Africa-Press – Madagascar. Le pouvoir en place montre chaque jour sa nervosité croissante à l’approche du Sommet de la Commission de l’océan Indien. Les réunions des forces de l’ordre se multiplient, et les différents représentants jouent à la carotte et au bâton. Ceux qui font semblant d’avoir un minimum d’esprit civilisé appellent à la cohésion nationale, afin que Madagascar puisse accueillir cette réunion la tête haute. « Le linge sale se lave en famille » a affirmé une députée pour encourager le silence. Quant aux autres, moins subtils dans leurs gros sabots, ils multiplient les menaces à peine voilées contre toute tentative de l’opposition de (se) manifester durant le Sommet.
Cela serait en effet embarrassant que les vahiny soient témoins de l’habituelle répression brutale démocratique de la part des forces de l’ordre, au cas où l’opposition serait tentée d’utiliser le cadre de cette rencontre internationale pour acculer le pouvoir à la faute. Le pouvoir a à sa disposition deux méthodes efficaces pour mâter les leaders de l’opposition et les faire taire: l’intimidation ou la corruption, le « tabassage » ou « l’arrosage ». On attendra donc la suite avec curiosité: les opposants vont-ils se soumettre, ou prendre leur courage à deux mains ? À moins qu’une solution diplomatique ne soit mise en place, avec une audience accordée par Emmanuel Macron à une délégation de l’opposition, en contrepartie du renoncement à des manifestations publiques: cela permettra à tout le monde de sauver la face.
Les autorités commettent toutefois une grosse erreur en pensant que forcer les gens à se terrer et à se taire empêchera les Chefs d’État étrangers d’être au courant des réalités quotidiennes malgaches. Dans chaque représentation diplomatique, qu’il s’agisse d’ambassades ou de bailleurs de fonds, il y a toujours des techniciens chargés de rapporter quotidiennement la situation de façon objective au Chef de mission, qui va ensuite les répercuter dans leurs Capitales ou Sièges. Ces équipes sont souvent composées de nationaux, sur lesquels la propagande du pouvoir n’a aucune prise: ils vivent au quotidien les délestages, l’insécurité, l’inflation et l’incompétence des dirigeants. En outre, on laissera aux naïfs le soin d’imaginer que la présence simultanée de Marc Ravalomanana et Hery Rajaonarimampianina à Paris à quelques jours de la venue d’Emmanuel Macron n’est qu’un hasard. On laissera aux sots le soin d’imaginer qu’Isabelle Delattre n’a pas été « débriefée » par les équipes de l’Élysée après son renvoi de Madagascar de son poste d’ambassadeur de l’Union européenne. Par conséquent, penser que les chefs d’État étrangers ne sauront rien des réalités malgaches juste parce qu’ils ne verront rien pendant leur séjour, c’est se fourrer les doigts dans l’œil de façon particulièrement stupide.
Toutefois, notre chef de l’État superficiel dont la capacité de compréhension s’arrête au werawera, sera probablement satisfait de la vitrine hypocrite des sourires pour les photos et du langage diplomatique des discours. On suggère même à Emmanuel Macron de le féliciter publiquement de son titre de pacotille de leader africain de l’année, afin de le remercier d’avoir mis ses ministres à balayer les rues.
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