Africa-Press – Mali. Dans la mêlée des nombreux conflits ayant surgi entre la France et le Mali ces derniers temps, auxquels s’est jointe la colère « occidentale » de la part des partenaires européens de la France, ainsi qu’« africaine » à travers les dures sanctionnées qui lui furent imposées par la CEDEAO, depuis le 9 janvier 2022, le Mali continue à être bombardé entre-autres par des campagnes médiatiques choquantes et à la fois blessantes.
La toute dernière étant celle l’accusant d’avoir transformé un camp militaire au milieu du désert en un lieu où divers types de tortures et de meurtres étaient pratiqués.
Pour revenir à cette accusation, selon ce qu’a rapporté l’éminent journal français « Le Monde », il faut reconnaître que dès l’arrivée des mercenaires du groupe paramilitaire privé russe Wagner au Mali, ils ont commencé à maltraiter et torturer des civils dans le pays,
Et malgré la colère française et occidentale, et les sanctions africaines qui visaient Bamako, la détermination de ce dernier (le Mali) à utiliser les mercenaires russes ne s’est pas découragée. C’est ce qu’ont confirmé des médias occidentaux en début d’année, qu’environ un millier de ce groupe proche du Kremlin étaient déployés au Mali, avec le soutien logistique de l’armée de l’air russe.
C’est pourquoi, en guise de réaction à l’arrivée de ces mercenaires, le président français Emmanuel Macron avait annoncé, en février dernier, qu’il retirerait toutes les forces de son pays qui combattent les groupes armés au Mali depuis 2013.
« Nous ne pouvons pas rester militairement engagés aux côtés des autorités de facto, dont nous ne partageons pas la stratégie et les objectifs cachés », avait-il déclaré.
L’accusation repose sur le fait que, quelques semaines seulement se sont écoulées depuis leur déploiement dans le pays, que les unités « Wagner » commencèrent à semer la terreur parmi les civils maliens et à commettre de graves violations à leur encontre, selon une enquête du journal français, qui a indiqué que les mercenaires russes auraient transformé une caserne militaire malienne en un « centre de détention », dans lequel les opérations de tortures des plus horribles sont pratiquées.
Une prison infernale de Wagner
Dans son enquête, le quotidien français a déclaré qu’à l’intérieur de cet établissement, des séances d’interrogatoire de civils ont lieu, au cours desquelles des décharges électriques sont utilisées comme méthode de torture.
Ces séances sont encadrées, selon le témoignage de l’une des victimes, « d’un homme blanc qui parle une langue incompréhensible et d’un traducteur malien ».
La victime, qui était un simple berger, affirma qu’ils le torturaient et lui demandaient : « Où sont les terroristes ? », et qu’il leur répondit qu’il ne savait pas, alors ses tortionnaire continuaient leur sale besogne.
L’individu poursuivit en disant que le soldat blanc « portant le même uniforme que les forces armées maliennes, m’a fait boire beaucoup d’eau avant que le soldat malien ne m’attache un fil électrique autour de mes orteils et ne fasse activer une décharge électrique plusieurs fois jusqu’à ce que je m’évanouisse ». Après cela, « les trois hommes m’ont attaché les pieds et les mains et m’ont pendu la tête en bas ». Le militaire malien a sorti un couteau et m’a dit « on va te tuer, mais l’étranger leur a dit de me laisser, que ne n’avais aucune information, après quoi je fus libéré ».
Les violations de Wagner au Mali
A vrai dire, ce ne sont pas les seuls abus commis par les forces du groupe Wagner, avec les forces gouvernementales au Mali.
Selon un nouveau rapport* de Human Rights Watch, qui vient d’être publié le 15 mars, « au moins 107 civils, dont des commerçants, des chefs de village et des enfants, ont été tués récemment dans le centre et le sud-ouest du Mali depuis décembre 2021», notant que les forces de sécurité maliennes et les mercenaires de « Wagner » sont en rapport avec l’exécution d’au moins 71 civils.
*Lien du rapport HRW: https://www.hrw.org/fr/news/2022/03/15/mali-nouvelle-vague-dexecutions-de-civils
Corinne Dufka*, la Directrice de l’organisation HRW dans le Sahel africain, a commenté : « Ces chiffres représentent une augmentation spectaculaire (…) et ce mépris total de la vie humaine, qui est clairement un crime de guerre, doit faire l’objet d’une enquête, et ceux qui sont impliqués devraient être punis d’une manière appropriée au poids de leurs crimes ».
* Directrice adjointe de la division Afrique de Human Rights Watch, Corinne Dufka est chargée notamment de superviser les recherches sur l’Afrique de l’Ouest. Son expertise porte en particulier sur la Côte d’Ivoire, la Guinée, le Liberia, le Mali, le Nigeria et le Sierra Leone.

Notons que l’un des témoignages inclus dans le document de l’enquête indique qu’une personne qui dit avoir été détenue au camp de Diabaly au début de ce mois de mars, a vu des soldats faire sortir une trentaine d’hommes de leur cellule, durant la nuit, dont les bras et les jambes étaient cassés (fracturés), avant de les mettre dans des camions. Par la suite, au moins 35 corps ont été découverts près du village de Danguèrè Wotoro.
« Ce ne sont pas des actes isolés, ni aléatoires. Ce camp est devenu un centre de torture où tout un système de sévices a été mis en place, et la plupart de ces victimes présumées seraient issues de l’ethnie peule, que certains soldats accusent depuis des années de complicité avec les groupes armés », a souligné une source humanitaire internationale.
Réaction des autorités maliennes
Au vu de ces accusations, les autorités de Bamako ont dénoncé, quant à elles, une « campagne d’information visant à discréditer les forces armées maliennes (Fama) ».
Le fait même que des médias français aient été les premiers à diffuser ces informations « non vérifiées » indique indirectement l’intérêt de la France à discréditer l’armée malienne aux yeux de la communauté internationale.
Néanmoins, ce qui est certain, c’est que le feuilleton « France – Mali » continuera d’être « tourné et diffusé » aussi longtemps que la situation politique et sécuritaire demeurera ainsi au Mali, et jusqu’à la remise du pouvoir aux civils.
Anouar CHENNOUFI
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