La technologie au service des Africaines

6
La technologie au service des Africaines
La technologie au service des Africaines

Africa-Press – Djibouti. Les progrès en matière d’égalité homme-femme stagnent en Afrique subsaharienne depuis au moins deux ans. C’est ce que révèle le dernier indice d’inégalité de genre que les Nations unies ont créé pour évaluer les différences de traitement entre les sexes, ainsi que leur incidence sur le développement humain.

Nouvelle illustration de cette inégalité : la fracture numérique, qui, pour les femmes, se traduit par des difficultés d’accès aux technologies numériques. Or, n’en déplaise aux responsables politiques qui ne semblent pas s’en préoccuper, cette inégalité demeure un frein au progrès. Elle empêche notamment d’atteindre d’ici à 2030 les Objectifs de développement durable (ODD) définis par les Nations unies. Selon l’ONU Femmes, cette exclusion a réduit le PIB des pays à revenu faible ou intermédiaire de 1 milliard de dollars au cours de la dernière décennie. Et ce chiffre pourrait atteindre 1,5 milliard d’ici à 2025.

Quatrième révolution industrielle

Le décalage entre la rapidité de la transformation numérique et la faiblesse du pourcentage de femmes qui y contribuent, en particulier en Afrique, révèle à quel point il y a urgence à agir. Les femmes ne représentent qu’environ 30% de la main-d’œuvre du continent dans le domaine des sciences, de la technologie, de l’ingénierie et des mathématiques. Elles sont, par ailleurs, moins susceptibles que les hommes d’avoir accès à un téléphone mobile, à un smartphone ou à internet, et a fortiori de les utiliser.

Parce qu’elles offrent d’immenses possibilités d’innovation, qui elles-mêmes permettent de relever les défis humains et économiques auxquels l’Afrique est confrontée, les technologies numériques sont un moteur important de la quatrième révolution industrielle (4RI). Les technologies de l’information et de la communication (TIC) connaissent un essor sans précédent et s’imposent dans notre vie quotidienne – au travail, dans l’éducation, l’économie, etc. C’est par exemple grâce à elles que l’accord établissant la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf) permettra aux femmes de commercer au-delà des frontières, ce qui transformera considérablement la structure des échanges.

Malheureusement, cette transformation numérique risque aussi de perpétuer les schémas existants en matière d’égalité de genre si les femmes et les jeunes filles ne peuvent profiter de ses avantages et des emplois potentiels auxquels cette mutation ouvre la voie.

De surcroît, les technologies numériques peuvent constituer une menace sans précédent pour leur bien-être, les espaces en ligne étant de potentiels (et nouveaux) lieux de violence. Les femmes à responsabilité y sont davantage ciblées que les hommes, ce qui a un impact sur leur vie et limite leur participation à la vie publique. Une enquête menée auprès de femmes journalistes dans 125 pays a révélé que 73% d’entre elles avaient subi des violences en ligne dans le cadre de leur travail ; 30% ont reconnu s’être autocensurées par la suite.

Alphabétisation numérique

Nous appelons les gouvernements à garantir un espace numérique sûr pour les femmes. Cela passe par l’adoption de politiques protectrices. Celles-ci doivent comprendre des lois sur les violences en ligne à caractère sexiste, des formations destinées aux utilisateurs, aux services de sécurité et aux services juridiques. Nous appelons également les particuliers à faire preuve de respect dans l’espace numérique.

Afin de garantir l’inclusion des femmes et des jeunes filles, les dirigeants africains, les gouvernements et le secteur privé doivent favoriser leur accès aux nouvelles technologies. Ils doivent en particulier se pencher sur les problèmes d’alphabétisation numérique, d’accès à l’internet et de sécurité en ligne afin de leur permettre de pleinement participer à la vie politique, économique et sociale.

L’intégration de formations numériques au sein des programmes éducatifs, de l’école primaire jusqu’à l’accès à l’emploi, est un élément essentiel de ce processus d’inclusion. Nous appelons les dirigeants africains à avoir pour priorité la mise en œuvre de dispositifs destinés à doter les femmes des connaissances numériques, qui sont indispensables pour pouvoir fonder et développer une entreprise.

Même après avoir reçu une formation spécifique, les femmes n’ayant pas accès à internet ou à un téléphone mobile voient leur participation à l’espace numérique limitée. Selon l’Union internationale des télécommunications (UIT), en Afrique seulement 24% des utilisateurs d’internet sont des femmes, et 35% des hommes. Dans les zones rurales, seulement 15% de la population a accès à internet. L’utilisation des téléphones mobiles est elle aussi limitée, car entravée par des problèmes d’accessibilité, par des coupures d’électricité et par la subsistance de normes patriarcales.

Signaux positifs

Ces lacunes ont un impact sur l’autonomie financière des femmes. Des études réalisées sur le sujet indiquent que les comptes de mobile money sont devenus des instruments indispensables, et qu’ils donnent aux femmes une plus grande autonomie que les paiements en espèces. En Ouganda, par exemple, les femmes ayant reçu des prêts de microfinance numérique ont perçu des revenus 15% supérieurs à celles qui avaient reçu des prêts en espèces. Nous exhortons donc les gouvernements africains et le secteur privé à construire des infrastructures et à réglementer les marchés afin d’élargir l’accès des technologies aux jeunes filles et aux femmes, en particulier dans les zones reculées, sur les routes migratoires et dans les camps de réfugiés.

Il est essentiel d’encourager et de louer les initiatives des femmes dans les domaines technologiques, et d’y promouvoir leur leadership. L’initiative African Girls Can Code, conçue par l’ONU Femmes, la Commission de l’Union africaine et l’UIT, en est un parfait exemple. Elle consiste à doter les jeunes filles de compétences numériques en codage et en développement personnel. Des Africaines issues de 34 États du continent reçoivent une formation de programmeuse, de créatrice et de conceptrice. Elles sont ainsi sur la bonne voie pour entreprendre des études et des carrières dans les TIC et le codage, ce qui leur permettra par la suite d’influencer le paysage numérique de leurs pays respectifs.

La Coalition d’action sur la technologie et l’innovation, créée dans le cadre du Forum Génération Égalité, est elle aussi un projet important pour l’égalité des sexes. Elle vise à stimuler les mesures susceptibles de faire progresser l’égalité et à cimenter les alliances entre les gouvernements, le secteur privé, la société civile et le système des Nations unies pour concrétiser cette ambition. Le gouvernement du Rwanda en est l’un des leaders sur le continent.

Intelligence artificielle

Les conversations sur l’intelligence artificielle (IA) occupent elles aussi une place importante dans le discours mondial sur la santé. Il est donc crucial qu’elles ne perdent pas de vue l’objectif principal : veiller à ce que les infrastructures, les institutions, les systèmes et les réglementations technologiques soient conçus en faveur des femmes et populations des pays du Sud.

L’ONU Femmes et la Fondation Gates ont donné la priorité à l’innovation, à la technologie et aux données sur le genre, moteurs clés du changement pour parvenir à l’égalité des sexes et à réaliser les ODD. La technologie inclusive et l’éducation numérique sont des enjeux cruciaux pour l’avenir du continent. Chacun d’entre nous peut jouer un rôle : gouvernements, secteur privé et simples particuliers. Rejoignez-nous pour promouvoir l’innovation et la technologie afin que l’égalité numérique entre les femmes et les hommes devienne une réalité.

Pour plus d’informations et d’analyses sur la Djibouti, suivez Africa-Press

LAISSER UN COMMENTAIRE

Please enter your comment!
Please enter your name here