Africa-Press – Gabon. Dans cette seconde partie de l’entretien accordé à GabonReview, Edgar Mba Ognane Nguema écarte les zones d’ombre: aucun lien direct avec Gunvor, audit sous contrôle de la GOC, frontières claires entre mission industrielle et volonté politique. Sur fond de transition énergétique, le patron d’Assala défend une stratégie axée sur l’autonomie, la transparence et l’écologie responsable. Et trace, avec ambition, les contours d’un avenir gabonais porté par un opérateur national assumé.
GabonReview: Si monsieur le directeur général d’Assala peut affirmer et assurer qu’Assala se porte bien et que le climat social est stable, qu’en est-il de la relation financière avec vos partenaires? Notamment Gunvor. On parle de remboursements mensuels qui s’élèvent à 12 milliards de francs par mois qui, selon certaines sources, pèseraient lourdement sur l’équation économique d’Assala. Assala peut-elle réellement générer assez de cash flow pour être un actif rentable à court terme?
Edgar Mba Ognane Nguema: Merci pour cette question qui va permettre d’éclairer plusieurs de nos compatriotes, et même à l’extérieur du pays, sur la relation d’Assala avec Gunvor. Il n’y a pas de relation entre Assala et Gunvor. Gunvor a prêté de l’argent à la GOC pour que la GOC finance l’acquisition d’Assala. En réalité, la relation commerciale et contractuelle est entre Gunvor et la GOC. La GOC est la compagnie mère d’Assala.
Aujourd’hui, Assala, de par son activité, génère des dividendes qui sont payés à la société mère. Et la société mère en fait l’usage qu’elle souhaite et peut notamment couvrir ses emprunts et ses engagements extérieurs. Mais il n’y a pas de relation entre Gunvor et Assala.
Ce que je peux dire, par contre, c’est que jusqu’aujourd’hui, aucune traite n’a été manquée par la GOC dans son remboursement de la dette de Gunvor. Et qu’Assala est capable de générer assez de revenus aujourd’hui, assez de cash flow pour fonctionner normalement.
L’audit de KPMG lancé en août 2024 doit évaluer la transparence et la valeur réelle des actifs. Êtes-vous prêt à rendre public son rapport une fois finalisé? Et en cas de passif caché, quelles seraient les conséquences pour votre stratégie?
Précisons d’abord ce qu’était cet audit. Lorsqu’une compagnie rachète une autre, il est important pour elle d’établir exactement quels sont les niveaux de compte, les dépenses, les pratiques, les procédures précédant le rachat pour réaliser un état de lieux, comme vous l’avez dit. C’est une opération normale. Assala l’a fait lorsqu’elle a repris les actifs de Shell en 2017.
Aujourd’hui, la GOC rachète les participations de Carlyle. Elle a fait la même chose. Mais c’est un audit qui a été commandité par la GOC pour réellement établir ce qu’elle a acheté. Et donc les rapports de cet audit sont détenus par la GOC. Je suis certain que la GOC décidera de l’usage qu’il faut en faire. Mais c’est un document qui concerne la GOC d’une part, et la partie qui a cédé d’autre part, à savoir Carlyle.
L’État gabonais a affiché sa volonté d’utiliser Assala comme levier de politique publique, en finançant des projets sociaux, tels que des écoles, des infrastructures, j’en passe. Où placez-vous la frontière entre mission industrielle et mission de service public?
Assala est un opérateur pétrolier. Notre responsabilité, c’est de maximiser la valorisation des ressources pétrolières du pays et des ressources en hydrocarbures. Nous générons des résultats, nous contribuons à la vie économique du pays, j’en parlais tout à l’heure, directement ou indirectement, par nos charges et nos contrats pétroliers.
C’est cela notre rôle. Maintenant, une partie du rôle, aussi, qui est contractuel, c’est de financer, de payer notre quote-part, de ce qui est, par exemple, la paye des Provision pour investissements dans les hydrocarbures (PIH). Et l’État décide de son utilisation.
