Africa-Press – Niger. Dans les ruelles paisibles de Dosso, une discipline ancienne, Le Kung Fu, renaît sous les pas de Ibrahim Babaradji Abdoul-Karim, surnommé Maître Wong, un jeune homme à la démarche assurée. Actuellement ceinture marron cadré, il est sur le point de décrocher sa ceinture noire, symbole d’un engagement et d’un niveau avancé. Le natif de la cité des Djermakoyes n’a pas encore franchi le cap des 30 ans, mais son nom circule déjà dans les cercles des pratiquants d’arts martiaux comme celui d’un espoir rare, humble et passionné. Depuis 2015, il s’est consacré corps et âme au Kung-Fu, un art qu’il a découvert par curiosité et qu’il a embrassé avec ferveur.
La première participation à une compétition nationale dans la catégorie des -60 kg du jeune prodige remonte à 2019. En dépit de sa détermination, il s’incline lors du combat. Un échec qu’il a accepté avec philosophie parce que la défaite est un enseignement. « Après cette défaite, j’ai redoublé d’efforts, affiné mes techniques, amélioré mon endurance, et surtout appris plus dans le domaine », a-t-il expliqué.
Selon maître Wong, trois ans plus tard, en 2022, il revient sur le ring avec plus de maturité et une meilleure préparation. Cette fois-ci, il a choisi la catégorie des -55 kg. Son travail paie: il décroche la médaille d’or, une consécration qui le propulse parmi les meilleurs de sa catégorie.
Cette année, Ibrahim Babaradji Abdoul-Karim continue sur sa lancée et termine deuxième d’un autre championnat, repartant avec la médaille d’argent. Son nom devient familier dans les cercles restreints de cet art martial.
Mais au-delà de la compétition, c’est une autre mission qui l’appelle: celle de transmettre et de veiller à la régularité des combats. Il devient arbitre national de Sanda (les katas en Kung Fu). Un rôle qu’il exerce avec rigueur et passion. « Rôle que j’ai commencé à exercer au championnat national de la 7è édition de kung-fu wushu à Zinder », explique Babaradji, le sourire aux lèvres.
Jeune homme discret aux gestes précis, Ibrahim Babaradji Abdoul Karim dirige avec assurance un groupe d’adolescents. Avec le soutien de quelques passionnés, il parvient à structurer ses séances, à étudier la philosophie taoïste et à participer à des formations ponctuelles. « Je forge ma propre méthode, adaptée au contexte local, que j’enseigne aujourd’hui à une dizaine de jeunes, dans l’enceinte du lycée Sarraounia Mangou de Dosso », a-t-il dit.
Par ailleurs, il faut rappeler que Babaradji a découvert le Kung-Fu en 2015, alors qu’il était en classe de 4è au CEG1 de Dosso, sous la tutelle de Seyni Ali, un membre de la légion de Gendarmerie de Dosso, natif de Téra, également pratiquant chevronné de cet art martial. « C’est dans les films asiatiques que naît ma fascination pour cet art martial millénaire. Je regardais Bruce Lee et Jet Li. Leur sérénité, leur rapidité, leur respect du combat m’ont captivé depuis l’enfance. Mais, Dieu a fait en sorte que je rencontre Chef Maïga », se souvient-il.
Dans un monde où la force est souvent mal comprise, Wong en donne une autre définition: la force de se maîtriser, de transmettre, d’élever. Grâce à lui et à l’appui discret mais essentiel du gendarme Seyni Ali, le Kung-Fu trouve à Dosso un visage humble.
Pour maitre Wong, le Kung-Fu n’est pas une simple activité physique. C’est une école de vie. « Le kung-fu m’a appris à me maîtriser, à écouter mon corps et à comprendre l’autre sans le juger », confie-t-il, le regard fixe mais apaisé. Il mêle exercices physiques, méditation, lectures spirituelles et échanges culturels.
Face à la montée du désœuvrement des jeunes et des tensions sociales, Ibrahim Babaradji Abdoul-Karim veut faire du Kung-Fu un vecteur de paix et d’autonomisation. Il rêve de créer un centre d’art martial à Dosso, un lieu de rencontres, d’apprentissage et de dialogue entre traditions locales et valeurs asiatiques. « Nous avons besoin de discipline, de respect de soi et des autres. Le Kung-Fu offre tout cela », dit-il.
Sous ses gestes précis, c’est une philosophie de paix qui s’exprime. Et derrière ce jeune visage, c’est toute une promesse: celle d’un Niger qui se relève avec élégance, patience et maîtrise. « Je veux que le Niger devienne un repère mondial d’art martial », martèle maitre Wong.
Il ne cache pas ses ambitions de créer à Dosso un centre d’arts martiaux avec une salle couverte, un programme structuré, un suivi éducatif. « Il faut institutionnaliser cet effort. Si l’État ou les collectivités locales pouvaient nous soutenir, on pourrait faire des merveilles », plaide-t-il.
Il rêve aussi de former d’autres encadreurs dans les villages environnants. Pour lui, le Kung-Fu est un levier d’insertion sociale, une réponse à la délinquance croissante, un outil de paix.
Adamou. I Nazirou (stagiaire)
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