Africa-Press – Gabon. Après plus de vingt heures d’audition, la justice gabonaise a tranché. Ce jeudi 25 décembre 2025, l’ancien ministre du Tourisme Pascal Ogowé Sifon a été placé sous mandat de dépôt et écroué à la prison centrale de Libreville. Derrière cette décision lourde de sens se dessine un dossier tentaculaire, fait de projets emblématiques jamais réalisés, de circuits financiers opaques et de soupçons persistants de conflits d’intérêts. Une affaire qui dépasse le sort d’un homme et pose, une fois de plus, la question de la redevabilité au sommet de l’État, même s’il n’est pas encore condamné.
L’ancien ministre du Tourisme, Pascal Ogowé Sifon, a été placé sous mandat de dépôt et écroué ce jeudi 25 décembre 2025 à la prison centrale de Libreville, dite ‘Sans-Famille’, à l’issue d’une audition fleuve de plus de vingt heures. L’information, confirmée par l’un de ses avocats, consacre un basculement judiciaire lourd de symboles, tant pour l’homme que pour la gouvernance publique gabonaise.
Arrivé au Palais de justice mercredi à 16 heures, l’ex-membre du gouvernement a quitté les lieux ce jeudi 25 décembre aux environs de 14 heures, sous escorte. Selon un témoin présent au tribunal, où sa famille et de nombreux soutiens «faisaient le pied de grue depuis la veille», Pascal Ogowé Sifon se serait adressé aux siens en ces termes: «Je me suis battu jusqu’au bout… ça n’a pas marché. Soyez calmes». Une scène chargée d’émotion, contrastant avec la froideur de la décision judiciaire.
Cette incarcération intervient dans un contexte d’accusations documentées, largement détaillées par de nombreux canaux dont Médias 241 réputé proche des cercles du pouvoir, qui décrit un faisceau de dossiers marqués par des promesses publiques restées sans suite, des engagements financiers controversés et de lourds soupçons de conflits d’intérêts. Au centre des investigations figure le projet des six écolodges, présenté comme un levier de relance du tourisme durable, mais dont le bilan est implacable. «Il n’y a aujourd’hui ni fondations, ni bâtiments, ni même de site réellement aménagé», confiait une source du secteur citée par le même média.
Les enquêteurs s’intéressaient également à ce qu’ils qualifient de «concentration inhabituelle des pouvoirs financiers» autour de l’entourage familial et relationnel du ministre. Des documents bancaires feraient apparaître une gestion des flux impliquant principalement des proches, sur une enveloppe globale estimée à près de 10 milliards de FCFA. À cela s’ajoute la disparition présumée de 2,6 milliards de FCFA destinés au paiement de l’hôtel de Moanda, autre point central du dossier. L’affaire ravive enfin le souvenir de la controverse Cap-Caravane, révélée début 2025, déjà perçue comme un symbole de confusion entre intérêts publics et privés.
Ogowé Sifon n’a, à ce stade, fait l’objet d’aucune condamnation. Son placement sous mandat de dépôt relève d’une détention préventive, décidée dans le cadre de l’instruction en cours, alors qu’il était jusqu’ici présenté devant le juge d’instruction. Cette mesure vise à garantir la poursuite sereine des investigations, sans préjuger de l’issue judiciaire du dossier.
Il appartiendra désormais au juge d’instruction, à l’issue de ses investigations, de déterminer la juridiction compétente à laquelle le dossier sera transmis. Selon les éléments actuellement évoqués, une orientation vers la cour criminelle spécialisée est envisagée, sans que cette hypothèse ne préjuge ni de la qualification définitive des faits ni de la responsabilité pénale de l’intéressé. En droit, la présomption d’innocence demeure pleinement applicable jusqu’à une décision de justice devenue définitive.
Désormais incarcéré, Pascal Ogowé Sifon incarne, malgré lui, un moment de vérité judiciaire. Selon un magistrat, l’enjeu dépasse un homme: il s’agit de prouver que la redevabilité n’est plus un slogan, mais une pratique effective, observée bien au-delà des murs du tribunal.





