Quand « The Washington Post » revient âprement sur le Mali et le retrait des militaires français

13
Quand « The Washington Post » revient âprement sur le Mali et le retrait des militaires français
Quand « The Washington Post » revient âprement sur le Mali et le retrait des militaires français

Anouar CHENNOUFI

Africa-Press – Mali. Nous revenons à nos fidèles lecteurs et lectrices avec les propos de William Drozdiak, ancien rédacteur en chef et correspondant à l’étranger du Washington Post, et membre du Wilson International Center for Scholars, qui a publié un intéressant livre sur la situation au Mali intitulé « Le dernier président de l’Europe : la course d’Emmanuel Macron pour relancer la France et sauver le monde ».

Dans un article publié dans le Washington Post, le 29 août 2022, Drozdiak a déclaré que « le retrait des forces françaises du Mali était un coup fatal aux efforts militaires de l’Occident pour contrer la propagation de la menace terroriste dans la région du Sahel africain et du grand Sahara ».

Si nous faisions un bond en arrière

Couverture du livre de Drozdiak

L’échec de la mission française d’environ 5 000 soldats, dans le cadre de l’opération Barkhane, a démontré les difficultés ahurissantes de lancer une campagne de contre-insurrection contre les soi-disant vestiges des deux organisations terroristes, à savoir Al-Qaïda et Daech dans la région. Et cela a soulevé des questions sur les mesures que la Russie et la Chine pourraient prendre dans le vide géopolitique laissé par des gouvernements occidentaux frustrés et précipités pour partir.

Alors que les États-Unis tentent de tirer les leçons de la guerre de deux décennies qu’ils ont menée contre les talibans en Afghanistan, et qui s’est soldée par une sortie chaotique il y a un an, la France reconsidère sa stratégie face à la prolifération des groupes armés dans plusieurs de ses anciennes colonies en Afrique.

Par conséquent, Drozdiak a déclaré que le président français Emmanuel Macron avait demandé à son ministre de la Défense et à ses conseillers de revoir l’action militaire de la France dans la région du Sahel et l’échec persistant à éliminer la menace posée par les groupes terroristes.

Il a commenté que le départ des Français a ouvert la voie aux mercenaires russes de la Wagner Security Contracting Company, qui est étroitement liée au Kremlin, sachant que le nombre de ces mercenaires paramilitaires arrivés au Mali ces derniers mois est estimé à environ 1 000 combattants.

Pour leur part, les dirigeants du Mali avaient affirmé que la décision prise par la France de rompre les liens avec eux ne leur a laissé d’autre choix que de chercher d’autres partenaires, et d’ailleurs la Chine envisage d’étendre sa présence dans la région et de tirer parti de ses ressources minérales.

Il importe de rappeler que le Sahel africain est une région semi-aride qui sépare le désert au nord de la savane tropicale au sud, et s’est imposé ces dernières années comme un terreau fertile pour les groupes armés qui ont exploité les griefs de la population ainsi que la corruption et la brutalité des forces militaires et des dirigeants du Sahel.


La région du Sahel africain

L’auteur du livre a ajouté que cette région est la plus peuplée du monde, et la plus pauvre, puisque 80% vivent avec deux dollars seulement par jour. La région comprend quatre pays riverains du lac Tchad, à savoir le Cameroun, le Tchad, le Niger et le Nigéria, ainsi que le Burkina Faso, la Gambie, la Guinée, le Mali, la Mauritanie et le Sénégal.

Prés de quatre millions de personnes ont déjà fui en raison des affrontements et des guerres, et le désespoir de la population s’est accompagné de la sécheresse continue causée par les changements climatiques et la propagation de la désertification dans la région. Les 50 millions de personnes d’aujourd’hui dépendent du lac Tchad pour leur subsistance, qui, selon les experts, s’évaporera d’ici une décennie et forcera la population à se déplacer, créant davantage de souffrances dans la région.

On voit mal donc comment ces populations appauvries pourraient faire face au quadruplement de leur population dans les décennies à venir, comme prévu par les Nations Unies, car d’ici la fin de ce siècle, le Mali devrait passer de 20 millions à 85 millions d’habitants, et l’État encore plus pauvre du Niger passera de 25 millions à 165 millions d’habitants.

Donner à César ce qui est à César


L’armée française au Sahel


L’armée onusienne MINUSMA

La mission française au Mali a commencé il y a neuf ans par une série de succès qui ont stoppé l’avancée des groupes terroristes vers la capitale, Bamako. Cependant, les relations entre les forces françaises et les dirigeants militaires du Mali se sont finalement rompues, après que des généraux aient pris le pouvoir il y a deux ans. Il y eut un deuxième coup d’État l’année dernière et ils ont refusé de céder le pouvoir aux civils comme l’aurait exigé la France.

A ce propos, l’écrivain William Drozdiak estime que le retrait des forces françaises du Mali pourrait mettre en danger le sort des forces de maintien de la paix des Nations unies, notamment la « MINUSMA », lesquelles comptes 14 000 militaires travaillaient au Mali, sachant que les bataillons britanniques et allemands quitteront à leur tour le Mali, comme l’a fait la France.

Dans son livre, il a indiqué que les forces françaises ont remporté quelques victoires au cours de leur longue campagne qui, selon les estimations, auraient éliminé environ 2 700 terroristes, sans toutefois avoir pu abolir la menace des groupes armés, qui s’est plutôt accrue par le biais du recrutement de jeunes mécontents.

En effet, la menace de ces groupes s’est étendue au-delà du Mali, du Niger et du Burkina Faso, et a atteint les régions sahéliennes de l’ouest, comme le Bénin et la Côte d’Ivoire, et loin de l’enthousiasme religieux et politique, ces groupes ont pu remporter leurs victoires en capitalisant sur les forces pernicieuses du changement climatique, de la sécheresse, de la baisse des taux de production alimentaire et surtout de l’augmentation des taux de natalité.

D’ailleurs, on voit mal comment ces communautés pauvres feront face au quadruplement de leurs membres, comme le l’a prédit l’organisation des Nations Unies dans la prochaine décennie.


La population malienne en colère dans la rue

Il faut s’attendre, par contre, à ce que d’ici la fin de ce siècle, la population du Mali atteigne 85 millions, et la population des pays pauvres tels que le Niger passera de 25 millions à 165 millions.

Pour le mot de la fin, l’on devrait admettre que vaincre les groupes terroristes ne peut se faire qu’en donnant aux populations locales l’espoir d’une vie meilleure, et non pas une cause pour laquelle elles devraient mourir.

Pour plus d’informations et d’analyses sur la Mali, suivez Africa-Press

LAISSER UN COMMENTAIRE

Please enter your comment!
Please enter your name here