Mathieu Galtier
Africa-Press – Djibouti. La multinationale américaine compte sur un pouvoir d’attraction à grande échelle pour dominer un marché africain de l’intelligence artificielle en devenir, et mettre à distance son rival chinois Huawei.
La deuxième capitalisation boursière mondiale multiplie les partenariats avec les universités et les parcs d’innovation en Afrique. Nvidia, géant de la conception de puces électroniques qui pèse 3 536 milliards de dollars à la bourse de New York, veut que les futurs ingénieurs et entrepreneurs africains soient des utilisateurs nés de ses produits. Dernier exemple en date, la création en septembre d’un centre pour l’intelligence artificielle (IA) en Tunisie, au sein de Novation City, le pôle de compétitivité de Sousse dédié à la mécanique et l’électronique.
L’objectif est de « former 1 000 développeurs en un an », explique Anas Rochdi, directeur de l’innovation à Novation City. Soit 1 % des développeurs africains que Nvidia souhaite acclimater à ses technologies d’ici à trois ans, à travers son Deep Learning Institute (DLI, Institut d’apprentissage approfondi).
Convaincre en premier lieu les professionnels et les gouvernements
Des projets similaires au Kenya et au Nigeria montrent la volonté du groupe américain de mailler tout le continent. Fondé et dirigé par Jen-Hsun Huang, Nvidia a également signé un partenariat avec la Commission économique pour l’Afrique des Nations unies afin de fournir aux gouvernements et aux organisations de dix pays (Ghana, Kenya, Rwanda, Sénégal, Sierra Leone, Guinée, Mali, Nigéria, Somalie et Togo) un soutien et un enseignement technologique.
Les résidents de Novation City pourront se faire la main sur les serveurs Nvidia DGX et leur plateforme de gestion, qui permettent de transformer un centre de données (datacenter) en « usine d’intelligence artificielle », selon la société de Santa Clara, qui a réalisé 61 milliards de dollars de chiffre d’affaires en 2023. Car, au-delà de démocratiser le maniement de l’IA, la société californienne met à disposition des étudiants et des start-up africaines ses systèmes pour en faire des clients fidèles.
De nombreuses activités liées à l’IA voient le jour en Afrique de l’Ouest et du Nord, comme en témoignent le nombre de start-up créées et le nombre croissant de développeurs en IA entrant sur le marché du travail.
« L’Afrique est un marché émergent en progression rapide qui dispose d’un bassin important de jeunes talents versés dans la technologie. Dans le même temps, le continent a des opportunités et des défis uniques que l’IA peut aider à résoudre. Nous voulons nous engager auprès des start-up africaines, à travers Nvidia Inception, un programme mondial gratuit conçu pour aider les start-up et les développeurs », explique à Jeune Afrique, Susan Marshall, directrice senior, chargée des relations avec les développeurs chez Nvidia. La responsable considère l’Afrique de l’Ouest et du Nord comme des régions cibles, car « de nombreuses activités liées à l’IA voient le jour là-bas, comme en témoignent le nombre de start-up créées et le nombre croissant de développeurs d’IA entrant sur le marché du travail ».
Teraco et Ooredoo comme client pour concurrencer Huawei
La compétition fait rage avec la concurrence chinoise pour se positionner sur ce marché qui cherche à rattraper son retard. Selon l’édition 2023 de l’indice de préparation des gouvernements à l’IA publié par le cabinet de conseil Oxford Insights, l’île Maurice, pays africain le mieux préparé à l’adoption de l’intelligence artificielle, ne se classe que 61e.
Mais Nvidia connaît déjà quelques avancées. Il y a quelques mois, le sud-africain Teraco, l’un des principaux fournisseurs de colocation de centres de données en Afrique, a choisi la solution Nvidia DGX Systems pour ses infrastructures. La société qatarie de télécommunication Ooredoo, présente notamment en Algérie et en Tunisie, a également fait le choix de l’américain pour équiper en processeurs graphiques ses centres de données de la région Moyen-Orient et Afrique du Nord.
En septembre, United Bank for Africa s’est tournée en septembre vers le chinois Huawei pour un contrat de trois millions de dollars pour le stockage virtuel de 200 pétabytes de données et l’installation de solutions pour le cloud. Un mini-séisme, car le secteur bancaire nigérian était jusqu’ici une chasse gardée d’IBM. Au printemps, lors du Salon technologique Gitex Africa au Maroc, Huawei a ainsi dévoilé une série d’innovations liées au stockage de données utilisant l’IA pour séduire les clients africains.
Preuve que Nvidia ne veut pas laisser le continent à son concurrent, la société a refusé de révéler ses revenus et ses investissements en Afrique, et n’a pas non plus souhaité répondre au sujet de sa concurrence avec Huawei sur ce terrain. Mais en début d’année, la multinationale a nommé le groupe chinois comme son principal concurrent, notamment concernant les équipements liés à l’IA.
Source: JeuneAfrique
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