Jeux Olympiques : derrière chaque performance sportive se cache un scientifique

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Jeux Olympiques : derrière chaque performance sportive se cache un scientifique
Jeux Olympiques : derrière chaque performance sportive se cache un scientifique

Africa-Press – Djibouti. Oxygénation, diététique, optimisation du mouvement, gestion de la force et de l’énergie, les performances des sportifs de niveau olympiques sont suivies par toute une batterie d’équipements de pointe.

Au Centre d’Aide à la Performance Sportive (CAPS) de l’Université Libre de Bruxelles (ULB), plusieurs scientifiques experts de ces questions suivent des athlètes de très haut niveau de façon à adapter leur programme de coaching.

L’alimentation du sportif de haut niveau, première brique vers les JO

“A un niveau de très haute performance, même un détail alimentaire peut jouer”, appuie Alain Carpentier, responsable de l’unité de recherche en biométrie et nutrition appliquée à l’exercice. Lui-même ex-athlète de saut en hauteur, ses équipes évaluent la composition corporelle des sportifs, leur programme alimentaire et les compléments alimentaires qu’ils ingèrent en fonction du sport pratiqué.

“Le sportif devra enregistrer tout ce qu’il mange en quantité et en qualité pendant une semaine pour faire son bilan complet, et faire des analyses d’urines pour suivre ses excrétions protéiques par dégradation des muscles”, précise-t-il. Pour se reconstituer, les muscles ont besoin de protéines que le sportif ingère dans sa nourriture ou par complément alimentaire. “Les protéines animales sont assimilées trois fois plus vite que les végétales, ce qui oblige à une vigilance particulière chez les sportifs végétariens”, ajoute Alain Carpentier.

Influx nerveux et commande musculaire, les deux facettes de la performance

Ses équipes font partie du CAPS de l’ULB, qui comprend les pôles métabolique, psychologique, biomécanique, isocinétisme et prévention lésionnelle, neuromusculaire et nutritionnel. “En passant du terrain au laboratoire, nous pouvons normaliser les efforts et standardiser la performance, puis modifier ces conditions sur un grand nombre de personnes pour récupérer des informations fiables en temps réel”, explique Stéphane Baudry, chercheur dans l’Unité de Recherche en Neurophysiologie Appliquée à l’ULB.

Dans son laboratoire, les chercheurs peuvent analyser les deux composantes neuromusculaires d’un mouvement performant: l’influx nerveux qui part du cerveau et son exécution par les muscles. “Dans un premier temps, le gain de performance provient plutôt de facteurs nerveux, puis avec un entraînement chronique de facteurs musculaires et nerveux ensemble”, précise Stéphane Baudry. La masse musculaire et l’élasticité des tendons, importants pour la performance sportive, sont disséquées par IRM ou échographie.

Les résultats doivent ensuite être rapportés aux caractéristiques de l’athlète et au sport pratiqué. “Plus le tendon est raide, plus il transmet la force au segment osseux”, explique Jacques Duchateau, de l’Unité d’enseignement en Théorie et Pratique de l’Éducation physique à l’ULB. Un tendon d’Achille raide bénéficiera par exemple plus pour le saut en hauteur, tandis que la course gagnera à plus de souplesse. Le skieur, dont le tendon d’Achille est préservé dans sa chaussure, aura en revanche un tendon rotulien particulièrement rigide tandis que celui du coureur de demi fond l’aura nettement plus souple.

Les scientifiques peuvent même repérer quels muscles fatiguent en premier et doivent donc être renforcés lors de l’entraînement de l’athlète. Pour cela, il ou elle est placée en conditions proches de la pratique réelle de son sport, tandis que l’activité musculaire est scrutée par électromyographie, via des électrodes placées sur la peau. “Cette technique a par exemple été utilisé sur des motards de Grand Prix. Elle a permis de voir que certains muscles des bras fatiguaient plus vite, de cibler la préparation pour les rendre plus résistants, par exemple lors des freinages”, illustre Stéphane Baudry.

