Africa-Press – Gabon. À l’approche de l’entrée en vigueur de l’interdiction d’importation des poulets de chair annoncée pour janvier 2027, les Journées de réflexion des acteurs de la filière avicole (Jorafa), tenues les 5 et 6 septembre 2025 à la Chambre de Commerce de Libreville, ont réuni les acteurs publics et privés autour d’un objectif commun: bâtir une stratégie nationale pour l’autosuffisance avicole. Ces assises entendent faire du Gabon un modèle de souveraineté alimentaire et un hub avicole en Afrique centrale.
Le Gabon importe chaque année près de 55 000 tonnes de viande de volaille, une dépendance qui fragilise sa sécurité alimentaire et pèse sur sa balance commerciale. Conscient de cette vulnérabilité, le président de la République, Brice Clotaire Oligui Nguema, a fixé le cap: « L’indépendance politique sans souveraineté économique n’est qu’un leurre. » Une déclaration qui résonne comme un appel à la responsabilité collective dans la transformation de la filière avicole nationale.
C’est dans cette perspective que les Jorafa ont été organisées par le Think Tank Perspectives Africa, en partenariat avec la Chambre de Commerce, la Coopérative des Éleveurs de l’Estuaire et plusieurs fédérations professionnelles. L’événement visait à identifier les défis, définir les priorités d’action et co-construire un Mémorandum stratégique pour la période 2026-2032.
Lors de ces assises, les recommandations prévoyaient la création d’un Groupement d’Intérêt Économique (GIE) pour structurer la filière. Ccette initiative s’est concrétisée avec la création du Groupe Interprofessionnel Avicole (GIA). Au-delà de cette structuration administrative, du 24 octobre au 2 novembre prochain, les éleveurs locaux signeront la convention des acteurs de la filière agricole et élevage, visant à renforcer la collaboration et la synergie entre tous les acteurs pour booster le secteur avicole gabonais et contribuer à la sécurité alimentaire du pays.
Ainsi, les travaux ont permis de dresser un diagnostic lucide: si la décision d’arrêter les importations ouvre une fenêtre d’opportunités économiques et industrielles, elle impose également de mobiliser les acteurs locaux autour d’une feuille de route claire. Les discussions ont porté sur la modernisation des fermes, l’accès au financement, la formation, la structuration de la filière et la mise en place de zones agro-pastorales intégrées. « La souveraineté alimentaire ne se décrète pas, elle se construit sur la base d’un écosystème productif et compétitif », a rappelé Denis Ovono Mezui, président exécutif de Perspectives AfricaThinkTank.
Des recommandations fortes pour une filière durable et inclusive
Les participants ont insisté sur la nécessité d’un accompagnement institutionnel fort. Le développement de la filière, ont-ils souligné, suppose une synergie entre les ministères de l’Agriculture, de l’Industrie, du Commerce, du Travail et de l’Environnement. Il s’agit non seulement de renforcer la production locale, mais aussi de garantir la qualité, la traçabilité et la compétitivité des produits avicoles gabonais face à la demande nationale et sous-régionale.
Les cinq ateliers thématiques organisés pendant les Jorafa ont débouché sur des recommandations concrètes: promouvoir l’innovation technique dans les fermes, créer un cadre fiscal incitatif, améliorer les circuits logistiques et mettre en place un fonds d’investissement pour la filière. Une attention particulière a été portée au développement rural, moteur de création d’emplois et de réduction des inégalités. « Le développement de la filière avicole est une opportunité de développement et d’emplois dans les zones rurales », a souligné Marie-Claire Aboghe, présidente de coopérative agricole.
Au terme des échanges, un Mémorandum national a été adopté. Le document, destiné à orienter la Feuille de route du ministère de l’Agriculture pour 2026-2032, constitue un outil stratégique d’aide à la décision pour le gouvernement. Il trace les contours d’une politique avicole ambitieuse, capable de substituer durablement les importations par une production locale diversifiée, compétitive et respectueuse des standards environnementaux.
Les Jorafa 2025 auront ainsi servi de catalyseur pour une filière en quête de transformation. Mais la réussite de cette transition dépendra, avant tout, de la volonté politique d’associer pleinement les producteurs locaux à la mise en œuvre des réformes. Car comme le rappelait Frantz Fanon, cité dans le document: « Chaque génération doit, dans une relative opacité, affronter sa mission: la remplir ou la trahir. »
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