Donc oui, si l’État décide qu’il faut construire des écoles, des hôpitaux, et que c’est une partie de la paye des PIH légalement générée par Assala qui doit y contribuer, Cela fait partie de notre mission en tant qu’opérateur comme tous les autres opérateurs. Ce n’est pas spécifique à Assala.
Ce qui est important pour moi, ce sont les performances de l’entreprise, de ramener les dividendes à mon actionnaire qui est la GOC et de m’assurer que j’ai un climat social apaisé. Et pour le reste, en effet, l’État a racheté Assala pour des objectifs qui lui appartiennent et utilise les dividendes selon sa politique budgétaire qui n’est pas de mon ressort.
Dans un contexte de transition énergétique mondiale, comment Assala prépare-t-elle sa mutation vers un modèle plus durable, plus résilient? Et la question environnementale est-elle intégrée à votre stratégie industrielle?
La gestion des paramètres environnementaux, sociaux et tout ce qui relève de la gouvernance, donc ce qu’on appelle ESG, est au cœur de notre esprit. Ça fait partie de nos valeurs. Dans la manière dont nous opérons, nous voulons nous assurer que les communautés qui sont autour de nos opérations ou au milieu desquelles nous opérons se sentent pas laisées, se sentent valorisées, se sentent accompagnées.
Au niveau environnemental, nous avons un plan de réduction du torchage qui fait que d’ici 2030, selon nos plans aujourd’hui, Assala va arrêter le torchage opérationnel continu. Cela signifie que nous avons investi sur certains de nos champs pour pouvoir arriver à ce zéro flaring d’ici 2030. Et c’est un engagement concret envers l’environnement.
Vous avez certainement vu aussi, qu’il y a même une dizaine de jours, Assala a signé une convention avec le ministère de l’Environnement. Pourquoi? Une convention qui porte sur trois aspects. Premièrement, le renforcement des capacités du ministère de l’Environnement. Parce que c’est important que le ministère de l’Environnement soit capable de mener sa mission, non seulement dans notre domaine opératoire, mais aussi dans tout ce qui relève de leur mission.
Ensuite, nous avons une collaboration sur la surveillance environnementale autour de nos opérations. Asala ne se cache pas du fait que nous opérons dans des endroits qui sont pénibles, dont c’est une chance de les avoir à nos côtés. Un, pour voir si ce que nous faisons est bien. Également pour nous conseiller lorsqu’il faut conseiller. Et troisièmement, si jamais il y avait quelque chose qu’on faisait bien et qui pouvait être répliqué ailleurs, qu’il puisse aussi aller l’implémenter ailleurs.
La troisième dimension de cette convention, c’est la construction d’une brigade de surveillance de l’environnement. Donc c’est vous dire que la question environnementale est centrale dans notre façon d’opérer.
Je vous ai parlé de N’gongui, c’est un développement dans une lagune, dans un milieu qui peut être fragile. Il faut un opérateur sérieux, conscient de l’importance de préserver la nature. Assala est aujourd’hui cet opérateur. Et nous sommes confortables d’avoir les autorités à nos côtés pour voir comment nous fonctionnons.
Avez-vous un aspect à développer sur lequel nous ne sommes pas appesantis?
Chez Assala, nous disons que nous sommes tournés vers l’avenir. Et une année après le rachat par la GOC, nous sommes résolument tournés vers cet avenir. Nous continuons à construire les fondamentaux et nous nous projetons vers cet avenir. Toutes les forces vives de la nation qui peuvent nous aider à réaliser cet avenir ambitieux sont invitées à collaborer avec nous.
Et s’il fallait imager cet avenir, comment le décririez-vous?
Je le décrirais comme un avenir dans lequel, par notre activité, nous apportons des emplois, que des hôpitaux peuvent être construits, que le nom Assala soit confortablement établi comme étant un vecteur de développement pour le pays, et qu’on arrête de se méfier d’Assala parce qu’au Gabon, Assala est dirigé par des Gabonais et qu’Assala a une équipe qui est basée à Londres. Non, c’est un ensemble qui fait que ce sera un succès pour nous, pour notre actionnaire, la GOC, et pour l’État gabonais.
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