Positions Africaines Face À la Guerre IsraëL–Iran

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Positions Africaines Face À la Guerre IsraëL–Iran
Positions Africaines Face À la Guerre IsraëL–Iran

Anouar CHENNOUFI

Africa-Press – Guinée. L’Asie occidentale a connu une forte escalade des tensions entre Israël et l’Iran au cours du mois de juin 2025, suscitant une vive inquiétude internationale, et ce, suite à l’attaque surprise menée par l’armée israélienne contre Téhéran, qui, de son côté, n’est pas resté les bras croisés, bien au contraire, sa réplique fût également « rapide » et progressivement destructive à la fois.

Cet état de fait a été évoqué par le Haut-commissaire aux droits de l’homme, Volker Türk, qui a été l’un des principaux défenseurs de ces positions, et qui a appelé à la désescalade, soulignant la nécessité d’engager d’urgence des négociations diplomatiques pour mettre fin à l’effusion de sang et ouvrir la voie à une solution.

Türk a exhorté les parties à respecter le droit international et à protéger les civils. Cette position a été reprise par l’Union européenne, où la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, a affirmé qu’« une solution négociée est la meilleure solution à long terme », tout en soulignant le rejet par l’Iran de la possession d’armes nucléaires.

Une situation dangereuse et préoccupante qui n’est pas passée inaperçue à travers le globe
1. Au niveau du Continent africain

Plusieurs pays et organisations africains ont exprimé leur ferme condamnation des attaques israéliennes contre l’Iran, mis en garde contre leurs répercussions sur l’ensemble du Moyen-Orient et appelé à la négociation et au dialogue.

En revanche, d’autres pays du continent ont exprimé leur solidarité avec l’Iran face à « l’agression israélienne », tandis que certains pays africains sont restés silencieux face aux attaques israéliennes qui ont débuté vendredi 13 juin dernier à l’aube et ont visé des sites militaires et nucléaires iraniens, tuant de hauts cadres militaires, des scientifiques nucléaires et plusieurs civils.

La position de l’Union africaine a clairement exprimé quant à elle la tendance croissante de nombre de ses États membres à adopter un « non-alignement » sur les positions américano-occidentales. Au premier jour de l’agression contre la République islamique d’Iran, le président de la Commission de l’Union africaine, Mahmoud Ali Youssouf, a fait savoir sa profonde préoccupation face aux « informations faisant état d’une frappe aérienne israélienne contre l’Iran et de l’escalade des hostilités au Moyen-Orient ». Il a appelé à une cessation immédiate des hostilités et à la plus grande retenue de toutes les parties. Il a estimé que « l’évolution actuelle de la situation constitue une grave menace pour la paix et la sécurité internationales (y compris en Afrique) ».

Dans une déclaration officielle du président de sa Commission, Mahmoud Ali Youssouf, l’Union africaine a réitéré son « ferme engagement à soutenir la paix, le dialogue et la résolution pacifique des conflits », appelant à « la raison et les solutions diplomatiques pour éviter une nouvelle détérioration de la situation dans la région ».

2. Réactions des pays africains face à l’escalade du conflit entre Israël et l’Iran

-/- L’Afrique du Sud

Revenant sur ce conflit, notamment l’agression lancée par Israël contre l’Iran, Pretoria a exprimé sa « profonde préoccupation » face aux frappes israéliennes contre des cibles en Iran, en particulier des sites militaires, des installations nucléaires et des infrastructures civiles, les qualifiant de contraires au droit international.

Le gouvernement a saisi l’occasion d’appeler à l’apaisement et à un dialogue diplomatique pour résoudre cette nouvelle crise ayant éclaté dans la région.

-/- L’Egypte

De son côté, le pays des Pharaons, dans un communiqué publié par son ministère des Affaires étrangères, a condamné « cette action injustifiée qui ne fera qu’attiser la crise et aggraver le conflit dans la région ».

Le ministre égyptien des Affaires étrangères, Badr Abdel Aty, a confirmé ultérieurement, lors d’un entretien téléphonique avec son homologue iranien, Abbas Araghchi, le rejet et la condamnation par l’Égypte de « la violation de la souveraineté des États et de leur intégrité territoriale ».

Idem pour Al-Azhar Al-Sharif, en Égypte, qui a condamné à son tour « l’agression sioniste contre l’Iran » et, dans un communiqué, il a appelé à « la fin des violations sionistes répétées contre les pays et les peuples de la région ».

-/- Le Nigéria

Ce grand pays africain du golfe de Guinée avec plus de 235 millions d’habitants et à près d’1 Million de km2, a appelé à la retenue et à un cessez-le-feu immédiat, tout en condamnant les frappes « préventives » d’Israël contre l’Iran, et en réaffirmant son engagement en faveur de la coexistence pacifique.