Oxygène: consommer moins pour produire plus

Pour nourrir la performance musculaire, les athlètes doivent également optimiser leur système cardiovasculaire et donc leur apport en oxygène. “Le principal marqueur de la condition physique est la consommation maximale d’oxygène, aussi appelée VO2max”, soit le volume maximal d’oxygène que l’athlète est capable de consommer, explique Vitalie Faoro, professeure en Physiologie et Biomécanique du Mouvement à l’ULB.

“En s’entraînant, l’athlète peut augmenter cette VO2max et ainsi atteindre des performances supérieures pour un même niveau d’effort et de consommation d’oxygène.” Un athlète entraîné pourra ainsi atteindre une VO2max de 60 mL d’oxygène par minute et par kg, contre 40 pour un sportif régulier et 20 pour une personne sédentaire. En optimisant ensuite son mouvement pour économiser l’énergie dépensée, l’athlète pourra même continuer à améliorer sa performance, par ce que Vitalie Faoro appelle “l’économie du geste”. C’est notamment ce qui a valu à la marathonienne Paula Radcliffe de continuer à s’améliorer malgré une VO2max stable autour de 70 mL/min/kg.

Risques de blessures et usure du cœur, la santé des athlètes est surveillée

Une surperformance qui n’est pas sans risque. “Chez les athlètes, le cœur est plus gros et notamment le cœur droit chargé de l’expulsion du sang chargé en oxygène. Il faut les surveiller au long cours pour éviter les troubles cardiaques comme les troubles du rythme et la fibrillation ventriculaire”, pointe Vitalie Faoro. Les sports les plus à risque sont les sports d’endurance comme le cyclisme ou le football, illustre-t-elle.

De manière générale, la santé des athlètes de haut niveau est très surveillée, tant les risques de blessure sont importants. “A chaque pas en course à pied, le sol renvoie environ 2,5 fois le poids de la personne après impact”, affirme Véronique Feipel, vice-doyenne de la faculté des sciences de la motricité à l’ULB. La nature de la compétition change également la donne, avec cinq à dix fois plus de risque de fractures en finale en raison de la pression et de la fatigue générées. “La fatigue augmente le risque de lésion, ainsi que l’équipement, la nutrition, les antécédents de blessures”, énumère Véronique Feipel.

Alain Carpentier met particulièrement les sportifs en garde contre la déshydratation, la première cause de contre-performance. Logique, lorsqu’on sait que les muscles sont composés d’eau à 73%, contre 60% pour le corps entier. “Perdre 2% d’eau, c’est baisser ses performances de 5 à 10%”, avertit-il. Avec une hygiène de vie aussi stricte que celle que s’imposent les athlètes de haut niveau, il n’est pas si étonnant que 62% des sportifs développent des TCA (trouble des conduites alimentaires). Le poids ne doit cependant pas trop baisser. “Un poids insuffisant peut mener à des retards de croissance, blessures, affaiblissement du système immunitaire ou encore de la fatigue chronique”, énumère Alain Carpentier.

Chaque athlète est différent

Si l’entraînement ciblé permet de minimiser ces fragilités, l’équipement peut également jouer. “Nous utilisons par exemple des starting-blocks avec capteurs de force pour optimiser les départs”, révèle Jacques Duchateau. Au départ de la compétition elle-même, l’écartement et l’inclinaison des blocks et leur avancement derrière la ligne de départ peuvent également être modifiés, ajoute-t-il. “Une athlète avec une faible poussée et accélération et un temps de réaction long au signal du départ a ainsi obtenu un gain de 50 millisecondes de temps de réaction”, se souvient-il.

Une amélioration qui peut faire toute la différence. Le sauteur de haies Jonathan N’Senga est également devenu champion notamment en améliorant sa performance sur les départs, à l’aide d’une position des starting-blocks “que les spécialistes de l’athlétisme auraient trouvé douteuse, mais qui était la meilleure pour lui !”, conclut Jacques Duchateau.

A l’approche des compétitions, les deux à trois visites annuelles des athlètes dans les centres d’aides à la performance comme celui de l’ULB se font plus fréquentes et la finesse des tests augmentent. Aux Jeux Olympiques, “la moindre erreur peut coûter cher”, reconnait Alain Carpentier.

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