Comment les vestiges d’une petite ville romaine sont venus modifier notre compréhension du déclin de l’Empire

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Comment les vestiges d’une petite ville romaine sont venus modifier notre compréhension du déclin de l’Empire
Comment les vestiges d’une petite ville romaine sont venus modifier notre compréhension du déclin de l’Empire

Africa-Press – Madagascar. Fondée et active sous l’Empire romain, la ville d’Interamna Lirenas avait jusqu’ici toujours été considérée comme un “trou perdu” par les archéologues et les historiens. L’expression n’est pas de nous, mais bien de ceux qui l’ont étudiée durant treize ans. Située dans le centre de l’Italie, Interamna Lirenas s’est pourtant révélée être une cité tout à fait fascinante, puisque les découvertes qu’y ont fait des chercheurs de l’Université de Cambridge (Royaume-Uni) ont de quoi modifier drastiquement notre compréhension de l’histoire romaine.

Les résultats de leur travail d’étude au long cours, publiés le 12 décembre 2023 dans la revue Roman Urbanism in Italy, révèlent que le déclin de cette ville du sud du Latium, fondée comme une colonie latine en 312 av. J.-C., avait commencé environ 300 plus tard que précédemment supposé, soit au 6e siècle de notre ère, probablement suite à l’invasion de l’Italie par les Lombards. La ville aurait même continué à prospérer jusqu’au 3e siècle après J.-C., contredisant ainsi l’idée d’un déclin généralisé de l’Empire à cette même époque.

Un centre commercial d’ampleur

“Nous avons commencé avec un site si peu prometteur que personne n’avait jamais essayé de l’excaver – ce qui est très rare en Italie. Il n’y avait rien en surface, aucune preuve visible de bâtiments, juste des morceaux de poterie cassée”, explique Alessandro Launaro, auteur principal du papier et chef du projet “Interamna Lirenas” à la Faculté de Lettres classiques de l’Université de Cambridge. Lui et son équipe ont pourtant réussi à mettre au jour des structures dignes d’une ville florissante, dont la population a pu atteindre jusqu’à 2000 âmes à son apogée.

Le relevé géoradar effectué par l’équipe près du fleuve Liri a notamment révélé la présence d’un grand entrepôt, d’environ 40 sur 12 mètres, mais aussi d’un temple et d’un complexe de bains. Toutes ces structures devaient, selon eux, desservir un port fluvial entre la fin du 1er siècle avant J.-C. et le 4e siècle de notre ère. “Les ports fluviaux n’avaient pas seulement besoin d’entrepôts”, assure Alessandro Launaro. “Les gens passaient beaucoup de temps à travailler et à se reposer dans les environs, et ils avaient donc besoin de toutes sortes d’aménagements comme ceux que nous avons trouvés ici.” C’est très probablement ce port fluvial qui a permis à Interamna de se développer, en l’occurrence entre les centres d’importance qu’étaient Aquinum et Casinum, au nord, et Minturnae et la côte tyrrhénienne au sud-est.

Riches aménagements urbains

Ont aussi été découverts le long du côté nord-ouest de la ville les vestiges d’un riche théâtre couvert qui devait dominer une terrasse. Les théâtres couverts comme celui-ci, qui devait pouvoir accueillir 1500 personnes, sont des bâtiments relativement rares dans l’Italie romaine, résultats d’une “amélioration significative des structures en plein air, sur le plan acoustique, architectural et financier”, écrivent les chercheurs. “Le fait que cette ville ait opté pour un théâtre couvert, un bâtiment aussi raffiné, ne correspond pas à une ville en déclin. Ce théâtre était un important symbole de statut social. Il témoignait de la richesse, de la puissance et de l’ambition de la ville”, complète Alessandro Launaro.

Outre celui présent près du port, la ville comptait trois complexes de bains dont le plus grand d’entre eux, d’environ 2400 m2 et situé non loin du forum, comprenait une grande piscine entourée d’un portique. Enfin, 19 “bâtiments à cour” de grande taille, situés pour la plupart à distance du forum, auraient pu servir de marchés intérieurs (macella), de maisons de guilde (scholae), d’immeubles d’habitation et, surtout, d’entrepôts publics (horrea). De quoi encore suggérer que la ville était un centre commercial d’importance. “Ce que nous avons découvert n’était pas une ville en déclin, bien au contraire. Nous avons trouvé une ville prospère qui s’était adaptée à chaque défi pendant 900 ans.”

L’analyse des fragments de poteries a conduit les chercheurs à la même conclusion. Ce travail, entamé il y a près de quarante ans par des archéologues canadiens (qui consiste en l’étude de la répartition des tessons de poterie fine et d’amphores dans la terre de labour) a permis de conclure que l’occupation de la ville avait culminé entre la fin du 2e et le début du 1er siècle avant J.-C., et qu’elle n’avait pas montré de signe de déclin avant la fin du 3e siècle.

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