Dans son communiqué, le ministère nigérian des Affaires étrangères a souligné que « le cycle actuel de représailles mettra non seulement en danger la vie des civils, mais menacera également d’entraîner l’ensemble du Moyen-Orient dans une instabilité accrue, avec des conséquences désastreuses pour la paix et la stabilité économique internationales, ce qui aura des répercussions sur la sécurité et le développement économique internationaux ».

-/- Le Bénin

Même si ce pays a mis l’accent sur la nécessité d’un retour au dialogue entre les deux pays en guerre, il a appelé à la retenue et à un cessez-le-feu immédiat, tout en condamnant à son tour les attaques israéliennes et en réaffirmant son engagement en faveur d’une coexistence pacifique.

-/- Le Sénégal

Dakar a appelé à un cessez-le-feu immédiat, tout en exprimant sa « profonde préoccupation » et « sa condamnation » de tout acte d’agression contraire au droit international. Le Sénégal a plaidé pour un règlement pacifique et suggéré de solutionner ce conflit par le dialogue.

-/- L’Algérie

Ce pays nord-africain, dixième plus grand pays au monde et le plus grand pays d’Afrique, du monde arabe et du bassin méditerranéen, avec une superficie de 2.381.741 km2 et 46,16 millions d’habitants (2023), a adopté une position ferme, condamnant « avec force » les opérations militaires israéliennes.

Il s’agit là d’une réaction qui s’inscrit dans sa politique étrangère historiquement critique, envers les interventions occidentales au Moyen-Orient.

-/- Le Mali

Membre de l’Alliance des États du Sahel, le gouvernement malien s’est abstenu de toute déclaration publique. Cependant, son rapprochement diplomatique récent avec l’Iran et son retrait récent de l’Organisation Internationale de la Francophonie laissent supposer une posture favorable à Téhéran.

-/- Le Niger

Bien qu’aucun communiqué officiel n’ait été publié, il importe de rappeler que le Niger a signé un accord de coopération économique et sécuritaire avec l’Iran en avril 2025, dans le cadre de l’Alliance des États du Sahel, ce qui suggère une solidarité implicite.

-/- La Tunisie

Le Ministère tunisien des Affaires étrangères a qualifié les frappes israéliennes de « violation flagrante » des chartes de l’ONU et a exhorté la communauté internationale à intervenir. Parallèlement à ce qui se passe entre Israël et l’Iran, la société civile tunisienne a également manifesté sa solidarité en envoyant un imposant convoi humanitaire vers Gaza.

-/- La Mauritanie

La Mauritanie, qui a rétabli ses relations diplomatiques avec l’Iran en 2023, n’a pas encore publié de déclaration officielle.

-/- La Libye

Pour ce qui est de la Libye, traditionnellement proche de l’Iran, elle reste dans une situation géopolitique instable mais sans hostilité manifeste envers Téhéran.

-/- Le Ghana

Des pays comme le Ghana et autres, ont également appelé à la retenue, bien que leurs réactions aient été moins médiatisées.

-/- Le Kenya

Le Kenya, un Etat d’Afrique orientale donnant sur l’océan Indien, s’est exprimé à travers un communiqué rendu publique par le ministre kenyan des Affaires étrangères, Korir Sengwe, lequel a confirmé que son gouvernement suivait avec une vive inquiétude l’évolution de la situation liée aux frappes israéliennes contre l’Iran, avertissant qu’une action « incontrôlée » pourrait avoir de « graves répercussions sur la paix et la sécurité régionales et mondiales ».

Sengwe a exhorté « Israël et l’Iran à faire preuve de retenue et à rechercher une solution pacifique au problème actuel qui a conduit à l’escalade actuelle, conformément à la Charte des Nations Unies ».

3. Au niveau de la Ligue arabe

De son côté, la Ligue arabe a condamné les attaques israéliennes sur le territoire iranien, soulignant qu’elles « constituent une violation flagrante du droit international ».

Dans un communiqué, le Secrétariat général de la Ligue arabe, Ahmed Aboul Gheit, a appelé à « une intervention décisive et immédiate de la communauté internationale pour mettre fin à ces attaques, qui menacent d’embraser la région ».

La Ligue arabe, a souligné également la nécessité de « contenir l’escalade et d’empêcher que la situation ne dégénère ».

• Crainte des conséquences économiques sur l’Afrique

Plusieurs analystes ont averti que le conflit pourrait avoir des répercussions économiques sur l’Afrique, notamment une hausse des prix des produits importés et une inflation galopante.

En résumé, les réactions africaines varient de la condamnation ferme des frappes israéliennes (Algérie, Tunisie) à des appels à la retenue et au dialogue (Sénégal, Nigéria, Bénin), en passant par des soutiens implicites à l’Iran (Niger, Mali).

Néanmoins, on pense que la crise a également ravivé les craintes d’un impact économique sur le continent brun.

