjà que plus l’enfant regarde la télévision et plus son QI est bas. Pourquoi ? Parce qu’il est complètement isolé devant l’écran. Il n’est plus dans le contexte social d’un parent disponible pour jouer. »

Récemment, la cohorte française Elfe a évalué les associations entre utilisation d’écran et développement cognitif dans la petite enfance. Il a été observé qu’aux âges de trois ans et cinq ans et demi, le temps d’exposition aux écrans était associé à de moins bons scores de développement cognitif global, surtout dans les domaines de la motricité fine, du langage et de l’autonomie.

Mais en prenant en compte les facteurs liés au contexte social, périnatal, familial et aux habitudes de vie, l’impact négatif des écrans était bien plus faible. Par exemple, si deux enfants regardent autant la télévision l’un que l’autre, celui qui lit beaucoup en plus de ça aura un meilleur développement cognitif que celui qui lit peu.

« En réalité, l’impact de l’écran est minime. Il n’est pas nul mais ce n’est pas alarmiste. Ce que nous montrent ces résultats, c’est qu’il faut accompagner l’enfant et avoir une place dans sa vie », conclut Serge Tisseron.

Au-delà de l’influence du niveau de vie, c’est surtout la façon dont les parents s’occupent des enfants qui aura une influence sur eux. Des facteurs familiaux que seules peu d’études arrivent à intégrer dans leurs résultats.

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