L’Avenir Se Fabrique Ici: Éloge Du Patriotisme Économique

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L'Avenir Se Fabrique Ici: Éloge Du Patriotisme Économique
L'Avenir Se Fabrique Ici: Éloge Du Patriotisme Économique

Africa-Press – Djibouti. On évoque sans cesse notre pays à travers une série de clichés réconfortants: ses ports étincelants, ses corridors stratégiques, ses alliances avec les grandes puissances. On affiche fièrement nos terminaux, nos bases, nos routes débordantes de conteneurs, comme si toute la destinée de Djibouti se jouait uniquement sur ces quais d’où débarquent les géants des mers. Cette image a de quoi flatter l’ego national; elle fait rêver, elle inspire même parfois une certaine fierté. Pourtant, à force de rester fascinés par cette vitrine spectaculaire, on oublie trop souvent ce qui s’édifie en coulisses, dans l’ombre, là où bat véritablement le cœur de notre économie et où se joue, à bas bruit mais avec force, notre avenir collectif.

Car c’est justement là, loin des projecteurs et des discours officiels, que s’écrit une histoire autrement plus déterminante: celle d’une économie du courage, forgée non pas dans les chiffres ronflants des bilans ni dans le tonnage des cargos, mais dans la ténacité des mains calleuses, dans la persévérance de jeunes qui refusent d’abandonner, dans la force tranquille de rêves qui s’accrochent et refusent de s’éteindre malgré les vents contraires. Cette économie du quotidien, discrète mais résolue, construit patiemment le socle de notre indépendance véritable.

Regardez autour de vous, mais faites-le vraiment, avec attention et curiosité, non plus comme un simple passant mais comme un citoyen désireux de comprendre et d’agir. Dans chaque grande artère de la capitale, comme dans les zones les plus discrètes, des jeunes se lèvent chaque matin avec la détermination d’arracher leur avenir au destin.

Certains ont démarré un lave-auto, une audace qui force le respect. D’autres ont ouvert des fast-foods où ils réinventent des plats connus de tous, prouvant que la créativité n’a rien à envier aux grandes franchises étrangères. Il y a ceux qui se sont lancés dans la fabrication de savons artisanaux tel ce “Petit Nomade” devenu emblème de l’ingéniosité djiboutienne ou encore ceux qui confectionnent des pâtisseries raffinées, comme à K la Gourmande, où chaque gâteau respire la patience, la passion et l’excellence du travail bien fait.

Tous ces entrepreneurs partagent un choix radical, courageux: dire non à la dépendance, non à la complainte, non à l’attente passive d’une solution venue d’ailleurs. Ils ont décidé de se prendre en main, de transformer une idée en gagne-pain, puis en projet, et peut-être, avec persévérance, en véritable industrie demain. Ils ont accepté de s’élancer sans filet, sans garantie, dans un environnement parfois hostile, mais avec l’espoir chevillé au corps.

La vraie question, celle que l’on esquive trop souvent, c’est: et nous, que faisons-nous de ce courage? Comment choisissons-nous de participer, ou non, à cette transformation silencieuse qui pourrait devenir l’un des moteurs de notre prospérité commune? Sommes-nous de simples spectateurs, ou bien des acteurs conscients de la construction nationale?

Le patriotisme, ce n’est pas seulement saluer un drapeau ou entonner l’hymne national le 27 juin. Le véritable patriotisme, celui qui façonne un pays solide et résilient, s’incarne dans les gestes les plus simples du quotidien. Choisir d’acheter un savon local plutôt qu’un produit importé, faire laver sa voiture chez le jeune du quartier plutôt que dans une grande enseigne qui ne réinvestira ni ici, ni dans l’avenir de nos enfants, voilà des actes de patriotisme économique.

Miser sur notre avenir collectif

Chaque franc djiboutien dépensé est un bulletin de vote économique, un signal fort sur la société que nous voulons bâtir, sur la confiance que nous plaçons en nous-mêmes ou sur notre préférence à enrichir d’autres horizons.

Privilégier une entreprise locale, ce n’est pas faire la charité ni se résigner à moins bien. C’est miser sur notre avenir collectif, sur la montée en compétence et la création de valeur ici, chez nous. Acheter du savon artisanal, c’est envoyer à un jeune le message: “Continue, tu as trouvé ta voie, et demain tu iras encore plus loin.” Commander un gâteau chez une pâtissière du quartier, c’est reconnaître la valeur d’un métier, c’est encourager l’excellence et le savoir-faire. Faire laver sa voiture auprès de ces nouveaux entrepreneurs, c’est offrir à un travailleur la reconnaissance qui nourrit la dignité et la fierté.

Il est temps de cesser de voir ces petites entreprises comme de simples solutions de survie ou des réponses provisoires à l’absence d’emplois publics. Elles sont bien plus que cela: ce sont les pépinières de notre futur secteur privé, les racines de notre indépendance économique, les premiers maillons d’une chaîne de valeur qui ne demande qu’à grandir et se fortifier. Mais même la graine la plus vigoureuse meurt si personne ne l’arrose ; même l’entreprise la mieux pensée s’étouffe sans la confiance et le soutien de sa communauté.

C’est pourquoi il nous faut changer de regard et d’habitudes, devenir des consommateurs engagés, des clients patriotes. Pas par repli sur soi, mais parce que nous comprenons où se joue réellement notre avenir. Si nous ne faisons pas confiance à nos jeunes, si nous ne croyons pas en nos propres forces, qui le fera à notre place? Le talent, l’énergie, l’inventivité dont Djibouti a besoin sont déjà là, présents dans nos rues, nos ateliers improvisés, nos cuisines, nos idées. Il est temps d’arrêter de chercher ailleurs ce que nous avons sous les yeux, de valoriser ce qui germe et grandit ici.

En soutenant ces entrepreneurs, en privilégiant les produits et services locaux, nous ne faisons pas que faire tourner leurs affaires. Nous consolidons les fondations d’un Djibouti debout, fier, audacieux, qui ose croire en lui-même et investir dans l’avenir de ses enfants. Nous participons à la création d’emplois, à la transmission de savoir-faire, à la construction d’une économie résiliente, moins vulnérable aux aléas extérieurs.

Alors, soyons cohérents avec nos ambitions et nos discours: consommons djiboutien. Par fierté, par dignité, par ambition, mais aussi par lucidité. Parce que l’avenir d’un pays ne se joue pas seulement dans ses ports ou dans les décisions de ses partenaires étrangers, mais dans le courage et la solidarité de ses enfants, dans la confiance que nous plaçons en nous-mêmes, chaque jour, à travers nos choix les plus quotidiens. Ce sont ces gestes, multipliés des milliers de fois, qui feront émerger un Djibouti prospère, digne et maître de son destin.

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