Africa-Press – Gabon. Depuis le lundi 22 décembre, le ministère de l’Éducation nationale est le siège d’une contestation qui ne faiblit pas. Les sortants des grandes écoles (ENI, ENSET, ENS) de la promotion 2024-2025, las d’être baladés entre les administrations, exigent leur intégration et leur mise en solde immédiate. Ils déplorent être traités comme des mendiants et en ont marre.
Ils sont une centaine, diplômes en main et détermination au cœur, à faire la navette entre le ministère de l’Éducation nationale et celui de la Fonction publique. Ce mardi encore, les enseignants sortant de l’ENI, l’ENS et l’ENSET, étaient au ministère de l’Éducation nationale. Pour ces professionnels formés par l’État, le constat est amer: deux ans pour certains et un an pour d’autres, après leur sortie d’école, le terrain leur est interdit, et leurs poches restent vides.
«L’administration a été claire: sans mise en solde, pas de terrain. Ils ne veulent plus payer de rappels, donc tant que nous ne sommes pas recrutés, nous restons à la maison», explique avec amertume Brant Boungendza, sortant de l’ENSET et porte-parole de circonstance des sortants. Une situation paradoxale alors que les établissements scolaires du pays réclament désespérément des enseignants.
Le «jeu de ping-pong» entre la DCRH et la Fonction publique
Le cœur du problème réside dans le traitement des dossiers. Si l’ex-ministre de l’Éducation nationale, Camelia Ntoutoume Leclerc, avait instruit la Direction centrale des Ressources Humaines (DCRH) d’acheminer les dossiers, le suivi semble s’être perdu dans les méandres bureaucratiques.
Selon les témoignages recueillis sur place, à la Fonction publique: les dossiers y sont depuis trois mois, mais les fameuses «fiches bleues» encore appelées fiches de renseignement tardent à être délivrées. Les manifestants dénoncent un manque de transparence, voire une «manipulation». Alors que le DCRH affirme que les dossiers sont en cours et que les numéros matricules sont imminents, les vérifications sur le terrain contredisent ces annonces. «Le DCRH n’a certainement pas déposé nos dossiers à la fonction publique, alors que ce dossier avait été constitué après le concours et il ne manquait que le certificat de capacité à l’enseignement primaire pour pouvoir compléter le dossier, donc le dossier devait être en traitement. On ne sait pas pourquoi nos dossiers sont encore ici», a témoigné un sortant de l’ENIL réclamant l’anonymat.
Une situation de précarité
Au-delà des procédures, c’est l’humiliation ressentie qui porte les manifestants. Les sortants de 2025 qui travaillent depuis quatre mois sans salaire sont aujourd’hui réduits à la précarité. Nombreux parmi eux sont des pères et mères de familles, aujourd’hui réduits à la précarité. Pour eux, le discours de la tutelle est une insulte à leur statut. «On a nos enfants à scolariser, voici les fêtes, comment on fait?», s’interroge-t-il.
«On réduit les enseignants en mendiants. Le DCRH prétend sur tous les médias qu’il veut nous rendre « service ». Quel service? Nous avons été formés dans des écoles d’État, l’État a le devoir de nous recruter. Ce n’est pas du recrutement direct, nous ne demandons pas l’aumône», martèle le porte-parole en poursuivant.
Les revendications: un calendrier précis
Face à ce qu’ils qualifient de «mépris», les sortants de l’ENI, l’ENSET et l’ENS lancent un ultimatum. Ils réclament, en effet, la mise en solde avant la nouvelle année. Ils exigent également de percevoir leurs premiers émoluments au plus tard le 25 janvier 2026. À côté de ces réclamations, ils veulent des affectations immédiates pour mettre fin aux allers-retours inutiles. Le sit-in se poursuit, et les manifestants promettent de rester «debout» tant que la signature finale n’aura pas été apposée sur leurs documents d’intégration.
Alors que le système éducatif gabonais souffre d’un manque criant de personnel dans les salles de classe, voir des promotions entières d’enseignants formés rester sur le carreau apparaît comme une aberration pour les manifestants. Les sortants exigent désormais une affectation avec effet immédiat. Ils préviennent que ce mouvement n’est qu’un avertissement. Si aucune décision concrète n’est prise dans les plus brefs délais, ils comptent durcir le ton pour obtenir gain de cause.
Thecia Nyomba





