Africa-Press – Djibouti. À Talbragar, dans le sud-est de l’Australie, des paléontologues ont mis au jour les restes fossilisés d’un insecte vieux de 151 millions d’années. Il s’agit du plus ancien chironomidé connu, un groupe de moucherons non-piqueurs apparentés aux moustiques. Ces insectes, très présents aujourd’hui dans les milieux d’eau douce, jouent un rôle clé dans les écosystèmes aquatiques. Leur découverte dans un ancien lac apporte un éclairage inédit sur leur origine et sur la répartition des faunes d’eau douce à l’époque où les continents formaient encore le supercontinent Gondwana.
Une adaptation inédite pour un insecte d’eau douce
Baptisée Telmatomyia talbragarica (« la mouche des eaux stagnantes »), cette nouvelle espèce a été décrite à partir de six fossiles remarquablement bien conservés, comprenant à la fois des pupes (stade proche de celui de larve) et des adultes. L’équipe internationale, dirigée par Viktor Baranov, chercheur à la station biologique de Doñana en Espagne, qui l’a étudiée a mis en évidence la présence d’un disque terminal, un petit organe adhésif permettant de s’ancrer aux roches. « Ce mécanisme était jusqu’ici considéré comme propre aux espèces marines vivant en zone de marée », explique, dans un communiqué, le scientifique. « Or, les dépôts sédimentaires de Talbragar indiquent un environnement lacustre d’eau douce. Cela démontre une grande plasticité évolutive chez ces insectes ».
Cette découverte remet en cause plusieurs hypothèses sur l’origine du groupe. Les chironomidés, et plus précisément la sous-famille des podonominés à laquelle appartient Telmatomyia, sont aujourd’hui largement confinés à l’hémisphère sud. Leur distribution morcelée en Australie, en Nouvelle-Zélande, en Afrique du Sud et en Amérique du Sud correspond à celle des fragments de l’ancien Gondwana, dont la dislocation progressive aurait favorisé la spéciation par isolement géographique.
L’hémisphère sud, berceau oublié des chironomidés
Depuis les années 1960, les chercheurs s’interrogent sur la région d’origine des podonominés. Le Suédois Lars Brundin avait déjà proposé en 1966 une origine gondwanienne, avant que la découverte de fossiles plus anciens en Eurasie ne fasse pencher la balance vers une hypothèse nordique. L’étude publiée dans la revue Gondwana Research vient raviver ce débat en apportant la preuve la plus ancienne d’un chironomidé dans l’hémisphère sud.
Pour Matthew McCurry, de l’Université de Nouvelle-Galles du Sud (Australie), cette découverte souligne surtout un biais bien connu: « Nous trouvons et étudions beaucoup plus de fossiles dans l’hémisphère nord, ce qui déforme notre vision de l’évolution. En réalité, des lignées entières ont probablement émergé plus au sud », conclut-il.
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