• Implications et impacts dangereux de la guerre Iran-Israël

Revenant sur cette délicate situation dans la région, Dr Liqaa Makki, chercheur principal au Centre d’études d’Al Jazeera, a déclaré que la guerre entre l’Iran et Israël constituait un tournant dangereux dans la région, avec des signes d’expansion et une menace directe pour la vie des populations et la stabilité des pays de la région. Il a souligné que toute escalade pourrait entraîner l’implication des principaux acteurs internationaux et le déclenchement d’une confrontation régionale globale.

Makki a expliqué entre-autres que la riposte iranienne sans précédent, qui a visé le territoire israélien avec des dizaines de missiles, a démontré la transformation de la confrontation, passant d’opérations limitées à ce qui semble être le début d’une « véritable guerre ».

Il a averti que les répercussions immédiates de ce conflit commençaient à se faire sentir, notamment la fermeture de l’espace aérien de cinq pays et la perturbation de l’activité économique, ajoutant que l’extension des bombardements pourrait inclure des villes et des capitales de la région, et que la possibilité d’une entrée des États-Unis sur la ligne de front existe, malgré leurs tentatives de s’abstenir de toute implication directe.

Si cela se produisait, leurs bases et leurs intérêts dans la région seraient vulnérables aux attaques, que ce soit de l’Iran lui-même ou de ses alliés régionaux.

• Autres implications stratégiques prévisibles

Selon les observateurs, le golfe Arabique représente une artère pétrolière vitale pour le monde, et que la fermeture du détroit d’Ormuz – comme annoncée par l’Iran en cas de poursuite de l’escalade – pourrait priver les marchés mondiaux d’environ 60 % de leurs approvisionnements. Ils ont également évoqué la possibilité d’attaques directes contre des installations pétrolières et énergétiques, menaçant ainsi de déclencher une crise économique mondiale.

La même source n’a pas négligé les implications stratégiques à long terme de la guerre, avertissant que l’objectif d’Israël ne se limite plus à « limiter les capacités iraniennes », mais vise également à « renverser le régime de Téhéran », estimant que cette approche était dangereuse, car elle ouvrirait la voie à des scénarios de conflit interne et d’effondrement potentiel, si Israël parvenait à atteindre cet objectif avec le soutien occidental.

Toutefois, les positions des pays de la région et d’ailleurs témoignent d’une conscience collective internationale du danger de sombrer dans un conflit global et incontrôlable. Malgré la diversité des tons et des degrés de condamnation, le dénominateur commun de la plupart des déclarations est l’affirmation selon laquelle l’escalade militaire entre Israël et la République islamique d’Iran menace la stabilité régionale et la paix mondiale, et compromet toute possibilité de solution pacifique. Elles témoignent également d’un net penchant pour l’Iran ou pour Israël.

• Ce que la région ne pourrait tolérer

Les États du Golfe ont toujours exprimé leur rejet de toute guerre dans la région et en ont informé Washington depuis le début de l’escalade, car la poursuite de la guerre ne serait dans l’intérêt d’aucune des parties et que la région tout entière n’est pas prête à affronter une guerre majeure, surtout après les conséquences de l’agression contre Gaza, qui a suscité la colère de la rue arabe.

Toujours selon les observateurs et les experts concernés, l’Iran est un pays vaste et crucial, jouissant d’une grande fierté nationale et ethnique et doté de réelles capacités de confrontation, et il ne serait pas exclu pour Téhéran d’aller jusqu’au bout de cette guerre, compte tenu de ce qu’il considère comme une nécessité de dissuasion et de préservation de sa dignité souveraine, tant sur le plan intérieur qu’international.

Ces points de vue interviennent alors que l’Iran a annoncé une « riposte écrasante » à Israël après que des installations iraniennes furent la cible d’une série d’attaques, entraînant la mort de plusieurs de ses responsables militaires et experts nucléaires d’élite. L’Iran a alors riposté avec des centaines de missiles balistiques, dont certains ont abattu un avion de chasse israélien et touché des sites sensibles à Tel-Aviv.

Par ailleurs, alors qu’Israël poursuit ses frappes aériennes et ses bombardements sur des cibles situées en profondeur en Iran, il a été révélé que le bâtiment du ministère israélien de la Défense, dans le district de Kirya, a subi de graves dommages. Pendant ce temps, l’état d’urgence demeure en vigueur sur l’ensemble du territoire israélien, ce qui complique encore la situation régionale et menace d’une conflagration à grande échelle.

Cependant, selon eux, la capacité des parties prenantes à influencer cette évolution semble limitée, à moins d’être animées par une volonté politique ferme de Washington et de ses alliés.

La persistance de la situation actuelle nous ouvre donc un nouveau chapitre de conflit régional, plus vaste et plus dangereux que tout ce que la région a connu ces dernières années.

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